(Denver) Les records des années 80 sont difficiles à faire tomber dans la LNH.

En cet âge d’or offensif, face à des attaquants tout puissants, les gardiens de but et les défenseurs faisaient, au mieux, leur possible. Encore aujourd’hui, les 10 plus importantes récoltes de points par un joueur en une saison datent de cette décennie.

Il n’est donc pas surprenant que l’on s’enthousiasme à ce point quand un joueur actuel s’approche d’un record établi à une époque où louanger Michael Jackson n’était pas controversé.

C’est un sujet qui anime les discussions au Colorado, ces jours-ci. La saison que connaît Nathan MacKinnon n’est pas que bonne : elle est exceptionnelle. Déjà 122 points, dont 44 buts, en 71 matchs avant d’affronter le Canadien. On a fait grand cas de sa séquence active de 34 matchs consécutifs avec un point à domicile, qui pourrait battre les 40 de Wayne Gretzky en 1988-1989. Sans rien enlever à cette perspective, c’est toutefois la menace d’un record de franchise qui fait vibrer une corde sensible chez les partisans ici.

Depuis 1981-1982, Peter Stastny détient la marque d’équipe pour le plus de points en une saison, avec 139. Le Slovaque occupe en réalité les deux premiers rangs de l’histoire des Nordiques de Québec et de l’Avalanche du Colorado, mais on peut facilement imaginer que ses 124 points de 1982-1983 seront facilement égalés et dépassés par MacKinnon – peut-être même dès mardi soir contre le Canadien.

Personne ne s’est jamais réellement approché de cet exploit. Le compteur s’est arrêté à 124 pour Michel Goulet en 1983-1984, et à 120 pour Joe Sakic en 1995-1996. Or, MacKinnon dispose encore de 11 matchs pour rejoindre Stastny tout en haut du palmarès. Le défi n’est pas simple. Mais s’il maintient le rythme de ses 71 premières rencontres, il pourrait y arriver.

PHOTO DENIS COURVILLE, ARCHIVES LA PRESSE

Peter Stastny en 1983

« Chaque semaine, il y a une nouvelle statistique qui le place nez à nez avec des membres du Temple de la renommée, a reconnu Jared Bednar, entraîneur-chef de l’Avalanche. Ça confirme son calibre. Il est au niveau de ces gars-là. »

Qualifiant de « superbe » les réalisations de son coéquipier, Jonathan Drouin n’en revient pas, « de nos jours », qu’un joueur réussisse à « faire des points comme ça ». Aux journalistes québécois réunis autour de lui, mardi matin, il a lancé la statistique des 139 points de Stastny avant même que le chiffre soit évoqué. Il s’impressionne aussi de voir MacKinnon jouer dans la cour de Wayne Gretzky ou de Guy Lafleur, dont il vient de dépasser les 32 matchs de suite avec un point à domicile. « C’est vraiment super pour lui », a poursuivi Drouin, qui vante la « puissance » de son vieux complice en possession de la rondelle. « Je n’aimerais pas ça être un défenseur contre lui », a-t-il lancé en souriant.

Respect

Peu loquace au sujet de ses accomplissements personnels, MacKinnon a néanmoins exprimé son grand respect pour Peter Stastny, qu’il n’a toutefois pas vu jouer puisqu’il est né quelques mois après la retraite de la légende des Nordiques.

« Je sais évidemment à quel point il était bon. Il demeure un des meilleurs joueurs de l’histoire, c’est certain », s’est contenté de dire l’attaquant.

L’important, pour lui, demeure d’être « le meilleur joueur possible pour cette équipe », qui possède, à ses yeux, tout ce qu’il faut pour gagner la Coupe Stanley.

Le défenseur Samuel Girard confirme que ce discours de MacKinnon n’est pas destiné qu’aux caméras.

« Il travaille fort chaque jour, a-t-il dit. Après les entraînements, c’est le gars qui tire des rondelles, qui effectue encore des exercices. Il veut juste être le meilleur, de jour en jour. C’est le fun d’avoir un coéquipier comme ça. Tous les autres joueurs le suivent. »

Jared Bednar a abondé dans le même sens.

« Chaque saison, il amasse plus de points, et c’est ce que les gens regardent, mais il y a bien plus que ça dans son jeu. Il joue bien sur 200 pieds, il s’implique en défense… », a énuméré l’entraîneur. Bednar a aussi fait remarquer qu’il avait connu ses deux meilleures saisons en carrière après avoir mené l’Avalanche à la Coupe Stanley, et non l’inverse. La preuve n’est plus à faire, en somme, qu’il place l’équipe avant ses intérêts personnels.

Personne ne boudera toutefois son plaisir de voir Nathan MacKinnon faire tomber des records. Surtout si ses performances font gagner son club.