Jonathan Huberdeau revenait tout bonnement de jouer au hockey avec des amis, vendredi soir dernier. Vers 23 h, son cellulaire a sonné.

Sur l’afficheur : Bill Zito, directeur général des Panthers de la Floride. À cette heure, il était clair que son patron « n’appelait pas pour rien ».

La conversation n’a pas été longue, mais a néanmoins laissé le Québécois sous le choc. Zito l’a informé qu’il venait d’être échangé aux Flames de Calgary, en compagnie du défenseur MacKenzie Weegar, du jeune attaquant Cole Schwindt et d’un choix de premier tour en retour de Matthew Tkachuk.

En réalité, c’est toute la LNH qui s’est retrouvée en état de choc en cette chaude soirée d’été. La transaction est sans conteste la plus spectaculaire des dernières années. Jamais deux vedettes du calibre d’Huberdeau et de Tkachuk n’avaient changé de camp simultanément depuis l’échange de P. K. Subban contre Shea Weber, en 2016.

Pour Huberdeau, la surprise a été totale. Zito et l’agent du Québécois, Allan Walsh, s’étaient rencontrés au cours des dernières semaines et s’étaient laissés sur l’intention du directeur général de soumettre à l’ailier gauche une prolongation de contrat – il deviendra joueur autonome sans compensation au terme de la prochaine saison.

Mais être échangé ? « Je ne m’y attendais pas du tout ; c’est arrivé de nulle part », a confirmé Huberdeau, lundi matin, lors d’une visioconférence organisée par les Flames.

613 points

Les Panthers ont fait d’Huberdeau leur choix de premier tour, 3e au total, en 2011. Il a disputé les 10 dernières saisons à Sunrise et s’est imposé comme un joueur marquant non seulement pour la franchise, mais à travers tout le circuit. Avec 613 points en 671 matchs en saison, le natif de Saint-Jérôme est le meilleur pointeur de l’histoire du club.

Au cours des quatre dernières saisons, Huberdeau est le quatrième marqueur de toute la LNH (346 points), devancé seulement par Connor McDavid, Leon Draisaitl et Patrick Kane. La saison dernière, alors que les Panthers ont terminé au tout premier rang du classement général de la LNH, Huberdeau est devenu l’ailier gauche ayant amassé le plus de mentions d’aide en une campagne (85).

Dans ce contexte, et alors que sa famille et lui sont maintenant bien enracinés dans le sud de la Floride, il ne cache pas qu’il trouve « triste » de voir ses plans changer aussi rapidement. Or, il tente désormais de prendre les choses avec philosophie. Après le « choc », « il faut que tu te fasses à l’idée », dit-il. Être échangé « fait partie du hockey ».

Rien n’arrive pour rien, je vais juste prendre le côté positif.

Jonathan Huberdeau

Le côté positif, c’est celui de se joindre à une équipe qui a remporté le titre de la division Pacifique la saison dernière et qui pourrait bien remettre ça en 2022-2023.

Les Flames ont certes vu partir, coup sur coup, Johnny Gaudreau et Matthew Tkachuk, leurs deux plus explosifs attaquants. Ils continuent néanmoins de miser sur un gardien, Jacob Markström, qui est l’un des meilleurs de sa profession ; sur une défense déjà solide et encore améliorée avec l’ajout de Weegar ; et sur une attaque qui dispose encore d’un arsenal hautement létal. Le joueur de centre Elias Lindholm, dans l’ombre de ses compagnons de trio, a inscrit 42 buts la saison dernière en plus d’être nommé pour le trophée Selke, remis à l’attaquant défensif par excellence de l’année. « Peut-être qu’il en marquera 50 avec moi ! », s’est amusé Huberdeau.

Tyler Toffoli est encore une menace autour du filet, Andrew Mangiapane vient de marquer 35 buts. Sean Monahan, après deux saisons frustrantes, espère retrouver son élan des beaux jours.

« C’est une très bonne équipe, ils veulent gagner, a encore dit le Québécois. Ils ont perdu des gars, mais [Weegar et moi], on veut les aider à passer à l’étape suivante. » Celle, évidente, de faire un bout de chemin en séries éliminatoires, après une frustrante déconfiture au deuxième tour face aux Oilers d’Edmonton, le printemps dernier.

Autant pour Weegar que pour Huberdeau, il s’agira d’une première expérience professionnelle au nord de la frontière. Tous deux des produits de la LHJMQ, ils n’ont connu que la Floride depuis leur entrée dans la LNH.

PHOTO LYNNE SLADKY, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

MacKenzie Weegar

« C’est vraiment cool, a dit Weegar, natif d’Ottawa. Je n’aurais jamais pensé que ça m’arriverait. En séries, la mer de chandails rouges dans l’aréna, c’est surréel. »

Les partisans de Calgary sont passionnés. Déjà, on se sent bien accueillis. J’ai hâte de sauter sur la glace et de jouer devant eux.

Jonathan Huberdeau

Les deux nouveaux venus seront libres comme l’air au terme de la prochaine saison, à moins qu’ils ne signent d’ici là une prolongation de contrat à long terme. L’un et l’autre se sont dits ouverts à l’idée de poursuivre leur route en Alberta pour longtemps. Si la synergologie était une science exacte, on avancerait que Weegar semblait un peu plus enthousiaste que son collègue à ce sujet.

Huberdeau a néanmoins insisté sur le fait qu’il n’excluait aucune possibilité et qu’il remettait sa destinée entre les mains de son agent et du directeur général Brad Treliving.

« On est juste là depuis 48 heures, a-t-il rappelé. On va voir ce qui va arriver. Mais je suis ouvert, c’est sûr. »