(Detroit) Sur les nombreux buts inscrits sur des déviations ou des mêlées devant le filet, le truc pour identifier le marqueur consiste à regarder qui est le premier joueur qui se dirige vers le banc pour recevoir les tope-là de ses coéquipiers.

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Sauf qu’en de rares exceptions, ce n’est pas l’auteur du but qui y va en premier. Comme lundi, quand Brendan Gallagher a ouvert la marque dès la cinquième minute. Plutôt que le numéro 11, c’est le numéro 48 qui a filé vers le banc, non sans que Gallagher le somme de le faire. Après tout, Lane Hutson venait d’obtenir, à seulement sa deuxième présence dans la Ligue nationale, son premier point.

« C’était beaucoup plus significatif pour lui que pour moi. Donc c’était à lui d’y aller, de profiter du moment », a raconté Gallagher.

Malgré la défaite de 5-4 du Canadien en prolongation contre les Red Wings de Detroit, il régnait un certain optimisme dans le vestiaire. Depuis le temps qu’ils en entendent parler, les joueurs ont enfin vu Hutson en chair et en os. On s’accroche à l’avenir quand le présent est sans espoir, comme c’est le cas dans cette troisième saison de suite qui se termine par moult matchs sans enjeu. Et Hutson incarne une partie de cet avenir.

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Hutson reçoit les félicitations de Joel Armia et Brendan Gallagher pour son premier point en carrière dans la LNH.

Son jeu sur le but de Gallagher, sa façon de danser sur la ligne bleue tout en se servant de ses épaules pour dérouter l’adversaire, était exactement le type de jeu que l’on a vu à répétition dans les faits saillants en provenance de Boston University.

Peu de joueurs peuvent faire ça. Comme attaquant, on aime le voir faire ça, car on sait qu’il va en ressortir du bien.

Brendan Gallagher

En fait, Hutson a livré ce qu’on attendait de lui. Ses flashs offensifs sautent aux yeux ; il a bien failli conclure son baptême dans la LNH en marquant le but gagnant, mais Alex Lyon a bloqué son tir. Ce fut son seul tir du match, en 21 min 54 s sur la surface.

Il a fini la rencontre à -1. Les deux buts marqués lorsqu’il était sur la patinoire : celui de la victoire en contre-attaque après son tir, à 3 contre 3, et un autre sur lequel il a été lent à réagir avant de venir aider son partenaire, David Savard, autour du filet. Si son flair offensif n’a jamais fait de doute, c’est en territoire défensif qu’il devra faire taire ses détracteurs. Ces discussions semblent suivre, à tort ou à raison, les défenseurs de ce style.

Défensivement, Hutson « était correct », a jugé Martin St-Louis, rappelant qu’il ne s’attendait pas à ce que le petit nouveau comprenne le système défensif du CH dès le premier soir. « Nous, ça fait 80 matchs qu’on en parle. Lui, il arrive là-dedans, ce ne sera pas parfait. Ses intentions étaient super. Je n’ai pas trouvé qu’on était vulnérables quand il était là. Il a joué un bon match. »

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Lane Hutson a joué un bon match selon Martin St-Louis, qui modérait ses attentes pour le premier match du joueur recrue.

Hutson a aussi montré une bonne compréhension de ce que ses coéquipiers lui transmettent. Pendant la première pause publicitaire, par exemple, il a fait partie d’un long caucus avec Savard et les membres du trio de Jake Evans, afin de planifier un jeu. Le plan a fonctionné quand Evans a remporté la mise au jeu, et Hutson a servi une passe précise à Evans, qui a complètement raté son tir sur réception.

« Je dois mieux exécuter. Il ne me connaît pas bien encore, il ne sait pas que je ne suis pas le tireur dans l’équipe !, a blagué Evans. On en riait. Mais il a fait un beau jeu. »

Les défaites

Cela dit, dans les apprentissages moins rigolos, Hutson a constaté qu’aucune avance n’est garantie avec ce Canadien de 2023-2024. L’équipe menait même 4-1 avec moins de cinq minutes à jouer en période médiane, mais les Wings, qui luttaient pour leur survie, ont grugé l’avance petit à petit. Pour lui qui arrive d’un club qui a gagné 71 % de ses matchs en deux ans, il y aura un ajustement.

Depuis le début de la saison, le Tricolore peine à gagner la moitié de ses matchs quand il mène après une période (15-5-8). Le constat est meilleur quand il mène après 40 minutes (21-0-4), mais il reste que des effondrements comme ceux de lundi peuvent torpiller de bonnes soirées de travail.

St-Louis n’allait toutefois pas vilipender ses hommes sur la place publique. Qu’auraient-ils pu faire pour éviter de redonner vie à un Little Caesars Arena plutôt feutré dans les 35 premières minutes ?

