Il y a des histoires qui s’écrivent comme des romans. Ainsi celle de l’île aux Pommes, île privée nichée au milieu du Saint-Laurent, propriété de la famille Déry depuis quatre générations et extraordinaire repaire de biodiversité qui a bien failli ne jamais exister. La Presse a eu la chance d’y passer 24 heures en compagnie de centaines d’eiders à duvet, en pleine période de nidification, de quelques humains, dont Gaston Déry, qui a consacré sa vie à son île. Récit.

Il était une fois… mon île

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L’île aux Pommes fait 25 hectares, dont 23 composent une réserve naturelle.

Elle fait partie de ces îles sauvages et méconnues du Saint-Laurent, qui s’égrènent sur plus de 150 000 km2 entre l’estuaire et le golfe. L’île aux Pommes est peut-être toute petite, avec ses 25 hectares, mais son histoire, elle, touche au grandiose. Bienvenue sur la toute première île de l’estuaire du Saint-Laurent à avoir reçu le statut de réserve naturelle privée à perpétuité.

« Sur le midi, y ayant calme, nous avons mouillé par le travers de l’Île aux Pommes, où il n’y a aucune habitation ; on l’appelle ainsi à cause de la quantité étonnante d’une plante rampante qui produit un petit fruit rouge […]. Dans le printemps, ce fruit est dans sa maturité d’un goût délicieux très estimé […]. On en fait de la bonne liqueur. »

C’est en ces mots que le général Louis Joseph de Montcalm décrit l’île aux Pommes dans ses écrits, le 7 mai 1756. Les petits fruits qu’il mentionne sont des airelles rouges, baie acidulée qui ne pousse plus aujourd’hui sur l’île, mais qui avait été observée par le frère Marie-Victorin, venu y effectuer des études de la végétation en 1931.

  • L’île aux Pommes accueille la deuxième colonie d’eiders à duvet en importance dans l’estuaire du Saint-Laurent.

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    L’île aux Pommes accueille la deuxième colonie d’eiders à duvet en importance dans l’estuaire du Saint-Laurent.

  • Un phoque prend la pose.

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    Un phoque prend la pose.

  • Un guillemot à miroir, qui vit en colonie dans les îles de l’estuaire

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    Un guillemot à miroir, qui vit en colonie dans les îles de l’estuaire

  • Un bébé goéland se fait dorer au soleil.

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    Un bébé goéland se fait dorer au soleil.

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Sous le régime français, l’île aux Pommes était rattachée à la Seigneurie de l’Isle Verte. En 1816, les droits seigneuriaux de l’île furent vendus, faisant de l’île aux Pommes une propriété privée, qui appartient à la famille Déry depuis 1927.

Chaque année, cette petite île de moins de 2 km de long accueille la deuxième colonie d’eiders à duvet en importance dans l’estuaire du Saint-Laurent. Sa biodiversité est riche et la nature s’y fait généreuse, foisonnante, indomptée. Mais il n’en a pas toujours été ainsi.

À la découverte de l’île aux Pommes

Début juin. L’après-midi touche à sa fin lorsque nous arrivons à la marina de Trois-Pistoles. Le temps est superbe, mais il n’y a pas une minute à perdre : la marée basse est imminente, et il nous reste peu de temps pour traverser vers l’île aux Pommes, qui se trouve à environ 5 km au large du pittoresque village du Bas-Saint-Laurent.

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L’île aux Pommes compte une seule habitation, construite sur les fondations d’un ancien chalet par Charles-Hubert Déry, le fils de M. Déry.

À la barre de son bateau, Gaston Déry appuie sur l’accélérateur. On s’accroche alors que l’embarcation fend les vagues. Après une quinzaine de minutes, on voit poindre au loin l’île aux Pommes. Les oreilles se remplissent de la musique des centaines d’oiseaux qui y sont rassemblés : eiders à duvet, mais aussi goélands, petits pingouins, guillemots marmettes, bruants chanteurs, sans compter leurs amis mammifères marins, phoques, bélugas et rorquals.

135 : nombre d’espèces d’oiseaux dénombrées dans l’île aux Pommes

La vue qui s’offre à nous est superbe, alors que la nature sauvage n’y est dérangée que par une habitation plantée sur la portion la plus élevée de l’île, habitable six mois par année, de mai à octobre.

