Victime d’une commotion cérébrale aux derniers Championnats canadiens, le patineur de vitesse Charles Hamelin a très hâte de montrer ce dont il est encore capable.

Charles Hamelin a compris que ça n’irait pas en se réveillant.

« Dès que je suis sorti de la chambre, je me suis mis à avoir mal au cœur et à être étourdi. Je conduisais mon char à 40 et j’avais l’impression de rouler à 200 km/h. À l’extérieur de mon champ de vision, tout était flou, allongé. Plus je conduisais, moins ça allait. »

Les projecteurs de l’aréna Maurice-Richard, où il devait disputer la deuxième journée des Championnats canadiens de patinage de vitesse sur courte piste, le 22 août dernier, l’ont achevé.

La veille, il avait chuté au bout d’une ligne droite en qualifications du 500 m. Le premier impact n’a pas été si mal, mais c’est quand son jeune rival Nicolas Perreault, tombé en même temps, l’a envoyé de nouveau dans le matelas que sa tête a fait un coup de fouet.

Les effets de la commotion cérébrale se sont donc surtout fait sentir le lendemain matin. En allant voir son entraîneur Sébastien Cros, il a craqué. « J’ai braillé pendant 20 minutes. »

Exemption médicale

Ce n’est évidemment pas comme ça que le patineur de vitesse de 37 ans imaginait vivre la dernière compétition nationale de sa carrière.

Même si tout le monde lui disait de ne pas s’inquiéter, l’idée de demander une exemption médicale lui répugnait. Il avait dû suivre le même processus deux ans plus tôt après une entorse à une cheville. Laisser un comité de sélection décider de son sort n’est pas dans son ADN. Ne serait-ce que par respect pour les autres compétiteurs.

Même s’il est quintuple médaillé olympique, champion du monde en 2018 et tenant du titre du 1500 m depuis la fin de l’hiver.

« Ce n’est pas la porte par laquelle tu veux passer pour faire l’équipe nationale, faire les Jeux. […] J’aime m’entraîner, mais je suis un gars de compétitions. Ce que j’aime dans la vie, c’est faire des courses. Prouver à quel point l’entraînement a payé, que je suis encore au top. Sincèrement, je l’étais. Seb en était aussi convaincu. »

J’étais en forme pour gagner ces sélections.

Charles Hamelin

Hamelin a vite compris qu’il ne reviendrait pas avant la fin de la compétition. « J’étais capable de ne rien faire, même pas de reconduire ma fille à la garderie ou de la gérer un peu. Ça a pris trois, quatre jours avant de sentir que je pouvais embarquer sur un vélo pour pédaler un peu. »

« Bonne chance à Beijing ! »

Bien sûr, le vétéran, choisi athlète de l’année en courte piste par Patinage de vitesse Canada, a reçu la faveur du comité. Il fait partie des six patineurs qui représenteront le Canada lors des quatre Coupes du monde de l’automne, à commencer par l’épreuve-test de Pékin, le mois prochain. Ces compétitions serviront de sélection finale pour les Jeux olympiques disputés dans la capitale chinoise, en février.

« Bonne chance à Beijing ! », lui a d’ailleurs lancé un client du café d’Hochelaga-Maisonneuve où il s’entretenait avec La Presse, mardi midi.

Camisole, bermudas, lunettes de soleil, Hamelin sortait d’une séance de musculation à l’Institut national du sport du Québec, au Parc olympique.

Il se porte beaucoup mieux, ne ressentant plus aucune séquelle de la commotion, sa première depuis 2009… alors qu’il avait reçu un gros haut-parleur sur la tête (une maladresse d’un serveur lors du gala des Lauréats montréalais au chalet du Mont-Royal).

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE

Charles Hamelin à l’entraînement à Montréal

« Quand j’ai recommencé à faire du vélo, le 31 août, je me donnais à 100 % et je pouvais faire tous les entraînements demandés sans diminuer l’effort. Le 7, j’ai repris en même temps que tout le monde sur le programme. Depuis, ça va super bien. On a fait de la vitesse, de gros entraînements la semaine dernière et cette semaine. Je suis même tombé samedi et tout est beau par rapport à ça, même si on n’allait pas vite non plus. »

La paternité – il est papa de Violette depuis près d’un an et demi – est une nouvelle facette à laquelle il doit s’adapter. Il se couche plus tôt et a rangé son réveil.

« Le plus souvent, elle se lève autour de 6 h, 6 h 30, mais des fois, c’est à 5 h 40. La barre mentale des 5 h est dure… »

En théorie, il devait passer les 10 journées des sélections à l’hôtel. Son entraîneur module également les entraînements en fonction de son niveau d’énergie.

« Il y a des périodes où je m’occupais de Violette et je dormais quatre heures par nuit. J’essaie d’économiser le plus d’énergie pour en avoir le plus possible sur la glace. Seb comprend aussi la situation et fait une bonne job pour ajuster mon programme. »

Du travail technique

Limité aux seuls Mondiaux durant la dernière saison pandémique, une trêve qui lui a paru une éternité, le Montréalais en a profité pour effectuer un travail technique de fond.

« La façon dont je dépose le pied gauche en entrée de virage, je me sens beaucoup plus en confiance. Je l’avais perdue durant les deux ou trois années avant les Jeux de 2018. J’ai rushé pendant un bon bout sur ce point-là. »

Sa médaille d’or au 1500 m aux derniers Mondiaux de Dordrecht, aux Pays-Bas, lui a permis de confirmer ces bonnes impressions.

De quoi le lancer vers sa cinquième et dernière saison olympique, où il pourrait devenir le médaillé canadien le plus prolifique de l’histoire des Jeux d’hiver.