(Montréal) L’automatisation prend du galon dans le secteur de l’alimentation et du commerce de détail au Canada. Si celle-ci est encore marginale au Québec de l’avis de François Meunier, vice-président aux affaires publiques et gouvernementales à l’Association Restauration Québec (ARQ), elle fait son chemin en Ontario.

PizzaForno a vu ses ventes bondir de 400 % par rapport à pareille date l’an dernier selon ce que rapporte le président et cofondateur, Les Tomlin. Son entreprise de pizzas artisanales, tout droit sorties d’un four automatique, cartonne.

« La pandémie est venue accélérer la tendance de manière exponentielle », affirme-t-il. « Dès avril, j’ai remarqué que les gens voulaient manger une pizza de qualité, mais désiraient aussi limiter leur contact. Ils cherchaient des options. »

C’est là que les ventes se sont mises à grimper en flèche. Un beau concours de circonstances pour celui qui visait une croissance pour 2020 sans avoir pu anticiper la pandémie.

L’entrepreneur a d’abord déployé sa première machine dans le village touristique de Tobermory, situé sur la péninsule Bruce, près du parc national du même nom.

Deux ans plus tard, PizzaForno compte maintenant 24 points de vente dans la grande région de Toronto et à Sudbury, entre autres.

M. Les et son associé ont 88 autres demandes de franchise dans leur carnet de commandes.

« C’est attrayant pour quelqu’un qui cherche à démarrer une entreprise, explique-t-il. Il y a très peu de perte, la machine autonome fait la pizza à la demande. Nul besoin de payer un employé. »

La pizza est servie en trois minutes et la machine est disponible 24 heures sur 24. Certaines des stations ont pignon sur rue et d’autres sont situés dans des dépanneurs ou autres types de commerces.

Et si c’était une mode ? Après la pandémie, les gens vont vouloir retrouver l’ambiance animée des salles à manger, non ?

« Évidemment, reconnait M. Les. Rien ne va remplacer l’expérience authentique d’aller souper au restaurant. »

Il est toutefois d’avis que le marché va se diversifier et qu’une partie de la population va continuer de vouloir des produits impliquant le moins de manipulation humaine possible.

Questionnée sur l’état de l’industrie dans un monde post-pandémie, la réponse de Dana McCauley, professeure à l’université Guelph en Ontario, fait écho à celle de M. Les : « ce sera un modèle hybride ».

« Il y aura toujours une part de marché plus grande pour les repas faits à la main et les produits cuisinés de façon artisanale. Et je pense que l’engouement du “sans contact” est tout à fait logique en ce moment étant donnée la crise sanitaire. Il y a aussi l’aspect pratique de ces machines libre-service, mais je pense que la connexion humaine sera toujours très importante dans le milieu de la restauration et du service à la clientèle. »

L’experte en tendance agroalimentaire croit que les tâches de production et de préparation des aliments seront de plus en plus automatisées. Toutefois même dans les restaurants où l’automatisation occupe une large place, on s’assure de garder une « touche humaine », rappelle-t-elle.

Elle cite en exemple, le restaurant Spyce soutenu par le célèbre chef français Daniel Boulud.

Situé à Boston, cette cuisine entièrement automatisée, et développée par des diplômés du MIT, a une équipe dédiée au service à la clientèle.

Que ce soit pour aider les clients à faire un choix sur le panneau du menu interactif ou pour personnaliser un plat et y ajouter quelques garnitures, rien ne remplace le vrai contact, selon Mme McCauley.

Au Québec, Couche-Tard a ouvert un dépanneur autonome jeudi en partenariat avec l’université McGill. Ce magasin-laboratoire, situé sur le campus universitaire, est l’un des premiers du genre qui est accessible au public au Canada.

Il servira à tester des projets innovateurs comme l’achat de produits « sans contact ».

L’équipe de recherche entend améliorer le processus d’achats, notamment, à l’aide de la réalité virtuelle. Voilà pour le plus long terme.

Entretemps, « on veut encourager les personnes à acheter des aliments plus sains », fait valoir le professeur Maxime Cohen de la Faculté de gestion Desautels à McGill.

« On veut disperser les fruits, les légumes et les collations saines dans plusieurs endroits dans le magasin pour qu’ils soient plus faciles d’accès et placer les aliments à plus haute valeur calorique au bas des étagères », donne-t-il en exemple.

Cet article a été produit avec l’aide financière des Bourses Facebook et La Presse Canadienne pour les nouvelles.