Dans cette île coupée de tout (sauf de l’internet haute vitesse — on est au XXIsiècle après tout), l’autosuffisance est nécessaire. Et elle se fait de façon écoresponsable, en accord avec son statut de réserve naturelle en milieu privé – obtenu en 2004 grâce à l’adoption l’année précédente par le gouvernement provincial de la Loi sur la conservation du patrimoine naturel, permettant de reconnaître légalement un milieu naturel privé. Cette loi, explique fièrement M. Déry, a été notamment créée dans la foulée de son travail de revitalisation dans l’île aux Pommes.

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Gaston Déry se promène sur l’île aux Pommes avec son chien Bayard.

Nous avons été la première réserve naturelle en milieu privé de l’estuaire maritime du Saint-Laurent. Ça a enlevé beaucoup de valeur en argent à l’île, car on ne peut pas avoir d’activités lucratives dans la réserve. Ici, ce sont les oiseaux qui sont les propriétaires ! Pour moi, cette valeur écologique est beaucoup plus grande que la valeur en argent.

Gaston Déry

Sur l’île aux Pommes sont prohibées, à perpétuité, l’utilisation de pesticides et l’introduction de plantes non indigènes. L’eau de pluie est récupérée ; on l’utilise avec parcimonie. La maison, elle, est alimentée à l’énergie solaire.

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Sur un cabanon adjacent à l’habitation, des panneaux solaires fournissent tout ce qu’il faut en énergie.

Mais il y a plus. En période de nidification des eiders à duvet, soit entre avril et juin, il est interdit d’emprunter les sentiers aménagés sur l’île, afin de ne pas déranger les femelles, leurs œufs et les canetons. Seule une petite portion de l’île, autour de l’habitation, est accessible. Et le nombre d’humains qui peut y séjourner est, lui aussi, très limité. Sur l’île aux Pommes, la nature est reine. Littéralement.

Les îles, « diamants du fleuve »

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En temps de nidification, il n’est permis de circuler que sur une petite partie de l’île aux Pommes.

Lorsque Gaston Déry parle de « son » île, ses yeux brillent. L’île aux Pommes, mais aussi toutes les îles du Saint-Laurent, et la biodiversité riche qu’elles accueillent le passionnent, à l’évidence. Il y a consacré une grande partie de sa vie.

« Les îles, ce sont les diamants du fleuve. La plus grande biodiversité qu’il y a dans le fleuve, c’est sur les îles. Mais il y en a beaucoup qui ne sont pas protégées, qui sont menacées », déplore-t-il.

Diplômé en génie forestier, le jeune Déry a très tôt développé de fortes valeurs écologiques, héritées de son grand-père, le DDavid-Alexis Déry, qu’il décrit comme un « environnementaliste avant l’heure ».

Dès les années 1920, le grand-père de Gaston Déry et son beau-frère, le DStanislas Gaudreau, à qui appartenait alors l’île, ont constaté les dommages créés par l’invasion progressive des goélands et des cormorans à aigrettes sur l’île aux Pommes.

  • Encore aujourd’hui, de nombreux goélands nichent sur l’île aux Pommes.

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    Encore aujourd’hui, de nombreux goélands nichent sur l’île aux Pommes.

  • Les mouttes trydactiles, de la même famille que les goélands, qu’on peut distinguer par leur bec très pointu et leurs pattes noires, nichent aussi sur les récifs rocheux de l’île aux Pommes.

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    Les mouttes trydactiles, de la même famille que les goélands, qu’on peut distinguer par leur bec très pointu et leurs pattes noires, nichent aussi sur les récifs rocheux de l’île aux Pommes.

  • Un goéland traverse le ciel.

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    Un goéland traverse le ciel.

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Dans les années 1950, pas moins de 20 000 goélands et des milliers de cormorans avaient établi leurs quartiers sur l’île, causant des dommages importants à l’environnement. Les excréments de cormoran, qui sont alcalins, détériorent le sol et empêchent la croissance de la végétation, en plus d’être extrêmement nauséabonds, alors que les goélands, friands d’œufs et de canetons, ont fait graduellement fuir les colonies d’eiders.

Cette île autrefois verdoyante et fertile était devenue aride, inhospitalière, voire inhabitable pour l’humain. Un phénomène qui semblait tout simplement irréversible au début des années 1980, lorsque Stanislas Déry, le père de Gaston Déry, vend l’île aux Pommes à son fils, alors âgé de 28 ans.

Une mission

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Vue de l’île aux Pommes vers la rive nord du fleuve. Au loin, on devine l’embouchure du fjord du Saguenay et Tadoussac.

