Entre 2016 et 2021, la population de la ville de Bromont a bondi de 26 %. À l’exception de Saint-Appolinaire, aucune ville au Québec n’a connu pareille croissance. État des lieux.

(Bromont) Pas de signe de ralentissement à court terme à Bromont, qui a planifié d’ajouter 2000 portes de plus à son parc immobilier d’ici 2028, notamment avec l’ambitieux Quartier Samara, dont la construction de la première phase doit commencer sous peu.

Gérald Désourdy a acheté son terrain de 40 hectares en 1970. Sur le côté nord de la rivière Yamaska. Un peu à l’est du village de West-Shefford, qui avait fusionné quatre ans plus tôt avec la toute nouvelle ville de Bromont, fondée en 1964 par son père Roland et son oncle Germain. Il aura ainsi mis plus de 40 ans avant de décider d’y lancer un projet immobilier.

« Quand j’étais petite, il n’y avait rien ici, on venait pour faire du ski et de l’équitation, raconte Charlotte Désourdy, fille de Gérald et présidente du projet Quartier Samara. Mais c’est devenu de plus en plus attrayant d’y développer quelque chose. »

  • Les premières maisons unifamiliales seront construites au printemps dans les secteurs les plus recherchés, adossés au grand parc.

    RENDU 3D FOURNI PAR QUARTIER SAMARA

    Les premières maisons unifamiliales seront construites au printemps dans les secteurs les plus recherchés, adossés au grand parc.

  • Plan général du projet Quartier Samara

    RENDU 3D FOURNI PAR QUARTIER SAMARA

    Plan général du projet Quartier Samara

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Une de ses priorités ? Que Bromont se développe de façon harmonieuse. « Ça fait 10 ans qu’on travaille à en faire un quartier de vie, on ne veut absolument pas être le méchant promoteur. »

Bien qu’imposant par son ampleur avec à terme 583 portes, le Quartier Samara consacre 40 % de la superficie à la conservation. Les rives de la rivière Yamaska seront préservées, plusieurs espaces verts seront aménagés, un réseau de sentiers multifonctionnels est déjà en partie mis en place – on souhaite le relier aux quelque 150 kilomètres de sentiers existants à Bromont. Tous les milieux humides seront aussi mis en valeur.

PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

Antoine et Charlotte Désourdy, du projet Quartier Samara

On a souvent eu des discussions intéressantes à ce sujet en famille. On a décidé d’embrasser la conservation des milieux humides pour que les gens puissent en bénéficier.

Charlotte Désourdy, présidente du projet Quartier Samara

On a aussi construit un bassin de sédimentation pour ralentir l’écoulement des eaux de ruissellement avant qu’elles se retrouvent à la rivière. « On a choisi d’y conserver un tampon d’eau en tout temps de façon à en faire un attrait qui fera partie de l’aménagement récréatif du secteur, explique Charlotte Désourdy en nous faisant faire le tour de la propriété en compagnie de son frère Antoine. C’est un ouvrage de génie civil, mais on a décidé d’utiliser la topographie du terrain pour qu’il se marie bien à la nature. »

  • Le bassin de sédimentation du Quartier Samara est entouré d’un sentier multifonctionnel de 800 mètres.

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    Le bassin de sédimentation du Quartier Samara est entouré d’un sentier multifonctionnel de 800 mètres.

  • Le Quartier Samara s’étendra sur un terrain de 40 hectares acheté en 1970 par Gérald Désourdy.

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    Le Quartier Samara s’étendra sur un terrain de 40 hectares acheté en 1970 par Gérald Désourdy.

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Situé à quelques mètres de la rivière qui descend en cascades, le bassin est en effet entouré d’une boucle de 800 mètres aménagée sur les remblais. Elle est notamment reliée au sentier longeant la rivière – il restera en place comme tous les autres tracés par la famille au fil des années en vertu d’un droit acquis.

La construction des premiers bâtiments – deux édifices multilogements situés à l’entrée du quartier, à l’angle de la rue Shefford – devrait commencer en mars. Quant aux maisons unifamiliales, les premières seront construites au printemps dans les secteurs les plus recherchés, adossés au grand parc. On estime leur prix de vente à environ 1 million de dollars, alors que les premiers semi-détachés seront vendus pour un peu plus de 700 000 $.

Bromont, village gaulois

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Le Faubourg 1792 est situé tout près du cœur villageois de Bromont.

