À un moment donné, lors de la troisième période, Jake Allen a effectué un arrêt de routine, et certains partisans ont applaudi, bien sûr de manière sarcastique.

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Ça résume assez bien ce dimanche après-midi au Centre Bell, qui aurait dû être plus festif avec familles et enfants dans les gradins, mais non. Marque finale : Blues de St. Louis 7, Canadien 2.

On aura compris que Jake Allen en avait une mauvaise dans le système, et ça explique la marque finale, comme les applaudissements dérisoires.

« Je déteste ça, honnêtement, a répondu Mike Matheson au sujet de cette réaction. Je comprends que les partisans ont le droit de faire ce qu’ils veulent, et ils sont passionnés, c’est en partie pourquoi on les adore. Mais de penser que c’est de la faute à Jake, je trouve que c’est injuste. »

C’est sans doute injuste, en effet, mais ça fait partie des problèmes qui peuvent survenir dans un système à trois gardiens. Avant de sauter sur la glace en ce dimanche de Super Bowl, Jake Allen n’avait pas joué depuis le 27 janvier, et dans un tel contexte, doit-on se surprendre si le principal intéressé a eu l’air de ce qu’il a eu l’air, c’est-à-dire un gardien rouillé, qui avait du mal à suivre la rondelle et à maîtriser ses retours ?

Jake Allen doit au moins donner à son club une chance de victoire. Il ne l’a pas fait.

« C’était pas sa journée, a admis l’entraîneur-chef Martin St-Louis. Mais Jake est un vétéran. C’est quelque chose qui va arriver à tous les gardiens… Le soleil va se lever demain, il faudra retourner au travail, et je sais que c’est ce que Jake va faire. »

Si ce n’était pas clair avant ça, ça ne saurait être plus clair maintenant : ce ménage à trois devant le filet doit cesser. Parce que ce n’est bon pour personne, et en plus, ça mène à des moments comme ça, où personne ne paraît bien. Ni le gardien ni les entraîneurs, et encore moins la direction, qui a imposé cette décision.

PHOTO ERIC BOLTE, USA TODAY SPORTS VIA REUTERS CON

Jake Allen (34) et Brayden Schenn (10)

Pendant que Samuel Montembeault s’impose comme le gardien numéro un, les deux autres en sont réduits à devoir se partager le travail d’un réserviste. Cayden Primeau n’a pas joué depuis le 20 janvier, et encore, cette date est un soir où il est arrivé devant le filet en relève.

Allen, lui, peine à trouver ses repères, et ce n’est pas avec de telles performances qu’une autre équipe va sentir le besoin d’appeler à Brossard pour poser des questions à son sujet.

« C’est un jeu d’équipe et on a notre part de responsabilités là-dedans, a tenu à dire le défenseur David Savard. On ne blâme pas Jake. À plusieurs reprises, on était devant lui, on lui bloquait la vue. Il faut faire un meilleur travail devant lui pour l’aider. On sait qu’il est capable de faire des gros arrêts pour nous. »

En attendant, ce ménage à trois va continuer, parce que la direction en a décidé ainsi. Dans le contexte d’une saison déjà perdue, ce n’est sans doute pas un drame, mais c’est de toute évidence une formule qui ne fonctionne pas.

Avec tout ça, et avec de telles performances, le scénario d’une possible transaction pour Jake Allen avant la date limite du 8 mars nous paraît de plus en plus improbable.

Dans le détail

Hécatombe en défense, longue absence pour Harvey-Pinard

Comme un malheur n’arrive jamais seul, deux défenseurs du Tricolore sont tombés au combat, dimanche. Le match n’était vieux que de cinq minutes lorsque Jordan Harris a été victime d’une mise en échec à la tête assénée par Samuel Blais.

PHOTO GRAHAM HUGHES, LA PRESSE CANADIENNE

Jordan Harris a quitté le match après avoir été frappé par Samuel Blais.

