Ça riait et ça gueulait fort dans le cellulaire. Autour de la table, six bosseurs et leurs entraîneurs, bottes de ski encore aux pieds, revivaient un week-end faste à la Coupe de monde de ski acrobatique d'Are.

À peine terminée, l'épreuve en duel de samedi était rediffusée dans le chalet de la station suédoise. En vedette : Alexandre Bilodeau et ses potes du nouveau Québec Air Force. Pour une deuxième journée de suite, l'intouchable Bilodeau a tout raflé. Après avoir monopolisé le podium avec Pierre-Alexandre Rousseau et Vincent Marquis la veille, Bilodeau a pu célébrer son deuxième triomphe avec un nouveau comparse. Maxime Gingras, un ami d'enfance, a gagné le bronze. Un intrus, le Français Guilbaut Colas, a osé se joindre à la fête fleurdelisée en soutirant l'argent.

«Avant de monter sur le podium, Guilbaut m'a dit : je parle français moi aussi...» a raconté Bilodeau, hilare, au bout du fil.

Alors que les festivités préolympiques battent leur plein à Vancouver et Whistler, Bilodeau a consolidé sa place au sommet de la planète bosses en signant sa troisième victoire consécutive, sa toute première dans une épreuve en parallèle. «C'est spécial, a reconnu le skieur de 21 ans. Ça prouve que je peux rivaliser autant en simple qu'en duel. Tous les grands champions, comme Jean-Luc Brassard, ont gagné en simple et en duel. C'est différent, mais du ski de bosses, ça reste du ski de bosses.»

Comme la veille, Bilodeau a réussi la meilleure descente des qualifications. Il a ensuite tour à tour vaincu l'Américain Babic, le Kazakh Reiherd et l'Américain Kashima avant de se mesurer à Colas en finale. Privilégiant le contrôle et la technique à la vitesse débridée, le bosseur de Rosemère s'est imposé de justesse face à son rival français, tombeur de Gingras en demi-finale.

Bilodeau dispose maintenant d'une avance de 156 points sur Colas au classement de la spécialité. Une cinquième place dans l'une ou l'autre des deux dernières épreuves de la saison l'assurerait du premier globe de cristal de sa carrière.

Le nouvel homme à battre se sent-il invincible ? «Pas vraiment, a-t-il répondu. Il reste encore deux courses, sans compter les championnats du monde (ndlr : au Japon, début mars). J'apprends beaucoup, même quand ça va bien. C'est difficile d'atteindre le sommet, mais ce l'est encore plus d'y rester.»

Heureux de sa victoire, Bilodeau l'était encore plus de pouvoir la partager avec Gingras. Les deux skieurs ont fait leur classe ensemble à Chanteclerc, Saint-Sauveur et Mont Gabriel. «Il était là quand j'ai fait mon premier 360 et mon premier périlleux sur neige, et vice-versa», a souligné Bilodeau.

Le podium de Gingras, 24 ans, est le deuxième de sa carrière après sa troisième place à Apex, en Colombie-Britannique, il y a deux ans. Devinez qui était alors avec lui sur la deuxième marche ? Bilodeau, bien sûr.

«C'est tellement gratifiant de retoucher à ça, a déclaré Gingras, relégué à l'équipe de développement après un hiver difficile. C'est une sensation extraordinaire de le refaire avec Alex. C'est génial.»

Dixième des qualifications, Gingras s'est retrouvé face à Rousseau, un autre grand ami, en huitième de finale. «On a partagé la même chambre pendant deux ans en Coupe du monde, a raconté Gingras. C'est l'un des meilleurs duellistes que je connaisse, mais les trois fois que je me suis mesuré à lui, ça a tourné à mon avantage.»

Tout comme ses jeunes coéquipiers Philippe Marquis et Cédric Rochon, Gingras arborait un mohawk pour cette deuxième course en Suède. Les trois skieurs s'étaient mis d'accord de passer sous la tondeuse si d'aventure Bilodeau, Rousseau et Marquis rééditaient leur triplé du mont Gabriel. Gingras prétend maintenant que Bilodeau a fait la même promesse. «C'est une histoire à suivre...» a-t-il conclu.

Dufour-Lapointe 5e

Du côté féminin, la Montréalaise Chloé Dufour-Lapointe s'est classée cinquième après son élimination en quart de finale par sa compatriote Kristi Richards, quatrième. Elle égale ainsi son meilleur résultat en Coupe du monde. Comme la veille en simple, la skieuse de 17 ans a obtenu le troisième pointage en qualifications.

Pénalisée par un saut raté en haut de parcours, la championne olympique Jennifer Heil a dû se contenter du neuvième rang, ratant la ronde éliminatoire de justesse.