Plus modestes, les maisons du secteur Faubourg 1792 sont l’un des projets de la division immobilière de Bromont, montagne d’expériences, dirigée par Charles Désourdy, le frère de Gérald. Les deux premières phases sont terminées alors que la troisième est déjà en branle. L’intérêt des acheteurs semble se maintenir, malgré la hausse des taux d’intérêt qui a causé un ralentissement marqué du marché partout au pays.

« Sur le plan des ventes moyennes, Bromont est un peu comme un village gaulois, estime Charles-André Cantin, courtier et directeur du développement chez Bromont Immobilier. Les délais de vente sont plus longs qu’il y a un an ou deux, mais c’était fou pendant la COVID. On est donc revenu à des niveaux prépandémiques. On a ainsi vendu une soixantaine de terrains pendant nos deux premières phases, il nous reste seulement deux maisons en vente. »

Le nombre de transactions a continué de croître à Bromont, même chose pour les prix. Selon les statistiques de Centris transmises par M. Cantin, on a recensé une centaine de nouvelles inscriptions de plus en 2023 par rapport aux 382 enregistrées l’année précédente, avec des délais de vente moyens de 94 jours, soit un peu plus du double qu’en 2022. Mais le prix des propriétés a continué d’augmenter, notamment celui des maisons unifamiliales, dont le prix médian est passé à 672 500 $, en hausse de quelque 30 000 $.

Cela dit, le marché de l’unifamiliale a été littéralement dopé par les résidences haut de gamme, comme en fait foi le volume de ventes, qui a presque doublé par rapport à l’an dernier, en atteignant un peu plus de 107 millions de dollars.

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Charles-André Cantin, courtier et directeur du développement chez Bromont Immobilier

Avec le télétravail, bien des résidants temporaires à Bromont ont vendu leurs maisons à Montréal ou en banlieue et sont venus s’établir ici. Je l’ai observé beaucoup pendant la COVID, car c’est un environnement parfait pour des retraités actifs.

Charles-André Cantin, courtier et directeur du développement chez Bromont Immobilier

On veut toutefois aussi attirer les jeunes familles, de façon à conserver le profil démographique diversifié de la ville. C’est pourquoi le Quartier Samara réserve déjà une partie de ses terrains à une école, section qui sera maintenue en jachère en attendant de connaître les souhaits définitifs de la Ville et du centre de services scolaire. On compte aussi offrir des services de proximité, sans nuire pour autant au noyau villageois, situé à moins d’un kilomètre du nouveau quartier.

« Au terme du projet, dans 10 ou 15 ans, il va y avoir du monde ici. Cela permet d’envisager l’ouverture d’un petit café, d’un dépanneur. Pas de gros commerces, mais on ne veut pas que les gens aient à se déplacer toujours en auto, affirme Charlotte Désourdy. On veut bonifier l’offre de services aux résidants, parce qu’on aime notre ville, on veut qu’elle soit belle et qu’il fasse bon y vivre. C’était le souhait de mon grand-père, qui a toujours dit qu’à Bromont, on pouvait vivre, s’amuser et travailler à la même place. »

Consultez le site du Quartier Samara

À la croisée des chemins

PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

Francis Dorion, directeur général de la Ville de Bromont

D’ici 2028, Bromont comptera plus de 5000 résidants supplémentaires, une augmentation de plus de 40 % par rapport aux quelque 12 000 personnes qui y habitent actuellement. C’est un défi d’intégrer tout ce beau monde en conservant l’ADN de la ville, et les autorités municipales en sont parfaitement conscientes.

« Que sera Bromont avec 5000 de population supplémentaire ? Avant d’ouvrir encore plus, on va parler avec notre population et on déterminera où on ira, confie Francis Dorion, directeur général de la Ville. On n’a pas de boule de cristal, mais on serait très surpris de revivre un boom comme celui qu’on a connu en 2021 avec 421 nouvelles résidences. »

En discutant avec le dynamique DG, on comprend que la municipalité des Cantons-de-l’Est arrive à la croisée des chemins. D’ailleurs, elle vient d’adopter le 11 décembre dernier son budget pour l’année prochaine, de même qu’un tout nouveau plan quinquennal de développement 2024-2028.

PHOTO CATHERINE LEFEBVRE, ARCHIVES COLLABORATION SPÉCIALE

Améliorer les infrastructures vieillissantes du noyau villageois compte parmi les priorités.

La priorité est de conserver les acquis et d’améliorer ce qui est déjà en place, notamment au noyau villageois, où les infrastructures sont vieillissantes. Bref, certains projets qui ont fait la manchette au cours des dernières années ne figurent plus à l’ordre du jour, notamment ceux qui auraient vu le lotissement des zones situées de part et d’autre de l’autoroute 10 – l’ambitieux projet Pure Bromont et le complexe récréocommercial comprenant un centre de tennis sur le terrain de l’ancien marché aux puces demeurent donc pour l’instant à l’état embryonnaire.

