Être parent d’un enfant en bas âge comporte son lot de défis. Et il arrive qu’on ne sache plus vers qui se tourner pour trouver des réponses à ces petits soucis du quotidien. Une fois par mois, La Presse explore une question qui touche le bien-être des enfants d’âge préscolaire à l’aide d’un spécialiste. Aujourd’hui : quoi faire quand l’éducatrice est absente à la garderie.

Des petits qui s’accrochent aux vêtements de leurs parents, le matin, à la garderie, en voyant une remplaçante à la place de leur éducatrice. Des crises de larmes qui éclatent. Des mines boudeuses et renfrognées qui durent jusqu’en fin de journée.

Ces derniers temps, beaucoup d’enfants ont dû s’habituer à de nouveaux visages à la garderie, la pandémie occasionnant de nombreuses absences au sein du personnel éducateur. Et pour certains d’entre eux, le moment de séparation devient angoissant… et tout aussi éprouvant pour les parents, déchirés de voir leur enfant aussi déstabilisé.

« Dans son développement, l’enfant a besoin d’être attaché pour se sentir bien dans un contexte. Donc, quand il est dans un contexte où il y a une remplaçante qu’il connaît plus ou moins, ça peut poser problème », estime la psychoéducatrice Joanne Parent, qui exerce depuis plus de 20 ans.

Rien d’anormal, dans ce cas, qu’un jeune enfant réagisse ainsi… Mais comment faire pour que la transition du parent à l’éducatrice remplaçante se fasse sans heurts pour l’enfant, alors que le contexte pandémique cause déjà bien des bouleversements au quotidien ? Et surtout, comment éviter que ce moment ne devienne un cauchemar pour les enfants et leurs parents ?

Même si ce sont généralement les enfants de moins de 3 ans – et surtout les poupons – qui réagissent plus vivement à l’arrivée d’une nouvelle éducatrice, les plus âgés hypersensibles seront eux aussi pris au dépourvu devant le changement, précise Joanne Parent, puisque leur besoin de prévisibilité est très élevé.

PHOTO SIMON CLARK, FOURNIE PAR JOANNE PARENT

La psychoéducatrice Joanne Parent

Je dirais que l’une des choses importantes, quand on sait un peu à l’avance qu’il y aura une remplaçante, par exemple, la veille, c’est d’en informer l’enfant pour pouvoir en parler avec lui et démystifier toutes ses questions.

Joanne Parent, psychoéducatrice

« L’hypersensible a des connexions neuronales multipliées dans son cerveau, ce qui fait qu’il va se poser un million de questions, qui vont mener à un million de préoccupations, comme “à quoi elle ressemble ?”, “comment elle s’appelle ?”, etc. »

Se réapproprier son pouvoir de parent

Les parents ont toutes les raisons de se sentir démunis ou impuissants devant cette situation, qui n’a plus rien d’occasionnel, dans certains cas. Mais ils ont quand même du pouvoir, assure Joanne Parent.

Avant tout, il faut donner des repères d’attachement à l’enfant en maintenant une stabilité autour de lui : par exemple, c’est toujours papa qui le dépose le matin et maman qui vient le chercher le soir.

Lorsque c’est possible, établir un lien amical avec l’éducatrice remplaçante en lui parlant quelques minutes à l’arrivée pour que l’enfant se sente sécurisé à travers cette connexion.

On peut aussi lui laisser quelque chose qui nous appartient (un élastique pour les cheveux…), ajoute-t-elle, ou lui dessiner un cœur sur la main qui va lui permettre de penser à son parent pendant la journée.

PHOTO DAVID BOILY, ARCHIVES LA PRESSE

Lorsque c’est possible, établir un lien amical avec l’éducatrice remplaçante peut aider l’enfant à se sentir sécurisé.

« Quand l’enfant fait une crise, c’est sa manière à lui de se décharger de son émotion parce qu’il se passe quelque chose dans son corps ; c’est une tempête », dit Joanne Parent.

« Si l’éducatrice remplaçante accueille les enfants en les saluant avec des câlins, qu’elle chante, rit, bouge, fait des respirations bedon, ça va aider à diminuer le stress de tout le monde, et les enfants vont déjà être dans un état très aidant pour passer une belle journée », note-t-elle.

« Et si les [parents et les remplaçants] travaillent dans ce sens, je pense qu’on est gagnant pour démontrer aux enfants que oui, il s’en passe des imprévus dans la vie, il va toujours y en avoir, mais on risque de les aider à passer au travers de l’adversité bien plus qu’on peut l’imaginer. »

Consultez le site de la psychoéducatrice Joanne Parent

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