Plusieurs enfants ont été sortis vivants des décombres vendredi en Turquie et en Syrie, cinq jours après le séisme qui a fait plus de 23 000 morts, conduisant le régime de Damas à accepter l’envoi de l’aide internationale vers les zones tenues par les rebelles à partir des régions qu’il contrôle.

Le Haut Commissaire de l’ONU aux droits de l’Homme a demandé le même jour « un cessez-le-feu immédiat » en Syrie pour y faciliter le soutien aux populations sinistrées.

Car si l’aide humanitaire afflue de l’étranger en Turquie — l’Allemagne a notamment annoncé vendredi qu’elle envoyait 90 tonnes de matériel par avion —, l’accès à la Syrie en guerre, dont le régime est sous le coup de sanctions internationales, s’avère plus compliqué.

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Des survivants se réchauffent dans un camp à Hatay, en Turquie.

Actuellement, la quasi-totalité des biens fournis dans ce cadre aux zones rebelles transite, au compte-gouttes, à partir de la Turquie par le point de passage de Bab al-Hawa, le seul actuellement garanti par les Nations Unies.

« Le Conseil des ministres a accepté l’acheminement des aides humanitaires à l’ensemble » du territoire syrien, « dont les zones hors du contrôle de l’État », a annoncé le gouvernement syrien.

Il a précisé que leur distribution devrait être « supervisée par le Comité international de la Croix-Rouge et le Croissant-Rouge syrien », avec l’appui de l’ONU.

À Damas, un représentant du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR), Sivanka Dhanapala, a averti que « jusqu’à 5,3 millions de personnes en Syrie pourraient se retrouver sans endroit où vivre à cause du séisme ».

Le Programme alimentaire mondial (PAM), agence spécialisée des Nations unies, a pour sa part réclamé 77 millions de dollars en vue de fournir des vivres à 874 000 personnes touchées par le séisme en Turquie et en Syrie.

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Une femme marche devant un immeuble détruit à Hatay, en Turquie.

Un garçon de six ans

De part et d’autre de la frontière, des milliers d’habitations sont détruites et les secouristes redoublent d’efforts pour rechercher des rescapés, même si la fenêtre cruciale des 72 premières heures pour retrouver des survivants s’est refermée.

Pourtant, vendredi, un garçon de six ans, Moussa Hmeidi, a été extrait en vie au milieu des acclamations des décombres, sous les acclamations, dans une localité du nord-ouest de la Syrie, Jandairis, a constaté un journaliste de l’AFP. Il était en état de choc et blessé au visage.

Dans le sud de la Turquie, à Antakya, « à la 105e heure » après le tremblement de terre, les secouristes ont sorti vivants un nourrisson de 18 mois, Yusuf Huseyin, des débris d’un immeuble, puis, 20 minutes plus tard, son frère Muhammed Huseyin, a raconté la chaîne de télévision NTV.

Deux heures auparavant, Zeynep Ela Parlak, une fillette de trois ans, avait déjà été secourue dans cette ville anéantie par le séisme.

Dans la région de Gaziantep (Sud-Est), des militaires espagnols ont par ailleurs sauvé vendredi après-midi une mère et ses deux enfants des décombres.

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Des secouristes aident Ibrahim Kantrji, 20 ans, retrouvé à Kahramanmaras, en Turquie.

À Nurdagi, dans cette même province, Zahide Kaya, enceinte de six mois, a été extraite vivante après quelque 115 heures passées sous un amas de ruines, selon l’agence Anadolu. Une heure plus tôt, sa fille Kubra, âgée de six ans, avait été sauvée elle aussi.

La situation, aggravée par un froid glacial, est telle que le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), en lutte armée contre l’armée turque depuis 1984, a décidé vendredi de « ne mener aucune opération tant que l’État turc ne nous attaque pas », a souligné Cemil Bayik, un responsable cité par l’agence Firat, proche du PKK. « Des milliers des nôtres sont encore sous les décombres. […] Tout le monde se doit de mobiliser tous ses moyens ».

« Pas aussi vite qu’espéré »

Nombre de survivants critiquent la lenteur de la réaction gouvernementale. « Je n’ai vu personne avant 14 h le deuxième jour du séisme », soit 34 heures après la première secousse, accuse Mehmet Yildirim. « Pas d’État, pas de police, pas de soldats. Honte à vous ! Vous nous avez laissés livrés à nous-mêmes ! »

Le président turc Recep Tayyip Erdogan a esquissé une forme de mea culpa vendredi. « Les destructions ont affecté tellement d’immeubles […] que, malheureusement, nous n’avons pas pu conduire nos interventions aussi vite qu’espéré », a-t-il reconnu pendant une visite à Adiyaman, une ville méridionale très affectée par la catastrophe.

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Le président Recep Tayyip Erdogan (au centre) en visite à Adiyaman, vendredi

À Chypre, les premiers corps des victimes chypriotes-turques dégagés des décombres après le tremblement de terre en Turquie ont été rapatriés sur l’île vendredi, dont ceux de sept adolescents volleyeurs qui participaient à un tournoi.

L’hôtel dans lequel le groupe (24 jeunes âgés de 11 à 14 ans, quatre de leurs professeurs, un entraîneur et 10 de leurs parents) séjournait à Adiyaman s’est totalement effondré. « Les corps de 19 jeunes [du groupe] ont été découverts sous les décombres », a affirmé NTV.

D’après les derniers bilans officiels, le tremblement de terre, d’une magnitude de 7,8, suivi d’une centaine de secousses, a fait au moins 23 871 morts : 20 318 en Turquie et 3553 en Syrie.

L’OMS estime que 23 millions de personnes sont « potentiellement exposées, dont environ cinq millions de personnes vulnérables » et redoute une crise sanitaire majeure qui causerait plus de dommages que le séisme.

Les organisations humanitaires s’inquiètent particulièrement de la propagation du choléra, qui est réapparu en Syrie.

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Des déchets fumants jonchent une rue à Hatay, en Turquie.

Par ailleurs, le mouvement olympique va débloquer un million de dollars en urgence pour aider les sportifs, réfugiés et personnes déplacées dans les régions touchées par le séisme de lundi en Turquie et Syrie, a annoncé le CIO.