« La Ville avait déjà autorisé près de 2000 portes. On s’est engagés à mettre à niveau les infrastructures pour les accueillir », dit M. Dorion, en confirmant qu’aucun autre projet n’était à l’étude à l’heure actuelle. On va ainsi consacrer plus de 67 millions en cinq ans pour mettre à niveau les conduites d’eau reliant l’usine d’épuration, ce qui permettra de desservir le Quartier Samara et le Faubourg 1792, mais aussi les projets ÔM Bromont et le Quartier Natura, situés dans l’ouest de la municipalité.

Cela pourrait aussi permettre de densifier certains secteurs, car il est actuellement interdit à Bromont de construire des bâtiments de plus de 3 étages et de 16 logements. Une façon de permettre aux promoteurs d’offrir des logements plus abordables, sans compter que Bromont a un parc locatif bien maigre.

« Nous construisons actuellement un six-plex qu’on va conserver pour du locatif à long terme, explique Charles-André Cantin, de Bromont Immobilier. C’est une nouvelle ligne d’affaires que l’on veut développer, car il y a un manque criant de logements à louer à Bromont. Statistiquement, on est au moins 10 % en arrière des autres villes dans la région. On a un protocole d’entente avec la Ville pour les phases 4 et 5 du Faubourg 1792, et on aimerait que la majorité soit des plex. On a donc des discussions en cours avec la Ville en fonction de la révision du plan d’urbanisme. On se dit qu’on peut peut-être faire mieux. »

La Ville est effectivement sensible au fait que son parc immobilier n’est pas des plus accessibles. On espère en ce sens déposer un nouveau plan d’urbanisme dans le premier trimestre de 2024. « On cherche à trouver comment travailler avec les entrepreneurs actuels pour aborder les enjeux de densification et de logement abordable », reconnaît Francis Dorion.

On ne deviendra pas le nouveau Brossard avec son projet de centre-ville autour du REM, mais on peut revoir un peu nos façons de faire, tout en gardant l’ADN de Bromont.

Francis Dorion, directeur général de la Ville de Bromont

Milieux naturels préservés

PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

Près de 40 % du Quartier Samara sera constitué en zone naturelle protégée, notamment près des rives de la rivière Yamaska.

Les décisions seront ainsi prises en fonction des deux priorités ciblées à la Ville, soit la préservation des milieux naturels et la capacité des infrastructures. Bromont s’est notamment doté d’une politique de l’arbre, en plus d’avoir adopté une réglementation qui limite la construction dans les zones à fortes pentes. On s’engage aussi à fixer rapidement une cible de conservation du territoire, sur le modèle de l’engagement pris lors de la COP15 par la Communauté métropolitaine de Montréal de protéger 30 % de milieux naturels d’ici 2030. « Peu de municipalités peuvent atteindre cette cible, car plusieurs ont des terres agricoles, relativise Francis Cantin. D’autres comme nous peuvent le faire, mais il faut protéger le bon environnement. Une chose est sûre, on ne descendra pas en bas de 20 %. »

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE

Le mont Bernard accueille les adeptes de vélo de montagne.

Quant aux infrastructures, le directeur général soutient que sa ville a des choix à faire, malgré le fait qu’elle compte sur une richesse foncière de plus de 4 milliards de dollars, un niveau très élevé en partie attribuable à son important parc scientifique. « Nos coûts explosent, mais on va maintenir nos actifs, on va s’occuper de ça, soutient M. Dorion. On va maintenir notre réseau de 150 kilomètres de vélo. On a un gros terrain de jeu et on veut le conserver. Notre population est très exigeante par rapport à la prestation de services, on ne veut pas la décevoir.

« Tout ça va nécessiter davantage d’investissements, mais il y a des limites à ce qu’on peut aller puiser dans les poches des contribuables, reconnaît M. Dorion. Est-ce que la communauté et les citoyens sont prêts à aller là ? Ça, c’est la question. »

Consultez le site de la Ville de Bromont
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  • 37,9 %
    Proportion de ménages qui ont un revenu après impôts au-delà de 100 000 $
    source : Statistique Canada
    24 %
    Proportion de locataires à Bromont. La moyenne de la MRC de Brome-Missisquoi est de 31,1 %, la moyenne provinciale s’élève à 39,9 %.
    Source : Statistique Canada