(Boston) Jouer pendant 20 ans dans l’un des marchés les plus passionnés de la LNH vient forcément avec son lot d’attention. Devenir le capitaine d’une des franchises les plus emblématiques du sport professionnel impose le même fardeau.

Patrice Bergeron n’a jamais renié la tâche qui lui incombait comme athlète professionnel et comme personnalité publique. Il n’en demeure pas moins qu’il a toujours préféré que les projecteurs soient braqués d’abord sur ses coéquipiers.

Ç’aura été vrai chaque jour de sa longue et fructueuse carrière. Sur la glace et à l’extérieur de celle-ci, il s’est donné corps et âme pour son équipe. Il n’était donc pas étonnant, alors qu’il tirait sa révérence, de l’entendre s’exprimer sur la manière qu’il a choisie pour annoncer sa retraite. « Je ne voulais pas de flafla. Je ne voulais pas que ce soit trop par rapport à moi. »

Lisez « Patrice Bergeron a longtemps mûri sa décision »

C’est ce qui l’a incité, il y a quelques semaines, à s’asseoir devant son ordinateur pour amorcer la rédaction d’une lettre. Une lettre de remerciements, destinée à rendre hommage à celles et ceux qui lui ont permis de vivre le rêve qu’il caressait depuis sa tendre enfance – sa conjointe, ses enfants, son frère et ses parents, ses amis, ses agents, l’organisation des Bruins…

Lisez la lettre de Patrice Bergeron (en anglais et en français)

« J’essayais de trouver la meilleure façon de le dire du mieux que je pouvais », a expliqué Bergeron, mercredi matin, lors d’un point de presse au TD Garden de Boston.

L’écriture, avouera-t-il un peu plus tard lors d’une conversation à bâtons rompus, n’a jamais été une force, encore moins une passion. Il est tout sauf dans ses habitudes de jeter ses idées sur papier, lui qui est pourtant l’un des hockeyeurs les plus éloquents et charismatiques de la LNH.

Pourtant, c’est ce médium qui s’est imposé à lui à ce moment névralgique de sa vie. « Je savais que d’écrire mes pensées et mes états d’âme, c’était probablement la meilleure façon pour moi d’exprimer ce que je ressentais, ce que je voulais dire aux gens qui m’ont tant aidé, qui ont eu une influence immense sur ma carrière, a-t-il poursuivi. C’était la meilleure solution. »

Je voulais donner à ces gens-là une grande place, leur dire merci.

Patrice Bergeron

Il n’a rien pris à la légère. Un ami de Boston lui a donné un coup de main dans la rédaction de la version anglaise, tandis qu’un autre ami, celui-là de Québec, l’a aidé avec la version française. Il était impératif pour lui de s’adresser dans leur langue aux partisans de la province. Ceci explique probablement qu’un ancien fan des Nordiques qui a disputé presque 1500 matchs dans l’uniforme des Bruins suscite autant de respect auprès des inconditionnels du Canadien…

« Ç’a pris beaucoup de temps et beaucoup d’aide », avoue-t-il, notamment sur le plan de la grammaire et de la structure du texte. « Il n’y a pas 50 synonymes pour exprimer sa gratitude », ajoutera-t-il plus tard en riant.

Il n’empêche que « la majorité de la lettre » venait de lui. Il l’a remise aux Bruins il y a quelques jours, et ceux-ci l’ont diffusée.

Un relationniste de l’équipe a souligné n’avoir été nullement surpris de voir un tel engagement de Bergeron, qui a ainsi rompu avec la formule habituelle du communiqué générique suivi d’un point de presse.

Le capitaine souhaitait même s’en tenir à cette missive, dans laquelle il faisait également ses aurevoirs aux Bostonnais. L’organisation l’a toutefois invité à rencontrer les représentants des médias. Une vingtaine de journalistes locaux et quelques reporters québécois l’ont ainsi interrogé une dernière fois, mercredi.

Bergeron s’est prêté à l’exercice, encore une fois sans broncher. Heureux, finalement, de s’adresser directement aux partisans par le truchement de la télévision, entre autres.

À la fin du point de presse, il a quitté le podium en silence, presque gêné. Il a fait mine de quitter les lieux, mais a plutôt décidé de flâner un peu pour bavarder avec des employés de l’organisation ou des reporters, dont certains le côtoient depuis 20 ans.

On pouvait l’entendre leur poser des questions sur leur été, sur leur famille. Lui-même leur parlera de ses enfants, de son nouveau-né d’à peine 1 mois, du tournoi caritatif qui porte son nom et qui aura lieu à Québec dans deux semaines. Mais de lui ? Peu, voire pas.

Il y a des choses qui, résolument, ne changeront pas.