Mais c’était sans compter le plan de Gaston Déry, pour ne pas dire sa mission, poussé à accomplir de grandes choses comme son père, un héros de guerre à qui il voue une grande admiration : redonner l’île aux eiders.

« Je voyais que l’île avait du potentiel. J’ai voulu en faire un paradis pour les oiseaux, une oasis de biodiversité. Et un jour, ça sentira la rose ! Les gens me disaient que je me prenais pour le petit prince. On me traitait de fou ! », raconte-t-il.

Armé de sa volonté inébranlable, il a réussi à faire ce que d’aucuns croyaient impossible : ramener la biodiversité — et les eiders à duvet — sur l’île, grâce à un plan d’aménagement conçu avec l’organisme Canards Illimités Canada. Au programme : brûlage contrôlé pour acidifier de nouveau le sol et épandage de terre pour accueillir des arbustes comme des églantiers et des framboisiers, transplantés de l’île aux Fraises, située au large de Kamouraska.

Le but était de créer un habitat propice aux eiders et défavorable aux goélands. Pendant 30 ans, avec la famille, les enfants, on a entretenu tout ça. Tranquillement, la végétation s’est installée et la nature a repris ses droits.

Gaston Déry

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Gaston Déry et son fils, Charles-Hubert Déry

Alors qu’il a fait la passation de l’île à la quatrième génération de Déry en 2015 — ses deux enfants, Charles-Hubert et Laurence Déry —, on peut dire que c’est mission accomplie pour M. Déry, qui a reçu les plus hautes distinctions pour ses efforts : Phénix de l’environnement en 2007, Ordre du Canada en 2018, chevalier de l’Ordre national du Québec l’an dernier.

« On a fait de l’île un sanctuaire extraordinaire. Aujourd’hui, c’est désormais le projet de mes enfants et de mes petits-enfants, qui savent qu’un jour, ce sera leur tour », énonce M. Déry avec fierté. « La plus grande richesse, c’est une terre protégée, renchérit Charles-Hubert Déry. Ça vaut plus cher que n’importe quel building au centre-ville de Montréal ! »

Une réalité plus probante que jamais, alors que la pandémie amène une prise de conscience, observe Gaston Déry : « Ce qu’on vit depuis un an et demi est grandement attribuable au fait qu’on n’a pas respecté la biodiversité. Si on veut que l’humanité survive, on doit restaurer les écosystèmes dégradés. Et ce n’est pas les grands gestes qui comptent, c’est la somme des petits gestes. Les citoyens peuvent faire une différence. »

Découvrez l’histoire de l’île aux Pommes

Le duvet d’eider, une richesse locale hors du commun

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Un eider à duvet survole le fleuve.

L’eider à duvet est une espèce fascinante. En Islande, on récolte depuis un millénaire ce duvet sauvage, l’un des plus recherchés au monde, et sans doute le seul duvet éthique sur la planète. Au Québec, c’est Société Duvetnor, OSBL fondé par le biologiste Jean Bédard, qui s’occupe de la récolte de ce précieux cadeau de la nature. Tour d’horizon pour mieux connaître cet oiseau qui se reproduit entre autres sur les îles de l’estuaire du Saint-Laurent.

Un canard nordique

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Une femelle eider à duvet s’ébroue sur un rocher de l’île aux Pommes.

« Eider » dérive de l’islandais æðr. C’est de là que viendrait le mot « édredon » (eiderdown en anglais). On retrouve le canard eider, aussi nommé eider à duvet, dans tout l’hémisphère Nord : en Islande et au Groenland, sur les côtes d’Europe et dans l’est de l’Amérique, dont l’estuaire du Saint-Laurent. L’espèce est protégée depuis l’entrée en vigueur, en 1916, de la Convention concernant les oiseaux migrateurs entre le Canada et les États-Unis. Au Canada, la chasse sportive est permise, mais seulement durant une période limitée, à l’automne.

3 millions : population estimée d’eiders à duvet sur le globe*

Des îles prisées

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Le canard eider mâle adulte se reconnaît à sa livrée noir et blanc et à sa calotte noire.

Le mâle eider adulte se reconnaît à sa livrée noir et blanc, alors que la femelle, plus discrète, est dotée d’un plumage brun. Oiseau migratoire, l’eider fréquente les régions maritimes et se nourrit principalement de mollusques comme la moule bleue. Ce n’est que durant la période de nidification que l’eider s’installe sur la terre ferme, formant généralement des colonies de milliers d’individus, de préférence dans des endroits sans prédateurs terrestres, d’où sa prédilection pour les îles de l’estuaire du Saint-Laurent.

