Erik Guay n'a qu'une chose en tête quand les choses ne roulent pas à son goût: retourner sur ses skis le plus rapidement possible.

Voilà exactement ce qu'il prévoyait faire, à l'aube aujourd'hui, avec l'espoir de chasser les mauvaises vibrations ressenties lors du super-G d'hier. Vingt-troisième, à presque deux secondes et demie du gagnant, l'Américain Ted Ligety, il n'y avait pas pire façon de lancer ses Championnats du monde à Schladming, où il défendra son titre de la descente samedi.

Le mot «catastrophe» lui a été suggéré. Il ne s'est pas défilé. «Oui, c'est une catastrophe», a convenu Guay, qui se demandait s'il valait mieux en rire qu'en pleurer. «Je ne pensais jamais être 2,3 secondes derrière. C'est une dure journée, c'est sûr.»

Dans cette zone mixte un peu glauque, sous les gradins du stade de Planai, où les Autrichiens pleuraient la déconvenue des leurs (Hannes Reichelt, le meilleur, a échoué au pied du podium), Guay avait plus de questions à se poser que de réponses à offrir.

Comment, après une séquence si heureuse à Wengen et Kitzbühel, pouvait-il se retrouver dans une telle position? «Le ski, c'est comme ça. La confiance, ça vient vite, mais ça repart aussi rapidement. Pour l'instant, ce n'est vraiment pas là.»

Guay paraissait pourtant serein en début de semaine. Son seul souci: les quatre journées d'entraînement à Ultental, dans le Tyrol italien, ne s'étaient pas déroulées comme prévu. La neige, dure, compacte et balayée par les vents, ressemblait plus à ce qu'on retrouve en Amérique du Nord. Une neige «agressive», disent les skieurs. Le Québécois ne s'y est pas senti à l'aise: «J'essaie de rester positif, mais j'avais comme l'impression que ça allait moins bien.»

Mauvais présage confirmé dès qu'il a posé les planches sur les pistes de Planai, mardi. Avec les précipitations des derniers jours et le temps chaud et humide, l'ancien gagnant du globe du super-G retrouvait cette fois une surface molle et instable. «C'est vraiment une neige de printemps, un peu "pourrie". Ça ne se tient pas ensemble et j'ai de la misère. En fait, ça ressemble beaucoup à l'année passée, dans les finales.»

Guay y avait conclu sa saison avec deux mauvais résultats, 19e en super-G et 13e en descente. De là à maudire la station autrichienne... «C'est peut-être juste une piste qui me convient mal, qui ne me donne pas de confiance... je ne sais pas.»

À l'unanimité, les skieurs ont qualifié la piste et les conditions de «très difficiles». Au premier chef Ligety, le champion mondial du géant, qui a découpé le parcours dans un savant mélange de légèreté et d'agressivité, pour décrocher sa toute première victoire en super-G.

«Dans ces conditions, j'essaie de ne pas trop penser, de suranalyser. Ça m'aide beaucoup», a expliqué le technicien de Park City, dans l'Utah, qui a pris «beaucoup de risques» pour décrocher ce titre «inattendu».

Invité de dernière minute après la blessure d'un coéquipier, le Français Gauthier de Tessières, lui aussi un pur géantiste, s'est lancé sans arrière-pensées. Il a été récompensé par une belle médaille d'argent, un premier succès à l'âge de 31 ans. «C'est génial. Aujourd'hui, je me suis exprimé à 100%», a-t-il dit, les larmes aux yeux.

Malgré un dossard défavorable (22), le Norvégien Aksel Lund Svindal, grand favori, s'est joué des nombreux trous et ornières pour arracher le bronze, la 10e médaille de sa carrière en Championnats du monde. La façon dont il a récupéré une trajectoire trop large, à la toute dernière porte, tenait du numéro d'équilibriste.

Guay a suivi la descente de son ami norvégien, avec qui il s'est préparé en Italie, avec une certaine perplexité. «Ce n'était pas non plus une super belle manche, a-t-il relevé avec justesse. Il y a des fois où il lançait ses skis de côté, et on dirait qu'il amenait sa vitesse quand même. Moi, je les lançais de côté un peu, et j'ai l'impression que je perdais deux dixièmes à chaque virage.»

S'il prévoit avoir «moins de problèmes en descente», Guay ne se fait pas de cachettes: le super-G est généralement un bon baromètre. «Ça veut dire que ne suis pas vraiment dans le coup en descente. J'ai beaucoup de job à faire.»

«Pas d'excuses», a-t-il martelé, mais le moral est atteint. Il lui reste deux manches d'entraînement pour le retrouver, en même temps que les bons réglages. Un virage à la fois.