« Ç’aurait été le fun de peut-être avoir un avantage numérique, a-t-il suggéré. On n’a pas eu de calls ce soir. Tu mènes par trois, leur saison est en jeu, ils commencent à avoir une poussée, ils font des choses qui ne se feraient pas dans un match serré. Ça fait partie du processus. Dans le futur, on va être plus dans ces situations-là. »

PHOTO PAUL SANCYA, ASSOCIATED PRESS

Samuel Montembeault arrête le tir de Dylan Larkin.

Gallagher s’est montré plus critique. « C’était sûr qu’ils allaient être affamés. Ce n’est pas nécessairement de jouer avec le même désespoir qu’eux, car on veut respecter notre style et on le faisait bien en début de match. C’est de comprendre comment protéger l’avance. Il faut gérer le risque, mais il faut quand même appliquer de la pression. Ils entraient trop facilement dans notre zone et c’est là qu’ils sont dangereux. »

« Il faut corriger les erreurs, a poursuivi le vétéran. On fait de bonnes choses, mais ça serait bien d’avoir des récompenses. »

Hutson vient de passer deux ans à obtenir ces récompenses la plupart du temps, que ce soit à Boston University ou au Championnat du monde junior. Reste à voir si le plan de relance du Tricolore fonctionnera assez vite pour qu’il recommence rapidement à les obtenir dans la LNH.

En hausse : Jake Evans

Trois aides dans la défaite, pour porter son total de points cette saison à 28. Il ne lui en manque qu’un pour égaler son sommet personnel, établi en 2021-2022.

En baisse : Michael Pezzetta

Il a écopé de la seule pénalité du match, et mis à part un hors-jeu mal avisé, on l’a très peu vu franchir la ligne bleue offensive.

Le chiffre du match : 0

Aucune pénalité n’a été décernée aux Red Wings. C’est la troisième fois dans les quatre derniers matchs que le Tricolore n’obtient pas d’avantage numérique dans un match.

Dans le détail

Gallagher finit en force

Les joueurs exclus des séries parlent souvent de l’importance de finir le calendrier en beauté, individuellement ou collectivement, afin de se donner la chance de rebondir la saison suivante. S’il s’agit bel et bien d’une vérité et non pas de pensée magique, Brendan Gallagher a de quoi être optimiste pour 2024-2025. Avec ses deux buts lundi, il totalise huit points (quatre buts, quatre aides) à ses sept derniers matchs. Le voici avec 15 buts, soit autant que lors des deux dernières saisons réunies. « Honnêtement, j’ai généralement senti que je jouais bien, cette saison. J’ai eu un passage en milieu de saison où c’était moins le cas, où je m’éloignais de mon identité, mais je n’ai jamais perdu confiance en mes moyens. Il y a toujours des solutions. J’ai du plaisir avec [Alex] Newhook et [Joel] Armia. Ils m’aident beaucoup et j’essaie de les complémenter. »

Kane l’a encore

S’il y avait un prix pour le retour de l’année, il faudrait le donner à Patrick Kane. Le vétéran et triple gagnant de la Coupe Stanley a prouvé qu’une fois ses problèmes de hanche réglés, il pouvait encore être un des dangereux attaquants de la LNH. Sa passe sur le deuxième but de J.T. Compher était son 47point en 49 matchs cette saison. Kane ressemblait aussi au dynamique attaquant d’il y a 10 ans en troisième période, quand il s’est mis à tourbillonner comme une voiture NASCAR en zone offensive. Son premier tir a touché le poteau ; son deuxième a été bloqué par Samuel Montembeault. Avant le match, Martin St-Louis a levé son chapeau à son ancien rival dans la LNH et aux Jeux olympiques. « Des gars comme ça, une fois qu’ils sont en santé, c’est comme s’ils n’avaient pas manqué de temps. Ce sont des joueurs si bons, si intelligents, ils comprennent comment utiliser leurs coéquipiers. Je ne suis pas surpris », a déballé l’entraîneur-chef du Canadien.

Un défenseur qui a du chien

Moritz Seider ne fait pas encore parler de lui comme d’autres de ses pairs dans la LNH, mais si les Red Wings se faufilent en séries, le jeune Allemand profitera d’une jolie tribune. C’est qu’il n’est pas qu’offensif, malgré ses 41 points. Il a aussi un côté méchant qui peut faire damner un adversaire pendant une série de sept matchs. Cole Caufield en sait quelque chose, lui qui s’est fait bardasser par Seider après l’avoir battu pour une rondelle dans le coin. Seider a d’ailleurs terminé la rencontre avec six mises en échec, pour un total de 207 cette saison. Parlant de méchant, Ben Chiarot ne s’est pas gêné non plus, même s’il affrontait ses anciens amis. Caufield a notamment goûté à sa médecine, et Juraj Slafkovsky, qui n’a toutefois jamais joué avec Chiarot, s’est querellé quelques fois avec le colosse gâté par la nature.

Guillaume Lefrançois, La Presse