Des propriétés géniales

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Nid de canard eider avec cinq œufs bien au chaud grâce au duvet

Pour protéger ses œufs et les garder au chaud, la femelle eider arrache avec son bec le duvet de sa poitrine pour garnir son nid. Les propriétés exceptionnelles de son duvet sont connues depuis un millénaire par les Islandais et ce dernier était prisé des colons de la Nouvelle-France durant les rudes hivers québécois. En plus d’être le seul duvet qui ne contient aucune plume rigide susceptible d’altérer la qualité du produit, il possède une extraordinaire cohésion permettant de mieux conserver la chaleur, ainsi qu’une élasticité impressionnante. Il est aussi extrêmement léger. Toutes ses propriétés le font considérer comme le nec plus ultra des isolants naturels.

1950 : début de l’exploitation commerciale du duvet d’eider au Canada

Éthique… et cher

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Le duvet d’eider est un produit rare et recherché.

Le duvet d’eider est peut-être le duvet le plus recherché au monde. Et contrairement aux duvets issus de fermes d’élevage — qui proviennent invariablement de l’abattage des oiseaux —, aucun canard n’est tué durant la récolte du duvet, ce qui en fait un duvet éthique. La quantité de duvet épuré produite mondialement ne s’élève qu’à quatre ou cinq tonnes par année. C’est donc aussi un des duvets les plus rares… et les plus chers sur le marché. Le duvet d’eider est particulièrement prisé, pour les couettes, en Allemagne ainsi qu’au Japon et en Chine. Le marché est encore embryonnaire en Amérique du Nord.

7 : nombre de grammes de duvet épuré produit en moyenne par un nid d’eider

1000 : nombre de grammes de duvet d’eider dans un édredon, en moyenne

1000 $/kg : prix en gros que peut atteindre le duvet d’eider

Une récolte encadrée

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Une fois cueilli, le duvet d’eider doit être nettoyé et stérilisé.

Sauf erreur, l’estuaire du Saint-Laurent est le seul endroit en Amérique du Nord où se fait la récolte commerciale de duvet d’eider (en plus de quelques îlots le long des côtes du Nunavik). Depuis le début des années 1980 au Québec, le duvet d’eider est récolté par Société Duvetnor sur des îles de l’estuaire, dont l’île aux Pommes et l’île aux Lièvres, propriété de Duvetnor. Il n’est récolté qu’une fois l’an, pendant la période de couvaison. La cueillette se fait avec minutie, à la main et à petite échelle, directement dans les nids, selon un protocole très précis, élaboré par l’organisme et approuvé par le gouvernement fédéral. Une fois récolté, le duvet est nettoyé, puis stérilisé selon des techniques développées par Duvetnor, puis vendu à des commerçants qui vont à leur tour le revendre à des fabricants de couettes ou de vêtements.

18 % : pourcentage de la production mondiale de duvet d’eider provenant du Canada

Un partenariat entre l’homme et l’animal

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Une femelle eider et des canetons, à l’île aux Lièvres

Société Duvetnor présente sa façon de faire comme un partenariat unique entre l’homme et l’espèce animale : en échange de ce produit naturel recherché, l’homme vient protéger l’habitat de nidification de l’eider à duvet. « On a proposé au gouvernement fédéral une alternative : on va faire la récolte et utiliser le duvet d’eider comme source de revenus, et on va mettre en place un réseau de surveillance pour empêcher que les gens dérangent les oiseaux », explique le biologiste Jean Bédard, qui a fondé Société Duvetnor en 1979. Ainsi, les profits tirés de la vente de duvet ont permis à Duvetnor d’acquérir et protéger des îles de l’estuaire, dont l’île aux Lièvres, située au large de Rivière-du-Loup, tout en offrant au Service canadien de la faune de précieuses informations sur l’espèce et son habitat.

20 000 : nombre de femelles eider baguées chaque année par Duvernor

*Les données présentées dans cet article sont majoritairement tirées du document Le duvet d’eider. Caractéristiques et procédures de récolte, produit par Duvetnor.

