Connaissez-vous beaucoup de jeunes qui ont commencé l’université à 16 ans ? En fait, reprenons : connaissez-vous beaucoup de jeunes étudiants-athlètes qui ont commencé l’université à 16 ans et qui trouvent le moyen de s’illustrer tant à l’école que dans leur sport ?

La réponse est sans doute non.

C’est pourtant le cas de Jacob Gaucher, capitaine du Drakkar de Baie-Comeau, dans la Ligue de hockey junior majeur du Québec (LHJMQ). Chez les Gaucher, on ne rigole pas avec les études : sa mère est comptable, son père est enseignant et recruteur en chef des Huskies de Rouyn-Noranda.

À sa deuxième année du primaire, Jacob avait déjà une longueur d’avance sur les jeunes de son âge. Assez pour qu’après deux mois, on le transfère en troisième année.

« Mes parents ont hésité au début, se souvient l’athlète de 20 ans. Ma mère n’était pas sûre, mon père un peu plus, mais j’étais un jeune homme assez mature pour mon âge.

« Finalement, l’adaptation s’est bien passée, poursuit-il. […] Avec le temps, ça m’a juste rendu encore plus mature d’être avec des gens plus vieux. »

Au fil des années, l’attaquant a évolué dans les meilleurs calibres au hockey, toujours en excellant sur les bancs d’école.

En 2017, à l’issue de sa première année dans la Ligue de hockey M18 AAA du Québec – alors la Ligue de hockey midget AAA du Québec –, Gaucher a été le choix de deuxième tour des Foreurs de Val-d’Or au repêchage de la LHJMQ. Ayant une année d’avance sur les joueurs de son âge, il venait alors tout juste de terminer son secondaire.

Cet été-là, il ignorait s’il ferait sa place dans la formation des Foreurs en septembre ou s’il retournerait avec les Gaulois de Saint-Hyacinthe pour une deuxième année dans le midget AAA. Mais il devait faire un choix : commencer le cégep au Québec ou l’université à distance ?

« Le cégep avec le hockey junior, je sais que c’est assez long et que c’est un processus complexe, explique-t-il. Ça me tentait plus d’aller à l’université directement. Avec le hockey, c’était plus facile de composer avec des cours à distance. Avec mon agent, on a regardé ça. »

L’Université du Nouveau-Brunswick a rapidement accepté sa demande.

L’université à 16 ans

Cette année-là, Gaucher a joué une deuxième saison dans le midget AAA. Il avait 16 ans. Pendant que ses coéquipiers terminaient leur secondaire, il suivait ses deux premiers cours universitaires en administration des affaires.

« Au début, j’essayais de prendre les cours plus de base, juste pour me mettre dedans, relate-t-il. En ce moment, c’est sûr que j’ai des cours plus complexes un peu, mais [l’adaptation] a bien été. J’ai de bonnes notes. »

De toute évidence, le jeune homme fait preuve d’une belle humilité : quand on lui demande quels sont ses résultats actuellement, il nous répond qu’il a eu A+ dans un de ses deux cours. Et dans l’autre ? « Je n’ai pas encore fait l’examen final, mais ouais, c’est pas mal A+. »

De « bonnes notes », donc.

Gaucher aimerait travailler en finances ou en actuariat. Il a d’ailleurs déjà commencé à investir, mais « ce ne sont pas de grosses sommes, c’est juste pour commencer à comprendre le marché et investir de [son] propre argent », nous dit-il.

Dans les prochains mois, Jacob Gaucher terminera son stage junior et aura fini la moitié de son programme universitaire. Voilà le résultat de quatre longues saisons à jumeler brillamment le sport et les études.

Parce que oui, Gaucher a aussi toujours bien performé sur la patinoire. À sa deuxième saison avec les Foreurs, en 2019-2020, il a été nommé assistant capitaine, rôle qu’il a occupé pendant deux campagnes. Puis, la saison passée, en 2021, il est passé tout près de remporter la Coupe du Président avec la troupe valdorienne. Il s’est d’ailleurs vu décerner le trophée Marcel-Robert, remis au joueur-étudiant de l’année dans la LHJMQ.

Pendant l’été, il a été échangé au Drakkar de Baie-Comeau, duquel il a été nommé capitaine deux mois plus tard. Mais la décision était déjà prise depuis un bon moment dans la tête de Jean-François Grégoire, entraîneur-chef de la formation de la Côte-Nord.

« C’était le genre d’individu qu’on voulait pour qu’il soit un exemple pour nos jeunes, raconte Grégoire à La Presse. [C’est] un jeune homme qui est très sérieux dans son entraînement hors glace, ses études, fait attention à lui. Sur la glace, il compétitionne, donne toujours son maximum et est un gars d’équipe. Ça rentrait dans nos valeurs. »

Quand on lui demande si son capitaine influence positivement ses coéquipiers avec ses efforts scolaires, Grégoire lance : « Ça relève le niveau des conversations dans le vestiaire ! »

Et la suite ?

Ces quatre dernières années, Gaucher aura traîné ses livres pour chaque voyage en autocar. « À distance, c’est sûr que c’est à mon rythme, mais si je veux tout comprendre, il faut être sûr que j’aie tout lu, donc ça fait que j’ai beaucoup de choses à faire », dit-il.

Arrives-tu à profiter de la vie quand même, à voir tes amis ?, lui demande-t-on. « Je ne suis pas un grand gamer, donc peut-être que ça m’aide à performer plus à l’école ! », lance-t-il à la blague.

Je me concentre sur mes choses, mais je suis capable d’avoir une vie sociale. Je vis bien avec tout ça.

Jacob Gaucher

Le résidant de Saint-Hubert, qui a accumulé 30 points en 29 matchs cette saison, n’a pas été sélectionné au repêchage de la LNH. Il ignore encore ce que l’avenir lui réserve après le junior majeur, mais il rêve encore de signer un contrat avec une équipe de la Ligue américaine à l’issue de son stage junior.

En allant à l’université, il voulait un bon plan B, le plan A étant le hockey.

Il l’a. Pas de doute là-dessus.