Erik Guay n'est le plus le champion du monde. Il a joué son va-tout, samedi, mais ça n'a pas passé. Le skieur de Mont-Tremblant n'a pas fini la descente des Championnats du monde de Schladming.

Guay a cédé son titre au Norvégien Aksel Lund Svindal, qui a servi une véritable leçon de contrôle et de puissance pour décrocher sa deuxième médaille en Autriche, après le bronze au super-G.

« Je ne voulais pas finir quatrième ou cinquième, a commenté Guay. Je savais qu'aux championnats du monde, il y a juste un, deux et trois qui comptent. J'ai pris des chances, je pense que j'ai bien skié, j'étais dans le coup. »

Seizième à s'élancer, l'athlète de 31 ans a en effet connu une première moitié de course sublime, faisant tomber les trois premiers temps intermédiaires du leader provisoire, le Français David Poisson, futur médaillé de bronze. Un trou, dans une transition entre deux virages, a toutefois surpris le Québécois, dont la hanche droite a touché la neige. Il s'est relevé en une fraction de seconde et a repris le contrôle, mais ses espoirs de podium s'étaient envolés.

« Tout de suite, je savais que j'avais perdu une seconde comme ça, a-t-il raconté. Là, je n'avais plus la tête dans la course. Je suis descendu, mais j'étais moins motivé de prendre des chances et des risques. Ça ne voulait rien dire. Je savais que c'était déjà terminé pour moi. »

À l'avant-dernier virage avant le mur d'arrivée, Guay a été projeté vers l'avant, ce qui l'a sorti de sa trajectoire. Il a manqué une porte, s'est redressé, avant de se laisser glisser jusqu'à la ligne, saluant la foule de 24 000 spectateurs de la main gauche.

Après avoir enlevé ses skis, Guay est resté dans l'aire d'arrivée pour regarder l'oeuvre magistrale qu'était en train de réaliser Svindal. Puissant dans le haut du parcours, malin dans le bas, le Norvégien a traversé la ligne avec une avance de près d'une seconde sur Poisson. Il a levé les bras tel un seigneur, l'air de dire : « Et voilà ! »

Guay n'a pu faire autrement que de hocher la tête et d'applaudir le numéro de son ami et fréquent partenaire d'entraînement. « Je suis resté dans le fil parce que je voulais voir sa descente. Je pense que tu peux toujours apprendre, même dans les moments de déception. Il est resté calme, il a bien skié, techniquement et tactiquement. »

« Je suis content que ce soit Aksel, quand même, a enchaîné le champion déchu. C'est un gars qui travaille très, très fort, qui est motivé, qui adore le ski. C'est un peu pour ça que je m'entends bien avec lui. »

L'Italien Dominik Paris, fraîchement auréolé de sa victoire devant Guay à Kitzbühel, est celui qui s'est le plus approché de Svindal, terminant deuxième à 46 centièmes. L'Autrichien Klaus Kröll a terminé quatrième, à 38 centièmes du podium. Le skieur de Schladming est resté plié de longues secondes dans l'aire d'arrivée, essayant de digérer cette autre déception pour l'ex-Wunderteam, limitée à un seul podium depuis l'ouverture des Mondiaux.

Avec ce cinquième titre mondial, un premier en descente, Svindal confirme son statut de skieur des grandes occasions, perpétuant la tradition des ses compatriotes Kjetil Andre Aamodt et Lasse Kjuss.

« En aucune façon, ça a été facile », a rappelé le Norvégien de 30 ans, vainqueur l'an dernier sur le même parcours. « On est tous les meilleurs skieurs autour du portillon de départ. Mais certains jours, c'est une touche plus difficile. On s'entend tous pour dire que le parcours a été plus difficile que l'on croyait. Plus vite, plus bosselé, plus glacé. La visibilité était aussi vraiment mauvaise, ce qui a rendu les choses moins fluides que prévu. »

Serein dans les circonstances, Guay regrettait de ne pouvoir savoir où son ski l'aurait mené sans cette erreur de mi-parcours. Du portillon de départ au troisième passage intermédiaire, il a été le plus rapide des 58 partants, deux centièmes devant Svindal.

« Il y a juste ça qui me frustre un peu, a-t-il souligné. C'est une piste difficile, glacée, et j'étais quand même parmi les meilleurs. J'aurais bien aimé voir à quel point j'aurais pu le garder (cet écart). Mais c'est d'en haut jusqu'en bas que ça se passe...»

Sa déception est-elle plus grande que l'euphorie ressentie lors de sa victoire aux Mondiaux de Garmisch-Partenkirchen, deux ans plus tôt ? Guay a réfléchi quelques secondes avant de répondre. « Ouais... c'est sûr que c'était un peu inattendu il y a deux ans. C'était donc une euphorie incroyable sur le coup. Ce que je ressens, en ce moment, ce n'est pas la déception complète parce que je skiais bien. Si j'avais été sept dixièmes ou huit dixièmes derrière aux intermédiaires, j'aurais été plus découragé encore. Au moins, je skiais bien. J'avais un bon plan de match. On joue avec des centièmes. Ce sont des malchances qui arrivent des fois. »

Après une journée consacrée à ses commanditaires, dimanche, Guay rentrera au Québec le lendemain. Il s'accordera une semaine complète sans ski avant de reprendre le collier à la Coupe du monde de Garmisch, le 23 février.