Aucun golfeur depuis Tiger Woods au sommet de sa gloire au début des années 2000 ne s’était présenté au Tournoi des Maîtres avec une confiance comme celle affichée actuellement par Scottie Scheffler.

Sans grande surprise, le meilleur golfeur au monde a été égal à lui-même, jeudi, lors de la première journée de la 88édition du tournoi le plus prestigieux au monde. Posé, efficace et intelligent, il pointe au deuxième rang du classement à -6 (66). Seul Bryson DeChambeau l’a devancé, en rapportant une carte de -7 (65).

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Contrairement à Scheffler, on n’attendait pas un DeChambeau aussi précis, délicat et solide. À vrai dire, on ne l’attendait plus. Le golfeur de 30 ans était porté par un élan semblable à celui lui ayant permis de remporter l’Omnium des États-Unis en 2020. Il n’a jamais excellé à l’Augusta National, car ce terrain dompté seulement par les golfeurs les plus minutieux et les mieux appliqués n’a jamais fait bien paraître les gros cogneurs.

Parce qu’après tout, DeChambeau est d’abord reconnu pour sa puissance, ensuite pour sa chaîne YouTube et, en dernier lieu, pour sa finesse.

Or, il a fait preuve d’un fabuleux doigté pour prendre les devants. Il a terminé son tour comme il l’avait commencé, avec trois oiselets consécutifs. Il a aussi atteint 15 des 18 verts en régulation. Une donnée qui fait foi d’une grande précision.

Il est devenu difficile d’évaluer le progrès de l’Américain depuis son transfert dans la série LIV Golf, mais visiblement, DeChambeau s’est présenté comme un golfeur transformé à sa huitième participation en carrière.

Son très long roulé au 12e, sa maîtrise dans l’Amen Corner et sa sortie de fosse au 18e sont quelques exemples pouvant illustrer pourquoi il entamera la journée de vendredi en tête, à la surprise de bien des gens.

En revanche, personne ne doit être étonné de voir le nom de Scheffler apparaître sur le tableau des meneurs. Le champion du veston vert en 2022 est dans une forme resplendissante depuis le début de la saison. Il faut retourner plusieurs années dans le passé pour trouver un golfeur ayant dominé son sport à ce point.

En huit tournois en 2024, il a gagné deux fois, s’est classé cinq fois dans le top 5 et n’a jamais raté une coupure.

Scheffler est inébranlable et sa désinvolture naturelle continue de contraster avec son pouvoir de performer dans les plus grands tournois. Aucun joueur n’a dû négocier avec autant de pression cette année. Et aucun golfeur n’a paru maîtriser la situation autant que lui.

Contrairement à DeChambeau, il n’a commis aucun boguey. Même lorsqu’il était dans le pétrin, il s’en est sorti. Comme avec cet oiselet depuis l’obstacle de sable au 12trou ou encore cette approche chirurgicale au 15trou avec un fer long en main. Il a été intraitable. Et il est à sa place dans le haut du tableau.

Importants retards

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Des travailleurs à l’œuvre sur le parcours ont dû enfiler des ponchos pour se protéger de la pluie.

En se réveillant jeudi, les golfeurs ont probablement eu l’impression de revivre un vilain cauchemar. Comme lors des premiers tours l’an dernier, la pluie, le vent et les cellules orageuses ont bousculé l’horaire.

Les premiers participants étaient censés prendre le départ à 8 h. Or, ils ont finalement frappé leur première balle deux heures et demie plus tard, à 10 h 30.

Évidemment, cet important retard a eu des répercussions et ça continuera d’être le cas jusqu’à vendredi, minimalement.

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Tiger Woods

Des golfeurs comme Tiger Woods ont commencé leur tour à 15 h 54. D’ailleurs, le tigre a rassuré bien des gens. Il a achevé 13 trous et a été freiné à -1 à cause de la noirceur.

Mais surtout, il est compétitif, d’une part, et son corps tient le coup, d’autre part.

D’abord, le quintuple champion du tournoi a été épatant. Dans toutes les phases du jeu, dans toutes les conditions et dans toutes les positions, Woods n’a jamais semblé être en déficit. Le plus étonnant chez lui a été sa capacité à se sortir du trouble. Malgré ses coups de départ erratiques au deuxième, au quatrième, au douzième et au treizième trous, il a gardé le cap. Son jeu sur les verts a laissé à désirer à certaines occasions, lui ajoutant des coups dont il se serait bien passé. Son rendement sur les verts n’a pas été catastrophique, mais dans les faits, son pointage aurait pu être bien meilleur. Néanmoins, avec un fer court en main, il a été étincelant. Notamment dans l’Amen Corner.

Ensuite, contrairement à ses plus récentes apparitions, le joueur de 48 ans n’a pas eu l’air de souffrir le martyre. La douleur à son corps et ses articulations fragiles n’ont jamais paru. Le défi de Woods sera de passer à travers la deuxième journée. En raison du retard en matinée, il n’a pas été en mesure de terminer son tour. Ainsi, en plus des 18 trous évidemment prévus au programme du deuxième tour, il devra aussi jouer les cinq trous restants de son premier tour.

L’année de McIlroy ?

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Rory McIlroy

Depuis l’édition 2018, jamais Rory McIlroy n’était rentré au chalet avec la satisfaction d’avoir joué un tour sous la normale.

Cette fâcheuse séquence a pris fin jeudi, puisque le quadruple champion majeur a enregistré un tour de 71, un petit coup sous le nombre prescrit. Au cours de ses 10 dernières participations, McIlroy a terminé sept fois dans le top 10. N’eût été certaines erreurs évitables, il aurait déjà complété le Grand Chelem, car le Tournoi des Maîtres est le seul manquant à sa collection.

Il pointe à égalité au 17rang, à six coups de la tête. Au moins, cette année, il n’aura pas à jouer constamment du golf de rattrapage. Il a raison d’être optimiste, car à la mi-parcours, il maîtrisait la situation à égalité au par. Ça s’est un peu bousillé en fin de ronde, mais quand même, McIlroy n’a pas été dans une position aussi favorable depuis des lunes. Sa frappe de balle était nette et même son jeu court a collaboré.

Une seule statistique, toutefois, pourrait jouer contre lui. Lors des 19 dernières éditions du tournoi, un seul joueur classé à l’extérieur du top 10 au terme du premier tour a fini par triompher. C’était Woods en 2005 et en 2019.

Ainsi, si la tendance se maintient, il y a présentement 16 compétiteurs en bonne position pour se faire remettre le veston vert par Jon Rahm dimanche soir au coucher du soleil.