Des propriétaires nous ouvrent les portes de leur demeure d’exception, offerte sur le marché de la revente

Pierre par pierre, pièce par pièce, André Santerre a patiemment monté son projet implanté dans la zone de l’astroblème de Charlevoix. Après y avoir consacré 12 ans de sa vie, il cherche désormais un successeur, conscient et convaincu qu’il s’agira de quelqu’un comme lui, c’est-à-dire « passionné par le développement durable, l’autosuffisance, la nature, l’espace, la liberté ». « Parce que chez nous, c’est un peu ça », avertit-il, avant de présenter sa propriété, vraiment unique sur le marché.

En 2008, lorsqu’il passe le cap des 50 ans, M. Santerre acquiert cet immense terrain (environ 1 million de pieds carrés, soit plus de 100 000 m⁠2) de la municipalité de Saint-Urbain. Des arbres, de la nature, et une vue potentielle sur les montagnes de la région, formées par un impact de météorite lors de temps immémoriaux... Il prend en compte tous les paramètres de l’environnement pour amorcer son projet, qu’il souhaite toutefois mûrir au fil du temps, étape par étape. Aux services municipaux, qui aimeraient bien savoir à quoi s’en tenir et lui réclament un plan d’ensemble, il répond, tout en s’engageant à éviter les dérogations mineures : « Je peux bien vous donner des plans, mais où j’en serai dans 10 ans ? Je n’en sais rien ! »

N’allez surtout pas croire que le nouveau propriétaire verse dans l’improvisation, car c’est en fait l’exact opposé. Ingénieur aujourd’hui retraité, il s’est longuement attardé à chaque palier, chaque détail, n’hésitant pas à solliciter professionnels et spécialistes de tous horizons avant de mettre en chantier ses idées, axées sur l’agrotourisme et l’autosuffisance alimentaire.

J’y suis allé à petits pas, et à chaque étape réalisée, je remettais en question les suivantes pour m’assurer que l’espace et le terrain étaient utilisés au mieux.

André Santerre, propriétaire

La première pierre à poser sera la rénovation de la petite maison déjà érigée sur le terrain, qui servira d’abord d’habitation, avant de se muer, un peu plus tard, en hébergement pour amis et famille. Mais c’est plutôt le deuxième chapitre qui inaugure la vision de l’hôte, avec la construction d’une habitation-mirador perchée au-dessus des arbres. « J’avais en tête de me donner un point de vue sur les montagnes de Charlevoix et l’un des plus vieux cratères au Québec. J’avais fabriqué une perche de 40 pieds, munie d’une caméra, pour avoir une idée des angles de vue et décider à quel endroit positionner le mirador, puis intégrer le reste des bâtiments », explique M. Santerre.

Une fois l’emplacement idéal déniché, une unité de 20 pieds sur 20 pieds est bâtie au sol, avant d’être hissée au sommet d’une tour de bois. Et quiconque émet des réserves quant à la solidité de la structure ne connaît visiblement pas le zèle de l’ingénieur : respectant scrupuleusement les normes de construction, elle a été assemblée en bois de sapin de Douglas, un matériau extrêmement résistant, et ancrée à 22 pieds de profondeur, en plus d’avoir été conçue pour résister aux vents et aux secousses sismiques. « En fait, une seule des colonnes de la structure pourrait supporter le bâtiment installé au sommet », avertit le propriétaire, qui a fait valider ses calculs par un confrère spécialisé.

PHOTO RENÉ BOUCHARD, FOURNIE PAR LES IMMEUBLES CHARLEVOIX

Permettant d’admirer les montagnes de Charlevoix, le mirador-maison a été conçu pour résister à toute épreuve.

Le mirador est achevé en 2010, et André Santerre y prend ses quartiers, puisqu’il s’agit d’une habitation autonome, avec cuisine, salle de bains et toutes les commodités. « Le soleil dans les fenêtres, ça commençait mes journées d’une façon extraordinaire », se souvient-il. De là-haut, accoudé à une balustrade, il tente de se figurer la suite du projet.

Serre et services

La suite se fera sous la forme d’une serre quatre saisons, poussant au pied de la tour, en collaboration avec des agronomes du ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation (MAPAQ). L’objectif ? Savoir à quel coût, notamment énergétique, l’autonomie alimentaire pourrait être atteinte ; un pari relevé haut la main, selon ses calculs, à renfort de tomates estivales et d’épinards hivernaux.

S’y greffe un nouveau bâtiment principal, toujours au sol, muni de salle à manger, chambre, terrasse, et surtout d’une impressionnante cuisine, conçue en composant avec les conseils de trois chefs cuisiniers, et équipée d’un four à bois. Très à cheval sur les standards, le propriétaire indique que les normes du MAPAQ y sont également respectées, tout comme dans la chambre froide aménagée dans le roc massif.

Un soin tout aussi minutieux a été apporté aux agencements, grâce à l’intervention d’architectes et de designers d’intérieur, ce qui se constate aussi bien à l’intérieur (fenestrations, charpentes inusitées, alliance de pierres et de bois) qu’à l’extérieur, notamment en observant les toitures enchevêtrées. « Un de mes amis architectes m’a aidé au début pour sortir de ce qu’on appelle les murs et toits types, tout en respectant la réglementation », souligne M. Santerre, qui avoue aussi avoir été très influencé par le renommé Frank Lloyd Wright. « C’est incroyable tout ce que cet homme-là avait en tête. Je regardais ses différents projets, j’y prélevais des échantillons d’idées pour finalement en mélanger trois ou quatre ou dix, ce qui a abouti entre autres à ces toitures entrecroisées », raconte-t-il.

Entrepreneur allumé recherché

En marge du côté résidentiel, l’ensemble du domaine représente de façon évidente un potentiel commercial, les zonages ayant été modifiés à cette fin.

Tout le temps du projet, j’ai gardé les deux avenues du résidentiel privé et du commercial. On peut utiliser les lieux comme hébergement, auberge ou aire de restauration.

André Santerre, propriétaire

Il avait lui-même amorcé des démarches dans ce sens. Jusqu’à ce que l’année 2020 sape son élan.

Aujourd’hui, les choses se sont replacées, mais le retraité affiche les 65 printemps. « Ai-je vraiment le goût de mettre cinq ans d’énergie pour faire décoller le projet ? J’aurai 70 ans. À un moment donné, je me suis dit que c’est un fichu beau projet pour quelqu’un qui, comme moi quand je suis arrivé là, fin quarantaine, veut continuer son développement dans la même orientation », explique-t-il, se disant prêt à seconder son successeur, qu’il voit bien issu du domaine du tourisme et doté d’une sensibilité environnementale, pour relancer cette chaîne intégrée à la sauce agrotouristique ; comprenant aire pour animaux d’élevage, volière, arbres fruitiers, vignes, serre et jardins, etc. « J’aimerais ça, dans 5 ou 10 ans, voir que quelqu’un a amené ça plus loin et vit de la même passion. Et aussi voir que je n’ai pas fait ça pour rien », dit le Charlevoisien.

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La propriété en bref

Prix demandé : 1 390 000 $

Évaluation municipale : 883 500 $

Année de construction : 2008

Bâtiment principal : 22 m x 16 m

Superficie du terrain : 1 096 702 pi⁠2 (101 887 m⁠2)

Impôt foncier (2023) : 8341 $

Taxe scolaire (2023) : 787 $

Courtière : Marie-Joëlle Boivin, Les immeubles Charlevoix