Comment faire mieux que la perfection ? C’est la question à laquelle tentera de répondre l’équipe féminine de rugby du Rouge et Or de l’Université Laval.

Bilan : 11 victoires, aucune défaite, 605 points marqués, 66 accordés.

Avec ces statistiques hors de l’ordinaire, l’édition 2022 du Rouge et Or a écrit non seulement l’histoire du rugby québécois, mais aussi du sport universitaire canadien.

« C’est sûr que ça vient avec une certaine pression de performance, estime la capitaine Laurence Chabot, en ce début de saison. Tout le monde nous regarde et les gens attendent de voir si on sera capables de répéter les mêmes exploits. »

PHOTO FOURNIE PAR LE ROUGE ET OR DE L’UNIVERSITÉ LAVAL

La capitaine Laurence Chabot (avec le ballon)

L’équipe de Québec s’est rendue jusqu’au bout, à l’automne, remportant les grands honneurs au championnat canadien. Lors de ce tournoi, disputé à Victoria en Colombie-Britannique, Audrey Champagne s’est démarquée. Blessée pendant la majorité de la saison « régulière », l’athlète de 24 ans était de tous les combats lors des matchs éliminatoires. Elle a obtenu le titre de joueuse par excellence du championnat canadien.

Champagne n’a pas envie de parler de « pression » lorsqu’il est question des attentes à l’égard de la nouvelle saison. Au contraire, les réussites personnelles et collectives de l’année 2022 serviront davantage de motivation.

Lors des années 2019 ou 2020, on était sous-estimées. Mais en 2023, on ne peut plus dire ça. On est l’équipe que toutes les autres veulent vaincre. Sans dire qu’on se met la pression, on veut rester numéro un.

Audrey Champagne

Sa coéquipière Adèle Samson va encore plus loin : « Maintenant, notre nom est connu partout au Canada. On a quelque chose à défendre. »

Effectivement, au-delà des titres et des banderoles, le Rouge et Or n’a aucune envie de rester dans les annales comme l’équipe s’étant affaissée ou écrasée après une saison aussi remarquable.

L’honneur, parce que c’est ce qui prévaut dans le vestiaire du Rouge et Or, doit absolument être défendu.

Se préparer au pire

Lors de leur premier match, la semaine dernière à Ottawa, les championnes en titre l’ont emporté 14-12. Un duel serré, à égalité à la mi-temps, et pendant lequel les Québécoises ont accusé un retard jusqu’à la fin de la rencontre.

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Adèle Samson

On peut être fières de ce qu’on a fait l’an passé, mais là, c’est une nouvelle saison.

Adèle Samson

Leurs grandes rivales ontariennes ont failli avoir leur peau, mais les joueuses de l’Université Laval sont sorties gagnantes du duel le plus compliqué du calendrier, sur papier.

Néanmoins, aucune équipe, ni même une formation ayant touché à la perfection, n’est à l’abri d’une défaite. Sans penser nécessairement à cette éventualité, les joueuses restent lucides. Même si elles n’ont pas perdu de match depuis plus d’un an, elles baisseront pavillon à un moment donné.

« Dans n’importe quel sport, une saison sans défaite reste exceptionnelle. C’est hors norme et il ne faut pas qu’on l’oublie. Mais ce n’est pas parce que tu perds un match que tu as échoué. Il ne faut pas que notre standard devienne une saison parfaite », relance Laurence Chabot.

Adèle Samson, grâce à toute la sagesse que lui procurent ses 22 ans, soutient que « parfois, ça prend des défaites pour apprendre ».

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Audrey Champagne

Même son de cloche du côté d’Audrey Champagne : « L’objectif final est d’être championnes canadiennes et ce n’est pas une ou deux défaites dans l’année qui pourraient faire la différence. Mais dans tous les cas, on est bien préparées et on ne veut pas perdre. »

La transition

Les équipes universitaires sont dans un cycle de recommencement perpétuel. En raison des critères d’âge et d’admissibilité, certaines joueuses partent et d’autres arrivent. Chez le Rouge et Or, 5 des 15 partantes ne sont pas de retour cette saison. Marie-Pier Fauteux et Andréanne Valois, notamment, sont du nombre.

Le défi sera donc de conserver la même identité, la même culture, même si une partie de l’édition gagnante a été fragmentée.

« On a perdu de gros morceaux, mais on en perd chaque année, précise Chabot. Notre identité a toujours passé par notre jeu d’équipe. »

Cette identité est définie par la qualité du jeu défensif et la rapidité d’exécution de la relance offensive.

Même si, en matière de taille et de gabarit, l’équipe est diminuée par rapport à certaines rivales, le système et les schémas instaurés il y a plusieurs saisons font de ce groupe une unité à craindre.

Ces ouvertures de postes permettent néanmoins aux plus jeunes du groupe d’avoir enfin une chance de briller.

Samson, qui entame sa troisième année, est l’une d’elles. « Je ne me considère pas nécessairement comme une vétérane, vu qu’il y a des joueuses qui sont plus anciennes que moi, mais je vais devoir profiter de cette position-là pour éventuellement pouvoir remplacer celles qui vont nous quitter. »

Cette profondeur, pense Chabot, « c’est aussi la force du programme ».

La réalité, c’est qu’une autre saison parfaite est à la portée du Rouge et Or. Pour y parvenir, les joueuses puisent leur motivation dans le fait que chaque maillon de la chaîne peut être remplacé, comme l’explique Champagne : « Tout le monde dans l’équipe a un rôle à jouer et n’importe qui peut te prendre ta place. »

Et si le moral des troupes devait un jour être ébranlé, estime Samson, la solution se trouvera quelque part entre les réussites du passé et la conviction d’être encore au sommet : « Il faut juste se rappeler qui on est. »