Daniel Walcott a fait d’une pierre deux coups, lundi soir. En plus d’avoir droit à son baptême dans la Ligue nationale, il a écrit l’histoire en se retrouvant sur le tout premier trio formé de trois joueurs noirs. Un évènement qui, espère-t-il, sera un « boost d’espoir » pour les jeunes hockeyeurs de couleur.

« J’espère que Mathieu [Joseph], Gemel [Smith] et moi pourrons, avec ce qu’on a fait, être une inspiration pour les jeunes », lance Daniel Walcott au bout du fil.

Un peu comme l’a été Jarome Iginla pour lui dans sa jeunesse, autrement dit. « Juste de voir une personne noire porter le C pour une équipe de la LNH, être un leader pendant tant d’années… Il faisait tout sur une patinoire. Ç’a été une inspiration. »

Walcott, Joseph et Smith n’ont appris qu’ils joueraient sur un même trio du Lightning de Tampa Bay qu’à leur arrivée à l’aréna avant le match contre les Panthers. Sur le coup, ils n’ont pas tout à fait réalisé l’ampleur de la situation.

« On était juste contents de jouer ensemble, soutient Walcott. Eux étaient aussi contents pour moi de me voir jouer mon premier match. »

C’est surtout cet évènement que le natif de L’Île-Perrot avait en tête au moment de poser le patin sur la glace. Peut-on vraiment lui en vouloir ? Il lui a toutefois suffi de quelques minutes sur les réseaux sociaux, au lendemain de la rencontre, pour prendre conscience qu’il faisait désormais partie de l’histoire de la LNH.

« C’est sûr qu’après le match, on commençait à réaliser : “Wow, les gars, on va être dans l’histoire de la ligue.” C’est vraiment incroyable », laisse-t-il entendre.

Le mérite va à [l’entraîneur] Jon Cooper, qui a décidé de nous mettre ensemble et de nous faire commencer la partie. On réalise ce qui s’est passé, mais on espère que ça ne deviendra pas une histoire chaque fois que ça se passe, que ça deviendra plus une réalité et une normalité.

Daniel Walcott

Tous les chemins mènent à la LNH

Daniel Walcott a d’abord joué au hockey et au football au Collège Bourget, à Rigaud. Incapable de se faire une place dans la formation du cégep de Saint-Laurent, il a pris la décision, à 17 ans, de rejoindre son père à Chicago.

« Le hockey, c’était dans mes rêves et dans les siens aussi, raconte-t-il. On s’est entraînés pendant un été complet. »

Défenseur à l’époque, il a joué pour une école secondaire de l’Illinois. Puis, il s’est fait offrir une bourse d’études lui permettant de se joindre à la formation de Lindenwood University, en division 1 de l’American Collegiate Hockey Association. Son nom est ensuite venu aux oreilles de Jean-François Houle, alors entraîneur-chef de l’Armada de Blainville-Boisbriand dans la LHJMQ. Ce dernier lui a offert un essai au camp de développement du club.

Essai qui s’est avéré fructueux, puisqu’en 121 matchs de saison et 25 matchs de séries éliminatoires à la ligne bleue de l’Armada, Walcott a récolté 94 points. Il a été sélectionné au cinquième tour lors du repêchage de 2014, avant d’être acquis par le Lightning de Tampa Bay en 2015.

Encore aujourd’hui, il donne à son père une partie du mérite. « C’était presque mon père et moi contre le monde à un moment donné », dit-il.

Walcott évolue pour le Crunch de Syracuse, club-école du Lightning, depuis six ans. Cette année, il a joué neuf matchs avant d’être rappelé dans l’équipe de réserve, où il a passé un mois et demi avant d’enfiler l’uniforme du Lightning. Mais l’attaquant n’en faisait pas de cas : il était « juste content » d’être là, parmi l’élite du hockey. Avec les champions en titre de la Coupe Stanley, qui plus est.

« Je suis arrivé là avec une bonne attitude. Le coach m’avait dit qu’il ne savait pas si j’allais jouer, mais de continuer à travailler fort. Je pratiquais, je m’amusais. Les circonstances m’ont permis d’avoir ma chance de jouer et j’étais extrêmement content. »

La bonne attitude, Daniel Walcott l’a abordée à quelques reprises au cours de son entretien avec La Presse. Le Québécois n’a jamais cessé de croire en son rêve d’évoluer un jour dans le circuit Bettman.

Le mindset est ce qu’il y a de plus important, de tout le temps être positif. On ne sait jamais ce qui peut arriver.

Daniel Walcott

Amener de l’énergie

Walcott a obtenu 10 minutes de temps de jeu dans une défaite de 4 à 0 face aux Panthers. Il a aussi jeté les gants devant Kevin Connauton en fin de deuxième période.

PHOTO LYNNE SLADKY, ASSOCIATED PRESS

Lundi soir, le Québécois Daniel Walcott a jeté les gants avec Kevin Connauton, des Panthers de la Floride.

« J’étais vraiment anxieux de finalement le faire, admet-il au sujet de son premier match. La journée avait été longue. Mais quand le moment est arrivé, j’ai juste pensé à toutes les choses que j’ai dû traverser, à quel point ç’a été long, mais enfin j’ai été récompensé pour mes efforts. »

« Je voulais amener de l’énergie, poursuit-il. J’ai eu mon premier combat dans la LNH. Je suis sorti de là avec un bon coup de poing sur l’œil gauche, mais au bout du compte, je me suis amusé. C’est juste dommage qu’on ait perdu, mais j’ai eu du plaisir et j’étais côte à côte avec deux de mes grands chums. »

Le Lightning affrontera les Panthers pour le premier tour des séries éliminatoires, à compter de dimanche. Au moment de l’entrevue, l’homme de 27 ans ignorait s’il aurait la chance de jouer.

« Comme je dis tout le temps : je vais être là et je vais être prêt », a-t-il lancé.

Walcott, 6 pi et 176 lb, s’est entendu avec le Lightning pour une prolongation de contrat de deux ans en mars dernier.

« Je vais continuer à pousser pour avoir le plus de matchs possible et vivre le rêve à temps plein, être un joueur de la Ligue nationale le plus longtemps que je pourrai. Ce qui arrivera arrivera. Un jour à la fois. »