Harris a paru sonné, voire désorienté, après l’impact, et il a eu besoin de l’aide de deux coéquipiers pour sortir de la glace. L’équipe a indiqué après le match qu’il s’était blessé au « haut du corps », un code pas très secret pour désigner une probable commotion cérébrale. En toute fin de rencontre, Kaiden Guhle a quant à lui semblé se blesser à l’épaule gauche en encaissant une mise en échec (légale) de Marco Scandella. Aucun détail n’a été fourni à son sujet.

PHOTO ERIC BOLTE, USA TODAY SPORTS

Kaiden Guhle

Autrement, le Canadien a révélé que Rafaël Harvey-Pinard raterait de quatre à six semaines en raison d’une blessure au « bas du corps » subie samedi contre les Stars de Dallas. Cet échéancier pointerait, grosso modo, vers un retour entre le 10 et le 24 mars, auquel cas il pourrait disputer les 13 à 18 derniers matchs du calendrier.

Struble peine, Roy brille

Encensé pour sa fiabilité depuis son arrivée dans l’entourage du club en novembre, Jayden Struble a connu une difficile journée au bureau. Dès sa première présence, il a été débordé sur sa gauche par Alexey Toropchenko, qui a marqué. En fin de première période, le même Struble a été puni pour avoir retenu le même Toropchenko, et les Blues ont rapidement déjoué Jake Allen en avantage numérique. Le défenseur a avoué que ce match était le plus frustrant de sa jeune carrière dans la LNH. Il a affirmé, comme de coutume, qu’il souhaitait rapidement oublier cette performance et aller de l’avant. À l’opposé, une autre recrue, Joshua Roy, a livré une performance très positive, voire inspirée. Rappelé en catastrophe samedi, le Québécois a été inséré à la gauche d’Alex Newhook et de Joel Armia, sur un trio qui a été menaçant pendant toute la rencontre. Roy s’est notamment signalé en volant deux rondelles profondément en zone adverse. « J’essaie d’amener ça à ma game, d’être impliqué, a-t-il dit à ce sujet. Sur le plan des habiletés, je sais que je suis capable, mais je pense pouvoir apporter autre chose offensivement. »

L’apprentissage du jour

Les milliers d’enfants réunis au Centre Bell ne pensaient sans doute pas en apprendre autant sur le hockey en ce dimanche après-midi. Nous non plus, en fait. Le premier but du Tricolore, toutefois, nous a permis de mettre à jour nos connaissances sur les punitions majeures. Après que Samuel Blais eut été chassé de la rencontre en raison d’une mise en échec dangereuse sur Jordan Harris, le Tricolore a profité d’un long avantage numérique de cinq minutes. Or, lorsque Nick Suzuki a inscrit son équipe au pointage, la punition était terminée depuis cinq secondes, mais il n’y avait toujours que quatre patineurs en blanc sur la glace. Pourtant, personne ne dormait au gaz. En vertu de l’article 20,3 du livre de règlements de la LNH, pendant une punition majeure assortie d’une expulsion, l’équipe fautive n’est pas tenue d’envoyer immédiatement un joueur de remplacement au cachot : elle peut attendre un arrêt de jeu vers la fin de la punition. Le problème, c’est que le sifflet espéré n’est jamais venu pour les Blues. Ceux-ci ont donc dû se défendre avec un homme en moins plus longtemps que prévu, et le Canadien en a profité. Même si les locaux évoluaient encore à cinq contre quatre, on a écrit sur la feuille de match que le but a été inscrit à cinq contre cinq. C’est bien pour dire.

En hausse

Joshua Roy

Un bon match dans l’ensemble pour l’attaquant fraîchement rappelé après le match de samedi.

En baisse

Jake Allen

Il a accordé deux buts sur les trois premiers tirs en sa direction, et tout a déboulé par la suite.

Le chiffre

3

Le nombre de joueurs perdus par le Canadien en fin de semaine pour cause de blessures.

Avec Simon-Olivier Lorange, La Presse