Certains pourraient croire à tort que reconstruire signifie uniquement couler au classement afin de recueillir les meilleurs choix au repêchage pendant quelques années.

Il s’agit d’un élément parmi d’autres, mais la croissance, individuelle et collective, des jeunes en place constitue aussi un élément essentiel à une reconstruction réussie.

Le Canadien atteindra le quart de saison en Californie ce week-end. La vilaine séquence actuelle, seulement deux victoires, en prolongation, en dix matchs, le place à trois points derrière le rendement de l’an dernier après 18 rencontres, nous rappelait le collègue Simon-Olivier Lorange mardi.

Le Canadien avait une équipe très jeune l’an dernier et elle l’est davantage avec les départs de Mike Hoffman, Jonathan Drouin et Joel Edmundson, mais pour l’heure, il n’a pas encore établi la preuve qu’il était supérieur à l’an dernier. Peut-être ce long voyage dans l’Ouest américain permettra-t-il aux jeunes joueurs du CH de prendre leur envol.

La donne est évidemment faussée par la perte malencontreuse de Kirby Dach dès la deuxième rencontre de la saison. Dach avait montré la progression la plus marquée l’an dernier, à 21 ans, avec 38 points en 58 matchs et du jeu efficace en défense du haut de ses 6 pieds 4 pouces et 217 livres. Il atténuait la pression sur les épaules du premier centre Nick Suzuki.

Celui-ci nous donne à 24 ans le rendement attendu : 16 points en 18 rencontres, en route vers une saison de 72 points, un rendement défensif généralement adéquat, sans être un candidat au trophée Selke, en bref, une valeur sûre sans être un MacKinnon ou un Matthews.

Malgré ses 15 points en 18 matchs, Cole Caufield doit en donner plus. Il a marqué seulement cinq buts, mais seulement un à cinq contre cinq. Il avait pourtant fait la preuve l’an dernier qu’il n’était pas seulement un spécialiste offensif avec 19 de ses 26 buts en pareilles circonstances. Voyons combien de temps on le gardera séparé de son compagnon Suzuki.

Alex Newhook constitue une acquisition intéressante. Il semble se révéler davantage à l’aile. Il amène de la vitesse à un trio. Sans être transcendant, il peut améliorer un trio offensif. Il a seulement 22 ans et produit à un rythme de 55 points en une saison complète. Il est rare de repêcher un joueur de cette valeur avec un 31e ou un 37e choix au total.

La perte de Dach fait également mal au chapitre de la croissance individuelle de certains jeunes. Christian Dvorak se retrouve par défaut sur un deuxième trio. Les qualités offensives ne sont évidemment pas les mêmes. Difficile de demander à Juraj Slafkovsky et Caufield de produire avec un centre au potentiel offensif limité. Slafkovsky, 19 ans, fait néanmoins des pas dans la bonne direction, assez pour qu’on ne suggère plus de le renvoyer dans les mineures.

Ne rêvez pas à un Jaromir Jagr. Mais s’il parvient à marquer 30 buts par saison tout en gagnant ses guerres de tranchées avec son physique imposant de 6 pieds 4 pouces et 230 livres, Montréal aura gagné son pari.

Le défenseur Kaiden Guhle constitue probablement le jeune joueur dont la progression est la plus spectaculaire, même s’il était déjà très bon l’an dernier. Guhle, 21 ans seulement, a joué 24 minutes à Boston. Il constitue de loin l’arrière le plus fiable défensivement et il a amassé six points en quatorze matchs sans pour autant participer aux supériorités numériques.

Obtenu pour Artturi Lehkonen avant la date limite des transactions en mars 2021, Justin Barron, un droitier, une denrée rare à Montréal, est en train de s’établir comme un quatrième défenseur relativement fiable et doté d’un certain potentiel offensif, après un camp d’entraînement en demi-teinte. Jordan Harris et Arber Xhekaj montrent leurs limites depuis le début de saison, quoique la robustesse de Xhekaj et sa capacité à jouer les pacificateurs lui donnent un relief intéressant.

