Une histoire sans aucune fausse note que celle de Michel Yergeau et de son triplex, dans l'arrondissement du Plateau-Mont-Royal. «J'ai été chanceux sur toute la ligne, relate l'avocat, qui dirige un bureau à quelques minutes de marche de son domicile: un entrepreneur général compétent et consciencieux, des responsables d'arrondissement efficaces, des subventions sans retard.»

Me Yergeau habite les deux étages supérieurs de l'édifice depuis 20 ans. «La devanture avait été suffisamment protégée pour que sa vie en soit prolongée, mais il y a deux ans, j'ai constaté qu'elle avait besoin de travaux majeurs si on voulait la sauver», relate M. Yergeau.

 

Avec l'accord des deux copropriétaires, Yvon Truchon et Louis-Georges Lacombe, Michel Yergeau s'est chargé du chantier, de la documentation à l'embauche des artisans, en passant par les demandes de permis. Le triplex figure parmi les cinq maisons coup de coeur de l'Opération patrimoine architectural de Montréal 2009.

Copier les ouvrages de bois

Le fronton paraissait bien, vu d'en bas, mais le bois en était très altéré. Des artisans l'ont démantelé, autant les morceaux de surface que l'essentiel de sa structure, pour refaire complètement les pièces en atelier. Des éléments de la charpente du toit mansardé, arrondis en arc de cercle, ont eux aussi été reconstitués en copies conformes.

Tout le bois du balcon - corniches, colonnes faites au tour, moulures - a été reproduit, à part une ou deux «dentelles» encore intactes, remises à neuf par un décapage en règle. La maçonnerie de briques a été restaurée, et l'ardoise du toit complètement remplacée.

Cuivre étamé

À l'origine, le métal des balcons et du toit était de simple tôle grise. Les experts de l'arrondissement ont demandé à ce qu'il soit remplacé par du cuivre étamé, c'est-à-dire traité pour ne pas verdir sous l'effet de l'oxydation. L'apparence est à s'y méprendre, sauf que les pièces dureront beaucoup plus longtemps.

Les portes de bois et leurs cadres présentent la même fraîcheur qu'il y a 110 ans. Mais là encore, la technologie moderne apporte son concours: «Les portes ont une capacité d'isolation bien supérieure à celles d'origine», soutient le propriétaire.

Que de travail cependant, pour rendre à la maison le visage de sa jeunesse! L'entrepreneur général François Paquet, de l'entreprise Patrimoine Urbain, y a passé quatre mois de la belle saison 2008, à travailler parfois six jours par semaine, et a tenu à faire quelques ajustements .

Le programme municipal d'aide à la rénovation des maisons anciennes a contribué pour environ 50 000$ à cette restauration, sur un coût total des travaux estimé à 175 000$.

À l'intérieur, par contraste, on baigne dans le style contemporain dès la contre-porte, en verre givré. «Il n'y avait plus rien de patrimonial à sauver à l'intérieur, comme c'est souvent le cas sur le Plateau», commente Me Yergeau. Tout y est lignes simples, blancheur, vitres, inox et dépouillement. Le décor idéal pour cet amateur d'art contemporain.