Si l'achat initial de la terre a été fait par Pierre Vinet, tôt accompagné de Li Harnois, dans une intention écologique et agricole, le projet du Hameau de la Colline du chêne a été élaboré vec une autre famille fondatrice. «Les deux familles subséquentes, sans oublier tout ceux que nous avons rencontrés au long du processus, ont enrichi notre vision», souligne le couple.

Après deux années de réflexion, de discussions et de démarches, le hameau naît officiellement le 16 juin 2004, avec l'autorisation de la Ville de Bromont et une déclaration de copropriété divise. Sa vocation: explorer comment le modèle d'une petite collectivité organisée en hameau agricole peut apporter à une municipalité, favoriser une agriculture à l'échelle humaine et mieux préserver l'environnement.«Sur le plan de l'empreinte écologique, leur projet n'a de sens qu'avec une démarche agricole, commente l'architecte André Bourassa. Car ils sont loin des centres, avec une faible densité de population. Mais ils apportent une contribution au milieu rural.»

En zone urbaine

La terre, achetée en 2002, appartient à un secteur de Bromont passé «du vert au blanc». Autrefois agricole mais «dézoné», il fait désormais partie du périmètre d'urbanisation. Paradoxalement, le hameau lui rend délibérément sa vocation fermière. « Nous avons à coeur l'accessibilité à la terre, explique Pierre Vinet. On sait combien c'est difficile pour la relève agricole d'avoir les moyens financiers d'acquérir une ferme ou une terre.»

Ce renoncement à la spéculation foncière pour préserver le paysage et l'agriculture a eu de quoi surprendre les mentalités de l'entourage. Mais pour la Ville de Bromont, qui veut mettre en valeur l'aspect champêtre de son territoire, particulièrement dans ce secteur, le projet de hameau écologique tombait bien. «Il n'a que très peu d'impact sur le paysage, fait valoir Réal Girard, directeur de l'urbanisme à Bromont. Le chemin du Lac-Gale est qualifié de «panoramique». On doit y maintenir le milieu naturel.»

Légumes et agneaux au printemps

C'est ainsi qu'en plus du jardin collectif, auquel chacun des quatre ménages a la responsabilité de contribuer, le hameau a pour mission de faire revivre sous une nouvelle forme l'ancienne ferme familiale. La Ferme de la Colline du chêne, coopérative de solidarité, a été constituée le 29 avril 2009. Elle occupe 25 hectares. «On devrait pouvoir produire 25 paniers d'épicerie par semaine l'été prochain, des légumes essentiellement mais aussi des oeufs, des poulets et quelques agneaux », relate Li. Nous sommes inscrits comme ferme en démarrage au programme d'agriculture soutenue par la communauté, sous l'égide d'Équiterre.»

Cependant, la Ferme de la Colline du chêne est à la recherche de partenaires agricoles qui ont de l'expérience et qui cherchent une terre à un coût raisonnable. «Ils feront sur notre terre la culture de leur choix : légumes, arbres fruitiers, plantes médicinales... Ils se seront ainsi créé leur emploi et pourront en vivre décemment», explique Li Harnois.

Aspect humanitaire

Après quelques années d'expérience, quand la ferme sera bien rodée, les résidents du hameau de la Colline du chêne veulent y ajouter un aspect humanitaire, par exemple intégrer des personnes handicapées, accueillir des gens qui ont besoin de passer quelque temps à la campagne, etc.

Quant à la préservation du paysage, la charte du hameau prévoit que tous les résidents doivent être d'accord avant de construire un édifice sur l'aire commune. «On ne peut pas connaître les besoins du futur, soutient Li Harnois. Ce sera à chaque génération de voir.»

Pas tout à fait en condos...

Me Christine Gagnon a choisi la copropriété divise comme contrat de propriété pour les membres du hameau, «car c'est un régime juridique bien défini, ce qui facilite les choses au moment du financement.» C'est une convention atypique en milieu rural, fait remarquer cette notaire associée chez Côté, Taschereau, Samson, Demers, également professeur associé à l'Université de Montréal.

Il a fallu innover radicalement par rapport aux contrats de condos ordinaires. «Habituellement, la partie commune est passive et pas si grande: elle couvre les corridors, une salle, un court de tennis... Mais dans le cas de la Colline du chêne, c'est une très grande superficie et les propriétaires ont pour responsabilité d'y faire de l'agriculture. De plus, des règlements relatifs aux espaces privés garantissent la vocation écologique du projet: maison peu énergivore, pas de piscine creusée, etc. «Je suis fière de ce contrat-là, rapporte Me Gagnon. Les quatre lots ont été vendus et ont obtenu du financement.»