«On ne va pas passer par quatre chemins: je n'ai pas très bien joué.» Ces mots, ce sont ceux d'un Carey Price humble, ébranlé et visiblement défait dans le vestiaire du Centre Bell hier soir.

Il faut bien lui donner ça: dans le cadre de ce qui a été sa pire soirée au bureau en cette jeune saison, le gardien du Canadien n'est pas allé se cacher dans le bain tourbillon, comme d'autres le font parfois à la suite d'un match difficile. Et nul doute que cette défaite de 6-5 en prolongation contre les Sabres de Buffalo est à classer dans la catégorie des matchs difficiles pour lui.

Ce qui est encore plus difficile, dans cette ville en tout cas, c'est de critiquer, ne serait-ce qu'à l'occasion, le jeu de Price. À Montréal, le gardien de la jadis sainte Flanelle bénéficie d'une immunité presque religieuse, et ceux qui s'aventurent à le montrer du doigt sur les réseaux sociaux en ont ensuite pour des heures à recevoir un heureux mélange d'insultes, de statistiques avancées et de gifs ironiques de la part de ses plus farouches partisans.

Encore hier, Claude Julien nous a rappelé que ce n'était pas exactement le Big Three de Savard, Lapointe et Robinson qui veillait devant le filet de son gardien. «On n'a pas été forts devant lui», a résumé l'entraîneur-chef du CH.

C'est bien vrai.

Mais à un moment donné, il faudra que l'on se rende à l'évidence et il faudra que l'on se pose la question, si ce n'est déjà fait: est-ce que Carey Price joue comme le meilleur gardien du monde? Parce qu'à 10,5 millions US par saison, il est le gardien le mieux payé du monde.

Oui, c'est vrai, l'argent ne devrait pas faire partie d'une telle discussion, mais dans un monde de plafond salarial, où chaque directeur général doit gérer son équipe en fonction du moindre dollar dépensé, l'argent est forcément un facteur important. On n'en sort pas.

Et puisqu'on est dans les chiffres, voyons un peu ceux-ci: 4, 4, 5 et 6. Ce sont les buts accordés par Carey Price à ses quatre derniers départs. Une mauvaise passe qui le force à afficher ce matin un taux d'efficacité de ,892, ce qui le place au 35e rang des gardiens de la LNH à ce chapitre.

Cela est inquiétant. Est-ce que le gardien du Canadien est déjà en fin de carrière? Hier soir, en tout cas, on a vu un gardien toujours en train de se «battre» avec la rondelle, un gardien qui a du mal à suivre le jeu et à demeurer en bonne position pour faire l'arrêt. Pourtant, le jeu de position de Carey Price a longtemps été une référence dans le monde du hockey. C'est ce qui faisait sa force. C'est ce qui faisait de lui un joueur dominant, comme lors de la saison 2014-2015.

Et maintenant, que faire? Ceux qui espèrent une transaction devront se raviser. À 31 ans, et avec un immense contrat qui est encore valide jusqu'en 2025-2026, Carey Price ne s'en va nulle part. Le seul espoir, vraiment, c'est qu'il soit en mesure de retrouver ses repères, et assez vite, parce que ce club-là n'est pas bâti pour gagner des matchs de 6-5.

Bien sûr, on pourrait préciser que c'est injuste de tout ramener au gardien, mais que voulez-vous, la vie est pleine d'injustices, comme par exemple un album de Van Halen avec Gary Cherone à la voix. Le hockey est d'ailleurs un sport très injuste. Marcel Dionne n'a jamais gagné une Coupe Stanley, mais son frère Gilbert, oui.

«Je ne joue tout simplement pas aussi bien que je le faisais plus tôt», a ajouté Carey Price hier soir. C'est exactement là où ça fait mal: le Price des beaux jours avait l'habitude de faire un arrêt de routine sur les tirs comme celui de Rasmus Ristolainen, le tir de la victoire hier en prolongation. Il y a eu des huées après cela, et précédemment il y avait eu des bravos sarcastiques quand Price y allait d'un arrêt de routine. Ce n'est jamais très constructif, tout ça, mais bon, le public s'attend à des performances à la hauteur du salaire.

Avec Carey Price, avant, tout avait l'air facile. Ces jours-ci, tout lui semble compliqué, comme un pianiste qui ne saurait plus faire la différence entre les blanches et les noires.

«Ça se passe en haut [dans la tête], je vais devoir y remédier», a-t-il ajouté.

En effet. C'est la saison de son club qui en dépend.

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En hausse: Max Domi

Un match de trois aides - et un premier match de trois points depuis qu'il est un membre du Canadien.

En baisse: Carey Price

Un match de six buts, ce n'est jamais bon, et c'est encore moins bon quand ça vient de celui qui est censé être le meilleur gardien du monde.

Le chiffre du match: 2

C'est la première fois cette saison que le Canadien subit deux défaites de suite.