Pour Nick Suzuki, il s’agit d’un joueur qui s’est amélioré « de match en match », qui peut faire de « petits jeux » qui passent inaperçus et qui « voit bien la glace ».

Pour Christian Dvorak, il est facile de voir à quel point il s’agit d’« un joueur intelligent », qui « fait un peu de tout », responsable défensivement mais aussi habile en attaque.

Le lecteur trop sensible ferait mieux de ne pas prendre une gorgée, car c’est bien de Ryan Poehling qu’il est question ici. Signe d’un camp d’entraînement sans histoire dominante, le jeune joueur de centre du Canadien est au cœur de toutes les discussions. Et, devrait-on préciser, de toutes les déceptions.

Nombreux même sont les observateurs qui se sont étonnés que Poehling survive aux coupes de mercredi matin. Celles-ci ont vu Rafaël Harvey-Pinard, Gianni Fairbrother, Gabriel Bourque et Michael Pezzetta plier bagage pour mieux se rapporter au Rocket de Laval.

En faisant abstraction des multiples blessures qui affligent le club, Poehling se retrouve donc parmi les 14 derniers attaquants disponibles. Le retour en santé de Cédric Paquette devrait logiquement signifier la fin des émissions pour Jesse Ylönen. Autrement, il reste un match hors concours à Poehling pour se faire valoir, jeudi soir au Centre Bell. N’en déplaise à ses détracteurs, il est donc loin d’être farfelu d’estimer qu’il amorcera la saison avec le grand club.

Pas si mauvais

On ne s’éternisera pas sur l’engouement qu’a jadis suscité ce choix de premier tour du Canadien en 2017. Ni même sur les attentes rajustées par ses débuts professionnels timides. Ni davantage sur le poste de quatrième centre qui, croyait-on, ne demandait qu’à être cueilli comme un fruit mûr.

Néanmoins, quatre matchs préparatoires plus tard, sa fiche d’aucun point, trois tirs, deux mises en échec et un tir bloqué a laissé bien des partisans sur leur faim. À plus forte raison lorsqu’on sait qu’il est l’attaquant de son camp qui a vu le plus d’action jusqu’ici – presque 49 minutes à forces égales.

La question, tout de même, se pose : Ryan Poehling a-t-il été aussi mauvais que l’affirme la proverbiale rumeur montréalaise ?

Pas si l’on regarde certaines statistiques ciblées. D’abord, et surtout, il a remporté 58,5 % de ses mises en jeu (31 en 53). En zone défensive, c’est plus modeste (52,4 %, ou 11 en 21), mais ça demeure en haut du seuil de respectabilité.

Lorsqu’il était sur la glace, le Tricolore a obtenu neuf chances de marquer de qualité, a calculé le site Natural Stat Trick. Il s’agit d’un sommet chez les attaquants du Canadien pendant le calendrier préparatoire – encore que Poehling soit l’un des trois seuls à avoir disputé quatre matchs. Dans un échantillon très limité, son taux de buts anticipés accordés est en outre comparable à celui de Christian Dvorak et bien meilleur que celui de Jake Evans.

Sur papier, on a donc affaire à un joueur fiable au cercle de mise en jeu capable de générer de l’attaque et qui est loin d’être un conteneur en feu sur le plan défensif. Ne serait-ce pas ce qu’on attend d’un centre de quatrième trio ?

Oui, mais…

Il y a aussi ce que l’on voit sur la glace. Ce joueur souvent mal positionné, qui perd l’adversaire qu’il est chargé de marquer, qui utilise mal son gabarit imposant, qui peine à inscrire son nom sur la feuille de pointage. Et dont on peut difficilement déterminer s’il pèche par nonchalance devant un poste qui lui semblait acquis ou bien si c’est la crainte de mal faire qui le fait jouer avec nervosité.

Constance, encore

Interrogé sur la situation de son nouveau coéquipier, Dvorak a souligné à quel point la clé se trouvait pour lui, ou pour n’importe quel autre joueur dans sa situation, dans l’intégrité de son jeu, en accord avec le style qui lui est propre. En évitant les fioritures et en faisant « les choses comme il faut, et le reste va suivre », promet-il.

De fait, la constance constitue encore et toujours le talon d’Achille de Poehling. Et son entraîneur-chef l’a rappelé mercredi.

La performance qu’il a offerte samedi dernier à domicile contre les Sénateurs d’Ottawa (victoire de 2-1), « c’est le genre de match qu’on veut voir chaque soir », a rappelé Dominique Ducharme, qui aimerait pouvoir mieux « prévoir » la version de Poehling qu’il verra à l’œuvre ce jeudi.

« Si tu veux gagner la confiance de ton patron ou de ton entraîneur, il faut que tu sois constant dans ce que tu fais, a-t-il précisé. [Poehling] est encore jeune, il aura une autre chance, après on va prendre une décision. »

Le Canadien conclura son calendrier préparatoire jeudi soir à 19 h au Centre Bell contre les Sénateurs d’Ottawa.