La transformation de la défense du Canadien, au cours de la dernière année, n’a été ni plus ni moins que spectaculaire.

On se rappelle qu’à pareille date en 2021, l’étoile d’Alexander Romanov pâlissait à vue d’œil. Il ne reste plus que Joel Edmundson, de l’escouade actuelle, qui jouait un rôle prépondérant à la fin de la saison précédente et pendant les séries éliminatoires. On pourrait aussi évoquer le nom de Jeff Petry, mais il est blessé, et on ne sait ni s’il rejouera cette saison ni s’il rejouera un jour pour le Canadien.

Nombreux sont ceux qui sont partis, aussi nombreux sont ceux qui sont arrivés. Certains sont même apparus et disparus dans l’intervalle – salutations ici à Sami Niku.

Il y a toutefois une chose qui n’a jamais changé, et qui est un élément de fierté pour Luke Richardson, responsable de la défense au sein du personnel d’entraîneurs du Canadien : la « culture » de ce groupe.

Le fameux top 4 du printemps 2021 – Shea Weber, Ben Chiarot, Edmundson et Petry – a bien sûr fait beaucoup parler de lui. Mais au-delà des performances sur la glace, l’esprit de corps qui animait les défenseurs du Canadien à ce moment était spectaculaire. Cela incluait même Richardson, d’ailleurs.

« Je pense parler pour tous les défenseurs en disant ça : on défoncerait un mur pour lui, parce qu’on sait qu’il le ferait pour nous », avait affirmé Chiarot en juin.

Dix mois et de multiples changements plus tard, la perception, de l’extérieur en tout cas, reste la même. De toute évidence, ce n’est pas une illusion, même si la défense s’est passablement rajeunie depuis.

« C’est le signe d’une bonne équipe », a estimé Richardson, mercredi, pendant une discussion avec les membres des médias.

« On a implanté des choses l’an passé, et je crois que les gars ont apprécié ce qu’ils ont vécu. Ça ne s’en va pas, c’est là pour de bon. Il y a une culture forte ici : on n’est pas contents de cette saison et on va tout faire pour revenir. Ça prendra peut-être du temps, mais on va revenir. »

Vétérans

Ces jours-ci, le Tout-Montréal n’en a que pour Jordan Harris et Justin Barron, fraîchement arrivés dans l’équipe. Les deux incarnent, plus ou moins malgré eux, l’idée du changement pour des partisans qui ont grandement besoin d’espoir.

Les ambassadeurs de la culture dont parle Richardson, ce sont donc Edmundson et David Savard, de loin les patineurs les plus expérimentés dans l’état actuel de la défense. Romanov n’en est qu’à sa deuxième saison dans la LNH, et Corey Schueneman, malgré ses 26 ans, dispute sa première.

L’entraîneur adjoint ne pourrait être plus ravi de la manière dont « Eddy » et « Savvy » accueillent et encadrent les nouveaux venus.

« Ils jouent un rôle énorme, a précisé Richardson. Ils calment les choses, sur la glace et dans le vestiaire. […] Ils s’amusent avec les jeunes et ils les font se sentir comme des collègues, pas comme des recrues. Ça aide les gars à trouver leurs repères. » Par extension, « ça aide toute l’équipe », a-t-il ajouté.

Les deux vétérans donnent un sacré coup de main aux entraîneurs, a encore reconnu Richardson. « Quand les jeunes reviennent au banc, pendant un match, ils peuvent passer du temps avec eux ; pas pour les coacher, mais pour leur donner de petits trucs, leur parler. Être de bons coéquipiers, en somme. C’est énorme pour nous. »

Barron, qui a marqué son premier but dans la LNH mardi soir, a d’ailleurs salué les conseils que lui donnent les deux doyens.

Les récentes visites à Sunrise, à Raleigh et à Tampa, contre trois des meilleures équipes du circuit, n’étaient pas des défis faciles pour des défenseurs inexpérimentés. « C’était une bonne chose d’avoir des gars plus vieux, autant sur le banc qu’à l’entraînement », a reconnu le jeune homme.