Consultez le document Le duvet d’eider. Caractéristiques et procédures de récolte

Une fructueuse collaboration

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La veste sans manches Olmsted, dont les profits iront à la SPAIAP, ici portée par Gaston Déry

La marque de vêtements d’extérieur haut de gamme montréalaise Olmsted Outerwear lance en collaboration avec la Société de protection et d’aménagement de l’île aux Pommes (SPAIAP) une veste sans manches rembourrée de duvet d’eider.

La petite histoire est amusante. En 2019, La Presse publie un article sur la nouvelle marque de manteaux Olmsted Outerwear et sa fondatrice, Mélanie Ellezam. Son projet : créer un manteau d’hiver 100 % biodégradable, fait localement, en n’utilisant que des matériaux naturels de première qualité. À l’époque, Mme Ellezam avait jeté son dévolu sur le duvet Huttérite canadien, duvet d’oie blanche fort prisé et de haute qualité.

Relisez notre article sur Olmsted

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Charles-Hubert Déry est aujourd’hui propriétaire de l’île aux Pommes avec sa sœur Laurence.

Voyant cet article, M. Déry l’a envoyé à son fils, Charles-Hubert. Depuis des années, ce dernier déplorait le fait que le duvet d’eider, une ressource locale récoltée entre autres sur l’île aux Pommes par la Société Duvetnor, était ensuite vendu à l’étranger. Il caressait l’idée de lancer une gamme de manteaux de chasse rembourrés de duvet d’eider d’ici.

Le jour même, Charles-Hubert Déry contacte Mélanie Ellezam. Rapidement, ils se lient d’amitié. La designer découvre alors avec ravissement le duvet d’eider. Même si son coût élevé fera grimper le prix de ses manteaux, déjà destinés à un marché de niche, elle décide de faire le saut, et de remplacer le duvet Huttérite par celui d’eider. Sa gamme de manteaux est ainsi devenue une des très rares gammes de manteaux au monde à utiliser le précieux duvet.

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Mélanie Ellezam nous montre combien le duvet d’eider utilisé pour rembourrer ses manteaux offre une cohésion remarquable.

Il y a des années, Gaston Déry a créé la Société de protection et d’aménagement de l’Île aux Pommes (SPAIAP), un OBNL qui détient depuis 2013 le statut d’organisme de bienfaisance. L’objectif : trouver une façon de financer les dépenses importantes générées par l’entretien de la réserve naturelle de l’île.

« Le problème, c’est qu’en créant une réserve naturelle, on a renoncé à toute forme de revenus sur l’île. Mais la ressource que l’on protège est une ressource publique. On a donc créé [la SPAIAP], dont le but est de générer des revenus pour les activités essentielles de protection de l’île », détaille Gaston Déry, qui fonde beaucoup d’espoirs dans la nouvelle subvention de 40 millions de dollars sur trois ans accordée par le gouvernement du Québec à Conservation de la nature Canada afin de soutenir financièrement les organismes de conservation propriétaires ou gestionnaires d’aires protégées.

  • Le manteau se détaille au coût de 1540 $ et tous les profits générés iront à la SPAIAP.

    PHOTO DARIANE SANCHE, FOURNIE PAR OLMSTED

    Le manteau se détaille au coût de 1540 $ et tous les profits générés iront à la SPAIAP.

  • Un écusson aux couleurs de l’île aux Pommes orne le manteau

    PHOTO FOURNIE PAR OLMSTED

    Un écusson aux couleurs de l’île aux Pommes orne le manteau

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Dès aujourd’hui, on peut se procurer sur le site d’Olmsted le manteau créé en collaboration avec l’île aux Pommes, une veste sans manches isolée en duvet d’eider, faite de coton ciré biologique imperméabilisé à l’huile d’olive et ornée d’un écusson embossé en cuir végétal aux couleurs de l’île. Tous les profits des ventes de cette veste fabriquée localement iront à la SPAIAP.

Cette « collaboration entre une entreprise à but lucratif et un OBNL » vient « développer un modèle d’affaires innovant qui supporte à la fois la croissance d’une entreprise et la protection de la biodiversité », estime Mme Ellezam, qui siège désormais au conseil d’administration de la SPAIAP, composé à la fois de membres de la famille Déry et de personnes extérieures ayant à cœur sa mission.

Consultez le site d’Olmsted Outerwear

Rectificatif
Dans une première version de cet article, deux espèces oiseaux étaient mal identifiées : il s’agit du guillermot à miroir (d’abord identifié comme guillermot marmette) et de la mouette tridactyle (d’abord identifiée comme goéland). Toutes nos excuses.