Comment construire une relation saine avec son enfant ou son adolescent ? Éviter de se heurter à un mur lors des discussions ? Le neuropsychologue Benoît Hammarrenger nous donne cinq trucs qui sont au cœur de son tout nouveau livre, De l’opposition à la communication.

Être en synchronie avec l’émotion de l’enfant

« La synchronie, pour moi, c’est ce qui peut changer le plus facilement quelque chose dans une famille. Ça s’applique assez facilement et assez efficacement. D’une part, il faut avoir un ton de voix qui est le même que l’émotion vécue par l’enfant. Puis il faut reformuler ce que l’enfant dit et nommer l’émotion : “Tu es fâché que…” ou “Ça a l’air vraiment cool, c’est excitant que…”[…] »

« Les mots, parfois, ne sont pas les bons ; on se mélange avec ce qu’on voulait dire et ce qu’on a dit. L’enfant manque de vocabulaire, et l’adolescent, lui, restreint son vocabulaire — il ne veut pas parler la plupart du temps. Alors quand on va chercher l’émotion, on dépasse les mots, donc on se comprend mieux. »

Éviter de se poser en adversaire

« Aussitôt qu’on dit notre “mais” comme parent, on se positionne contre l’enfant. Et là, on va dire plein d’arguments rationnels qui ont plein de sens, mais qui sont en fait en position adverse contre ce que l’enfant, lui, vit à ce moment-là et demande. »

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

Le neuropsychologue Benoit Hammarrenger

« Ce que je recommande, c’est encore un truc facile et applicable : c’est pour le parent d’être conscient du moment où il va dire “mais” et de le repousser le plus possible. “Ah, tu aimerais avoir telle chose” ou “Ah, ça te déçoit pour telle chose, raconte-moi” et progresser dans cette voie pour ne pas arriver tout de suite au “mais”. Parce que le “mais” vient vite : “Je sais que tu veux ce jouet-là, mais…” On le repousse pour que l’émotion monte et ensuite redescende, selon la courbe [expliquée dans le livre], pour que l’enfant soit dans la phase d’émotion où le rationnel revient et peut entendre le “mais”. »

Entendre les émotions avant de proposer des solutions

« C’est vrai même dans une relation d’adulte où on raconte un problème à quelqu’un : la première chose qu’on veut entendre n’est pas une solution. La première chose qu’on veut entendre est que ce qu’on vit est valide ; que l’autre entend qu’on est triste, fâché, stressé… qu’on vit quelque chose et qu’il trouve que ça a du bon sens qu’on vive ça. Quand on arrive avec des solutions trop vite, ça peut même être fâchant. On commence à raconter quelque chose de notre vie, puis l’autre nous dit : “As-tu pensé à… As-tu essayé ça…” »

La solution qui vient trop vite jette sous le tapis l’émotion qui a besoin d’être entendue.

Le Dr Benoit Hammarrenger, neuropsychologue

Laisser s’exprimer la colère

« La colère est une émotion qu’on tente beaucoup d’éteindre et d’inhiber. C’est compréhensible ; on est connecté dans notre cerveau pour interpréter la colère comme une attaque et une menace. C’est l’équivalent de l’ours qui se dresse. Alors on veut l’éteindre parce qu’on n’aime pas se sentir attaqué et menacé. Pourtant, c’est une émotion qui est légitime. Face à un déclencheur de colère, la bonne réponse est d’être fâché… dans un registre qui est correct dans la manifestation. »

« Et c’est ça qu’il faut entraîner. Laisser une place à la colère dans un registre qui convient, qui ne brise pas les règles (comme frapper, lancer, mordre, blesser ou injurier par les mots) et qui reste dans un temps circonscrit, également. Mais il faut lui laisser une place, sinon elle va être emmagasinée et elle risque de sortir ailleurs. On risque alors d’avoir un enfant qui s’oppose, qui ne sera pas content, qui vit mal… La colère ressassée revient souvent parce qu’elle n’a pas été entendue et que l’enfant réessaie de se faire entendre. »

PHOTO AZMANL, GETTY IMAGES

« On ne parlera pas des mêmes types de sujets avec un enfant de 6, 7 ou 8 ans qu’avec un ado de 12, 13, 14 ans », explique le Dr Benoit Hammarrenger.

Établir une communication à double sens

« On ne parlera pas des mêmes types de sujets avec un enfant de 6, 7 ou 8 ans qu’avec un ado de 12, 13, 14 ans, par exemple. Avec un enfant, on va plutôt raconter des anecdotes courtes de notre journée, avec un certain dynamisme. Ça peut être quelque chose de l’actualité qui est intéressant également. Un exemple que je donne dans le livre : “Ils ont posé une sonde sur Mars, viens, on va regarder ça ensemble.” Quand on arrive vers l’adolescence, on peut avoir des discussions un peu plus sur des questionnements de valeurs, un conflit au travail : “Qu’est-ce que tu en penses, toi ?” On se met dans les souliers de l’un puis de l’autre ; c’est ce que l’ado aime. »

De l’opposition à la communication

De l’opposition à la communication

Éditions Midi Trente

200 pages