Saut dans le temps, le 6 janvier dernier. Au total, 13 316 personnes sont présentes au Xcel Energy Center du Minnesota pour le match d’ouverture de l’équipe locale, contre Montréal.

Il s’agit à ce moment d’un nouveau record nord-américain pour un match professionnel de hockey féminin en saison. Sur place, Danièle Sauvageau s’adresse, à la blague, à son homologue Natalie Darwitz : « Je ne sais pas quand, mais on va battre ça. »

Des dirigeants de la Ligue sont aussi sur place au Minnesota, ce soir-là. En entendant Sauvageau, quelqu’un s’exclame : « Est-elle sérieuse ? »

« Dès mon retour à Montréal, j’ai envoyé un texto à un haut placé du Canadien de Montréal et [la personne] a dit : “Regardons ça” », nous raconte Sauvageau, mercredi matin, entre les murs de l’Auditorium de Verdun.

Un peu plus de deux mois plus tard, la femme de 61 ans prouve qu’elle était bel et bien sérieuse. L’équipe dont elle est la directrice générale jouera au Centre Bell le 20 avril, a-t-on appris mardi.

Au lendemain de l’annonce officielle, c’était encore le sujet principal après l’entraînement de mercredi.

Pour moi, ce qui est important dans toute cette histoire, c’est que ça vient des partisans. Il n’y a pas une semaine, depuis le début de l’année, où les gens ne nous disent pas : “Pourquoi on ne va pas au Centre Bell ?”

Danièle Sauvageau

La rumeur d’un match prochain au domicile du Tricolore circulait depuis un moment, mais ce genre de décision ne se prend pas en claquant des doigts. Nombre de choses entraient en ligne de compte, explique Danièle Sauvageau.

« Ça a pris du temps parce qu’il y a des gens qui ont été engagés pour faire des matchs, que ce soit ici ou à la Place Bell, que ce soit en animation, etc. […] Quel genre d’entente peut-on faire avec ces gens-là ? »

Puis il y avait la question de la date. Le mois de février a été étudié, puis celui de mars. Finalement, la décision a été prise d’attendre la fin de la saison du Canadien, le 16 avril.

« Oui, c’est le plus grand amphithéâtre, mais c’est aussi le plus occupé en Amérique du Nord. On pense que le Centre Bell est libre, mais ce n’est pas toujours le cas. Il y a peut-être quelque chose avant ou après.

« [Il faut aussi penser à] notre [calendrier] à nous. La dernière semaine a été très [exigeante] ; on a joué quatre matchs dans quatre villes en l’espace de huit jours, avec du voyagement, peu de pratiques. Il fallait regarder tout ça, voir quel était le meilleur moment. Finalement, le temps a joué en notre faveur. »

L’horaire prévoit d’ailleurs un match la veille de celui au Centre Bell. C’est donc dire que l’équipe disputerait deux rencontres en 16 heures. « On travaille pour le faire bouger, parce que c’est beaucoup », note la DG.

Collaboration tricolore

Au sujet de la collaboration du Canadien dans le processus, Danièle Sauvageau n’a que de bons mots.

« Si vous pouvez prendre le téléphone et envoyer un texto à une personne qui est très, très, très, très haut placée et qu’ils disent : “On va regarder ça”, je pense que la collaboration est fluide. Et depuis le début. »

Pour illustrer ses propos, Sauvageau nous parle d’un chandail qui apparaît dans une vitrine à l’Auditorium de Verdun. « C’est le chandail que Geoff Molson portait lors des Jeux de 2002, qu’il a donné à ma mère après la médaille d’or. Il était à notre match en 2002, il a grandi avec des femmes autour de lui. Cette collaboration-là a toujours été fluide. On est à un téléphone de France Margaret [Bélanger]. »

Tous les gens du Canadien sont des amateurs de hockey. Le hockey se joue au masculin et au féminin. La collaboration, ça ne date pas d’une semaine ou du texto en janvier. Ça date de plusieurs années.

Danièle Sauvageau

Des billets, s’il vous plaît

Jeune, Ann-Renée Desbiens n’était pas partisane du Canadien, mais de l’Avalanche du Colorado. Elle ne s’en réjouit pas moins de fouler la patinoire du Bleu-Blanc-Rouge prochainement.

PHOTO OLIVIER JEAN, ARCHIVES LA PRESSE

La gardienne Ann-Renée Desbiens

« Tu vas voir une game du Canadien une ou deux fois par année avec des amis, c’est une belle soirée, dit la native de Charlevoix. Le fait que les gens vont venir nous voir nous, que c’est nous qui allons faire leur soirée, leur week-end, c’est vraiment le fun. C’est un aréna mythique. Il y a une belle histoire, beaucoup de champions, de bons joueurs de hockey. Ça va être plaisant de pouvoir y laisser notre trace, nous aussi. »

La gardienne se dit assurée que l’équipe n’aura « pas de misère » avoir quelque 21 000 sièges occupés. Elle-même a d’ailleurs déjà reçu quelques demandes…

« Mettons que mon téléphone a commencé à sonner assez rapidement, les gens voulaient des billets. J’étais comme : il y en a 20 000 de disponibles, essayez de vous en trouver vous-mêmes ! », s’exclame-t-elle en souriant.

Je pense que tout le monde a hâte d’être là, de venir nous soutenir. D’avoir cette plateforme-là, ça va faire du bien.

Ann-Renée Desbiens

Catherine Dubois parle quant à elle d’un « rêve d’enfance », même si elle est originaire de Québec et que ses parents prenaient pour les Nordiques dans sa jeunesse. Après tout, elle habite à Montréal depuis dix ans maintenant.

« C’est juste spécial. Tu vas voir le Canadien, c’est une marée de gens. Là, être sur la patinoire et voir ça, ça va juste être incroyable. »

Et puis, on le sait, si le Centre Bell est rempli ce fameux après-midi du 20 avril, c’est un nouveau record nord-américain pour un match de hockey professionnel féminin en saison qui sera établi. Actuellement, et depuis le 16 février, ledit record appartient à l’équipe torontoise, qui a accueilli 19 285 personnes au Scotiabank Arena.

« Je veux le record à Montréal, pas à Toronto ! lance Desbiens. Chaque fois que Montréal peut battre Toronto, dans n’importe quel domaine de la vie, j’en suis plutôt heureuse. »

Marie-Philip Poulin toujours absente

PHOTO CHRIS YOUNG, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Marie-Philip Poulin

Marie-Philip Poulin était toujours absente, mercredi matin, à deux jours du départ pour Pittsburgh pour le match de dimanche au domicile des Penguins, le PPG Paints Arena. La capitaine a raté le dernier match de son équipe par mesure préventive en raison d’une blessure au bas du corps. Elle est évaluée « au jour le jour », indique Danièle Sauvageau. « Depuis le début de l’année, vous m’avez entendue dire qu’on fait attention à nos joueuses. C’est [exigeant]. C’est une joueuse qui a joué plusieurs autres matchs que les nôtres dans l’année. Elle a fait le match des Étoiles, la série de la rivalité. Il y a un Championnat du monde aussi. […] Je pense qu’il faut faire attention à nos joueuses. S’il faut les retirer d’un match pour s’assurer que le reste de l’année va être correct, je n’hésiterai jamais à faire ça. Pour Marie-Philip Poulin ou pour une autre joueuse. »