Marie-Michèle Gagnon a répondu au téléphone un peu essoufflée. Elle était en plein match de «soccer-tennis» sur un court de Lenzerheide. Une façon comme une autre de se délier les jambes à deux jours de ses dernières courses de la saison.

Pour ces finales de la Coupe du monde, l'équipe féminine canadienne fonctionne à effectif réduit. En plus de Gagnon, qui s'alignera en slalom (demain) et en géant (dimanche), Erin Mielzynski (slalom) est la seule autre invitée à cette compétition réservée aux 25 meilleures.

Un entraîneur, un technicien, un physiothérapeute et le skieur américain Travis Ganong, le copain de Gagnon, se sont donc joints aux deux skieuses pour cette séance de conditionnement où la bonne humeur régnait.

«C'est souvent comme ça pour les finales, a dit la Québécoise, quelques minutes plus tard. On est moins de monde. L'ambiance est différente. Tout le personnel est motivé. On joue, on a du plaisir, on est détendus. Tout le monde est heureux.»

Gagnon la première. Sur papier, elle n'a pas connu la saison espérée. Elle visait le 7e rang en slalom et le 15e en géant. Elle occupe respectivement les 15e et 17e positions.

«Je n'ai pas eu de super grands résultats, mais beaucoup de manches ou de sections ont été rapides, a noté l'athlète de 23 ans. Il y a beaucoup de positif dans mon ski. Des fois, c'est facile de se dire: ''Ah, ma saison a été moyenne parce que je n'ai pas eu les résultats que je voulais.'' Finalement, il y a vraiment beaucoup de positif dans ma façon de skier. J'ai eu une bonne progression et je suis vraiment contente quand je pense à ce qui s'en vient vers Sotchi.»

En attendant les Jeux olympiques, il y a ce géant et ce slalom de Lenzerheide. Consciente que les objectifs chiffrés ne l'ont jamais bien servie, Gagnon les aborde néanmoins avec une grande confiance. «Plus en confiance que pour presque toutes les autres courses cette année», a-t-elle avancé.

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Le milieu de l'hiver n'a pas été de tout repos. Des sorties de piste et des résultats moyens ont miné son moral et sa confiance. À la fin de janvier, une période de ressourcement chez elle à Lac-Etchemin a contribué à la relancer. «Quand je retourne là-bas, je me sens toujours rechargée. Les gens sont super contents de me revoir, ils me traitent comme une idole. Ça ne les dérange pas si je n'ai pas fait huit podiums!»

Elle a aussi refait le point avec son psychologue sportif. Celui-ci l'a aidée à renouer avec une phrase clé autour de laquelle le travail des slalomeuses canadiennes s'articule depuis trois ans: «Momentum in the corridor». «C'est difficile à expliquer, a dit Gagnon. C'est une sensation qu'on recherche. Au lieu de skier d'un piquet à l'autre, l'idée est de prendre sa vitesse et de l'amener en attaquant vers le bas de la pente.»

Quoi qu'il en soit, ça marche. Des Mondiaux de Schladming concluants (8e en géant) et un dernier week-end de Coupe de monde éclatant (4e en slalom à Ofterschwang) sont là pour en témoigner.

Ce n'est peut-être pas un hasard si cette excellente course, dimanche en Allemagne, est survenue un an jour pour jour après son premier et seul podium en Coupe du monde, une troisième place en slalom à Äre.

Gagnon croit que la condition physique des Canadiennes, qui, faute d'un accès facile aux glaciers, passent beaucoup de temps en gymnase durant la morte-saison, finit par payer dans la dernière ligne droite.

«La saison, malheureusement, se termine. Il faudra attendre une couple de mois avant de reprendre. Je commence souvent la saison en feu [6e à Sölden, NDLR] et je la finis toujours en feu. C'est peut-être le fait d'être à l'étranger si longtemps. Au début, ça va, et à la fin, c'est la bonne condition physique qui me permet de gagner un avantage.»

Gagnon espère régler la question l'hiver prochain en prenant un pied-à-terre avec son copain à Innsbruck. Un endroit où elle pourra se sentir chez elle et s'extirper de l'univers du ski. «C'est un investissement personnel, a-t-elle expliqué. Je mets de l'argent là-dedans, et ça pourrait payer pour le reste de ma carrière.»

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Un oeil sur Maze, l'autre sur Ligety et Hirscher

Depuis quelques années, Marie-Michèle Gagnon étudie les vidéos de Tina Maze. Les deux skieuses sont grandes, sont du même type morphologique et ont un style semblable.

Bien sûr, la Québécoise se réjouit des succès historiques de la Slovène, auteure d'un nombre record de points cet hiver en Coupe du monde. «Je pense qu'elle-même ne s'attendait pas à ça...»

Maze n'est pas son seul modèle.

«Je regarde maintenant les hommes, a indiqué Gagnon. Ted Ligety en géant et Marcel Hirscher en slalom. Je regarde leurs courses gagnantes de l'an dernier et je m'en inspire. Pas les courses vraiment dures, où ils envoient leurs skis de côté un peu, mais les courses où il y a un beau rythme, de la belle neige, comme à Beaver Creek ou Kranjska Gora. Ils sont tellement fluides, ça a l'air tellement facile. Ça donne de bonnes idées.»