Sinon Samuel Montembeault, encore considéré comme un jeune gardien à 27 ans, s’améliore lui aussi. Ses statistiques sont supérieures à celles de l’an dernier. Il montre de la constance et prend les moyens pour obtenir un contrat de quelques saisons.

Comme on peut le constater, il y a encore des carences dans la formation à cette étape-ci de la reconstruction. Il manque encore des joueurs d’impact pour permettre au CH d’aspirer à une Coupe Stanley. Dach deviendra-t-il ce centre dominant à son retour au jeu l’an prochain ?

Si Caufield ne se remet pas à être menaçant à cinq contre cinq, il faudra espérer l’arrivée d’un autre ailier d’impact, soit par le repêchage ou sur le marché des joueurs autonomes dans deux ou trois ans.

Malgré sa production de 18 points en 15 matchs à sa première saison professionnelle dans la Ligue américaine, à 20 ans, Joshua Roy doit prouver qu’il peut être aussi productif dans la LNH. Trop tôt pour se prononcer, trop tôt pour l’écarter. Filip Mesar a amassé 22 points en 11 matchs depuis son renvoi dans la Ligue junior majeure de l’Ontario. Il demeure un attaquant de petite taille au sein d’une équipe qui en compte plusieurs, voyons la suite.

En défense, David Reinbacher est pressenti comme un défenseur de première paire, sans pour autant devenir une grande vedette. Mais il pourrait constituer un solide duo avec Guhle dans deux ou trois ans. Et il ne faut pas écarter trop rapidement le défenseur gaucher Adam Engström, 20 ans, supérieur encore à la saison précédente à Rögle.

Lane Hutson, 19 ans, produit à un rythme hallucinant dans la NCAA. Il a 14 points, dont 8 buts en 11 matchs, après une saison de 48 points en 39 rencontres à son année recrue, un rendement supérieur aux rendements de Quinn Hughes, Cale Makar et Adam Fox au même âge. Mais ceux-ci ont réussi à s’imposer dans la LNH malgré leur petite taille parce qu’ils ont su être efficaces aussi à égalité numérique. Hutson n’a pas la vitesse des trois autres. Mais son QI hockey demeure formidable. On ne sait jamais comment un défenseur de petite taille s’adaptera à la Ligue nationale de hockey avant de le voir dans la Ligue nationale de hockey. On souhaite pour le CH que la transition soit réussie.

Plus on y pense, plus le repêchage de 2024, avec un choix dans le top 5 de plus en plus probable, pourrait devenir crucial. Il manque encore des pièces importantes.

Jake Allen à la rescousse à Edmonton ?

PHOTO WINSLOW TOWNSON, USA TODAY SPORTS VIA REUTERS CON

Jake Allen

Jake Allen figure au troisième rang sur la liste des gardiens susceptibles d’intéresser les Oilers d’Edmonton, selon le collègue Frank Seravalli. La photo du gardien du Canadien orne même son texte. Même s’il souligne avec justesse la fragilité d’Allen au chapitre de la santé, il semble surévaluer la valeur de celui-ci en affirmant que le prix pour l’obtenir pourrait être élevé.

On voit mal les Oilers, déjà coincés par le plafond salarial, faire l’acquisition d’un gardien de 33 ans souvent blessé, au moins correct à Montréal (il a affiché une moyenne supérieure à 3,30 et un taux d’arrêts inférieur à .906 lors des trois dernières saisons) avec un salaire annuel de 3,8 millions pour cette année et la suivante. Le CH pourrait absorber une portion de son salaire, mais est-il intéressé à le faire compte tenu du faible retour à prévoir pour ses services ? Sans oublier que même à 1,9 million, Edmonton aurait encore de la gymnastique à faire au plan salarial ?

Rien n’est impossible dans le hockey. Ken Holland et ses conseillers vouent peut-être une admiration énorme pour Allen. Si la ligne mord, aussi bien sortir le poisson de l’eau au plus vite !