Comment faire pour cogner à la porte du circuit PGA Tour tout en faisant abstraction du bruit que ça occasionne ? C’est le défi avec lequel doit négocier Étienne Papineau.

Tous les golfeurs sans exception, de l’amateur qui pioche au Parcours du Cerf à l’instructeur privé du Manoir Richelieu, s’est déjà imaginé, ne serait-ce que pour un seul instant, s’élancer sur les allées d’un terrain de la PGA. Pour certains, ces visions sous forme de mirage ont le potentiel de se concrétiser. C’est le cas d’Étienne Papineau, le meilleur golfeur québécois.

L’athlète de Saint-Jean-sur-Richelieu est de passage au Québec pour quelques jours avant de reprendre le collier sur le circuit Korn Ferry, l’antichambre du PGA Tour. Au terme de la saison, les 30 joueurs les mieux classés obtiendront leur droit de jeu pour le meilleur circuit au monde en 2025. Après six évènements disputés en Amérique du Sud, Papineau occupe la 30e position du classement.

« Ce n’est pas nécessairement facile tout le temps là-bas, a indiqué par téléphone le golfeur de 27 ans pendant la première ronde du Championnat des joueurs. On est sorti de sa zone de confort. On est sur un autre continent, ce n’est pas le même langage. Donc ce n’est pas toujours facile pour se déplacer ou communiquer là-bas, mais on s’en sort bien. »

Cinq fois propulsé dans les rondes du week-end, un top 10 et trois top 25, effectivement, Papineau s’en sort bien. Même si le principal intéressé est loin d’être rassasié. « Je suis assez compétitif, assez perfectionniste, je suis assez dur avec moi-même. […] Je sais que je suis capable de gagner sur le circuit. Il me manque juste quelques trucs à travailler. »

Il parle ici de son efficacité et de sa créativité autour des verts. Raisons pour lesquelles il a regardé attentivement les joueurs se produire sur le TPC Sawgrass pendant le « cinquième majeur de la saison ». Il ira s’entraîner sur la même pelouse dans quelques jours. C’est l’un des privilèges auxquels il a droit comme membre du circuit Korn Ferry.

La prochaine étape

L’année dernière, Papineau a dû conclure la saison dans le top 5 de la Coupe Fortinet, avec PGA Canada, pour accéder au Korn Ferry. Il l’a fait brillamment et évidemment, chaque tournoi auquel il participe cette année est consacré à son objectif de rester dans le top 30 pour réaliser son rêve le plus précieux. C’est aussi le but de chacun de ses rivaux et c’est ce qui rend sa mission si complexe.

PHOTO TIRÉE DU COMPTE INSTAGRAM D’ÉTIENNE PAPINEAU

Étienne Papineau

Le droitier garde toutefois la tête froide : « On ne parle pas de ça nécessairement. Notre but immédiat n’est pas de se rendre sur le PGA Tour. On a une longue saison devant nous. » Effectivement, il reste près d’une vingtaine de tournois. « Ça peut changer assez rapidement. Il reste en masse de points à aller chercher. »

Néanmoins, pour les 29 autres golfeurs dans la même situation que lui, ça doit être un boulot colossal d’analyser le classement sans se projeter. Des centaines de golfeurs feraient presque n’importe quoi pour être aussi près qu’eux de l’objectif tant convoité.

« C’est comme l’année dernière, rationalise Papineau. J’ai eu une belle année sur le PGA Tour Canada, mais j’essaie de ne pas trop penser au classement. Tu as beau essayer de ne pas y penser, mais tu vas finir par le faire. C’est comme arriver au 18e trou et mener par un coup. Il faut que tu sois capable de gérer ça. »

Jouer pour Pat

Le 8 février dernier, Étienne Papineau a perdu l’un de ses mentors. Patrick Rhéaume, entraîneur réputé et apprécié, a demandé l’aide médicale à mourir pour mettre fin à ses souffrances liées à la sclérose latérale amyotrophique (SLA). Il a accompagné le golfeur principalement pendant ses années de développement chez les juniors.

Évidemment attristé par la nouvelle de son départ, Papineau a été capable de l’assimiler au compte-gouttes, car Rhéaume lui avait fait part de ses derniers vœux deux semaines auparavant.

Inutile de préciser que le tournoi qu’il a disputé dans les heures qui ont suivi était dédié à Rhéaume. « Avant chaque ronde, j’ai un petit journal dans lequel j’écris des objectifs. Et cette semaine-là, j’écrivais “Je joue pour Pat.” »

Le jour de sa mort, Papineau a joué une ronde de 63. Le lendemain, il a inscrit un trou d’un coup au septième trou du Country Club de Bogota-Lagos, en Colombie. Il a terminé le tournoi avec une carte de -15 et une huitième place. Son meilleur résultat de la saison jusqu’à présent.

Étienne Papineau sait très bien qu’il n’était pas seul pendant ce week-end. Et il ne le sera pas non plus s’il parvient un jour à tenir dans ses mains sa carte du PGA Tour.