En novembre 2018, Daniel Lighter fêtait ses 30 ans de barreau. Aujourd’hui, il s’apprête à se consacrer davantage à sa deuxième carrière, l’hôtellerie. Le Montréalais à la chevelure argentée et au regard bleu acier possède deux charmants petits hôtels au Belize : Matachica et Gaia. Portrait d’un avocat en sandales !

Bien qu’il ait travaillé au Club Med pendant quelques mois, à 23 ans, l’hôtellerie n’était pas au programme de cet avocat de la défense qui gagnait très bien sa vie (et ses procès !).

La famille de Daniel Lighter possédait la marque Helen Harper Sweaters. « Toute ma vie, j’ai été intéressé par l’entrepreneuriat, mais pas par l’entreprise familiale. Mon père travaillait dans l’immobilier. Au cours de ma carrière en droit, j’ai fait quelques investissements. Avec des partenaires, j’avais, par exemple, repris des marques de spiritueux dont la distillerie Seagram se débarrassait. »

PHOTO FOURNIE PAR MATACHICA

Daniel Lighter

Mais avant tout, Daniel Lighter a fait carrière à titre de procureur de la Couronne, puis d’avocat de la défense. Le natif de Westmount a exercé le droit criminel de haut niveau, dans certains cas très médiatisés. Il a adoré ça.

Sur le plan personnel, Daniel Lighter n’a pas non plus chômé. Il a eu six enfants, dont un, l’avant-dernier, fut victime de la mort subite du nourrisson. Ce fut une période très difficile. « Je travaillais beaucoup. J’occupais la présidence de la Jewish Public Library. J’avais cinq enfants. Mon mariage n’a pas survécu. »

Prendre le large

Pour son premier Noël sans femme ni enfants, en 2005, l’esseulé a senti le besoin de prendre le large. « J’avais un fantasme d’éloignement et d’isolement, dans une destination sans enfants, mais pas romantique non plus ! »

À la suggestion de collègues et d’amis, il a choisi le Belize. Une fois le pied posé dans ce petit pays d’Amérique centrale, situé au sud du Mexique et à l’est du Guatemala, il est tout de suite tombé amoureux de l’authenticité et de la gentillesse des gens.

Le Belize est un pays de langue anglaise. On y parle également un créole local, l’espagnol et le maya, entre autres, mais la langue de Shakespeare domine. « La vie y est très informelle. Les routes sont mauvaises. La petite ville où on atterrit pour aller sur les îles (cayes) est sablonneuse et chaotique. »

En 2005, Daniel Lighter a néanmoins constaté que le développement touristique commençait tranquillement. 

J’étais trop souvent passé à côté d’occasions vraiment intéressantes dans le passé. Alors en rentrant à Montréal, je n’avais qu’une idée en tête : retourner et investir là-bas.

Daniel Lighter

Il pensait acheter une maison. Il a acheté un hôtel ! « En arrivant au Matachica, sur Ambergris Caye [la plus grande île du Belize], j’ai été accueilli par Nadia, une hôtesse aux allures de Sophia Loren. Le restaurant était très populaire, le petit hôtel marchait bien. Le temps d’un café avec Nadia et son mari Philippe, les propriétaires, je me suis engagé à acheter un hôtel, sans trop savoir comment j’allais le payer. Le 16 mai, j’en étais le propriétaire ! L’équipe est restée en place. Le directeur général et le chef sont d’ailleurs toujours là. J’imagine qu’ils ne sont pas trop mal ! »

L’hôtelier involontaire a fait quelques changements dans les chambres – literie, produits de bain, etc. –, puis a passé trois ans à apprendre le métier, entre deux procès. « Parfois, j’étais en cour et mon téléphone vibrait : “N’oublie pas le chocolat pour le fondant”, m’écrivait le chef ! Le lendemain, je partais avec de gros blocs de Valrhona dans ma valise. »

La propriété a grandement évolué au fil du temps, avec la construction de nouvelles casitas, cabañas, suites, villas, piscines, etc. Daniel souhaitait ardemment conserver l’esprit des lieux, avec, entre autres, les toits de chaume pittoresques. Il y a aujourd’hui une trentaine de « chambres » au Matachica.

« Il fallait que l’hôtel continue de ressembler à mon idéal d’un hôtel sur une plage du Belize. Il n’y a pas vraiment d’architecture balnéaire très typique ici, mais il y a des styles qui se marient mieux à l’environnement que d’autres, disons. »

La plus récente rénovation est l’œuvre des frères Byron et Dexter Peart, ex-propriétaires de l’entreprise WANT Les Essentiels, qui viennent de lancer une plateforme d’objets durables pour la maison, Goodee.

« De nos jours, il y a de plus en plus de vols vers le Belize en provenance de Chicago, de L.A., de Houston, constate Daniel. Cette clientèle a certaines exigences en matière de déco. Il était temps de monter la barre un peu. Byron et Dexter ont parfaitement compris l’esprit des lieux et ont meublé les espaces avec des objets et du mobilier du Guatemala, du Mexique, de la Colombie et du Honduras, entre autres. » L’illustratrice montréalaise Cécile Gariépy signe les œuvres murales colorées dans les chambres.

PHOTO FOURNIE PAR LE GAIA RIVER LODGE

Le Gaia River Lodge, deuxième propriété de Daniel Lighter, se trouve dans la forêt tropicale, près de la frontière avec le Guatemala.

Dans la forêt tropicale

Sa deuxième propriété bélizienne, le juriste l’a achetée dans la forêt tropicale. En 2012, il s’était mis en tête d’ouvrir un deuxième Matachica, peut-être à Cuba. Finalement, un petit hôtel à vendre, au pied d’une chute, lui a fait de l’œil. C’est devenu le Gaia River Lodge, qui offre une tout autre expérience du pays. Francis Ford Coppola possède d’ailleurs un hôtel à deux milles du Gaia.

« Le Belize, c’est beaucoup plus que des plages. Ici, on visite des ruines mayas et des cavernes, on fait de l’équitation, de la randonnée, de l’ornithologie… », décrit celui qui se prépare à sauter à pieds joints dans sa deuxième vie.