Autant Barron que Harris se révèlent par ailleurs de très bons élèves, a souligné Richardson. Les deux « absorbent beaucoup d’informations » et semblent emballés par l’occasion qui se présente à eux de se faire valoir parmi les meilleurs.

Dans le junior, à l’université et même dans la Ligue américaine, tu peux parfois être moins intense et t’en sortir quand même. Dans la LNH, tu ne peux rien prendre à la légère. Surtout un défenseur, tu ne veux pas te faire prendre.

Luke Richardson

Or, insiste-t-il, Barron et Harris « sont de bons kids » qui, par ailleurs, « ne veulent pas jouer qu’en défense ». « Ils patinent tellement bien, on veut utiliser leurs habiletés et leur énergie en attaque. Quand tu défends bien et de manière intelligente, même si tu n’es pas le plus gros des joueurs, tu peux générer beaucoup offensivement. »

Mardi, après le match contre les Sénateurs d’Ottawa, l’entraîneur-chef Martin St-Louis avait vanté le « calme » de Richardson dans son approche avec les jeunes, ce qui leur permet de « se sentir en confiance » et d’être « réceptifs à la critique constructive ».

Pour reprendre une expression connue, Barron, Harris, même Schueneman et Romanov, sont tous là pour apprendre. Tout porte à croire qu’ils sont entre bonnes mains.

Luke Richardson sur…

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE

Luke Richardson

Corey Schueneman

« Quand il a été rappelé une première fois, pendant les Fêtes, c’était très difficile pour l’équipe, mais il a montré qu’il pouvait saisir sa chance. Au rappel suivant, son nom était en haut de la liste. »

Jordan Harris

« Il est mature et il patine sans effort, ce qui est une bonne chose dans cette ligue, et encore plus dans le style de jeu que préconise Martin St-Louis. »

Justin Barron

« C’est une belle surprise. Il est calme avec la rondelle et il a un bon tir, c’est pour ça qu’il se retrouve en avantage numérique. Il a de bons instincts. »

La progression d’Alexander Romanov

« Il patine bien, fait de petits jeux subtils, peut tirer, jouer physiquement ; il a tous les attributs d’un solide défenseur. […] Avant, il se débarrassait rapidement de la rondelle, alors que maintenant, il utilise bien l’espace devant lui pour transporter le disque. Ce n’est pas juste un gros défenseur qui cherche la grosse mise en échec. »

L’absence de Romanov dans les périodes de prolongation

« Il a beaucoup d’énergie, mais son style de jeu est épuisant. Quand il est fatigué, il se débarrasse davantage de la rondelle, et tu ne peux pas faire ça en prolongation. Déjà, on raccourcit ses présences en fin de troisième période. Il progresse bien, les chances vont venir. »

David Savard

« Il m’a toujours impressionné quand il jouait à Columbus, et même l’an passé à Tampa. Ce n’est pas le gars le plus rapide, mais il est imprévisible pour l’adversaire. Parfois, il suffit d’une petite feinte avec sa tête et son épaule. C’est un bon surnom pour lui, Savvy [en français : rusé, sensé]. Il apporte du caractère dans le vestiaire et a une bonne autorité auprès des arbitres. Les jeunes apprennent de ça. »

Joel Edmundson

« Il est parfaitement entré dans le moule l’année dernière, vu la manière dont on jouait. Il a solidifié notre défense. C’est aussi un grand professionnel. Pendant sa convalescence, quand il venait s’entraîner avec nous, on le voyait parler à tout le monde, pousser les jeunes. [L’entraîneur adjoint] Trevor Letowski, qui ne le connaissait pas, a été impressionné de voir la différence qu’un seul joueur pouvait avoir sur un seul entraînement. Avec tout ce qui s’est passé et les changements de personnel, il a pris du galon. On le voit même appuyer l’attaque. Il attendait depuis longtemps sa chance de jouer un rôle de premier plan ; il la saisit et en tire le maximum. L’équipe et les jeunes en bénéficient, et lui aussi. »