« Bazarette » est un mot, surtout utilisé en France, qui désigne un petit magasin proposant un large assortiment de produits à une clientèle de proximité. Un joli nom qui sied bien à ce bar à vin ouvert l’automne dernier en plein cœur du centre-ville, mais où on se sent comme dans un établissement de quartier.

L’offre alimentaire ne manque pas dans le secteur, mais les restaurateurs voient souvent grand lorsqu’il est temps d’y installer leurs quartiers. L’adresse que nous avons visitée pour notre critique cette semaine fait tout le contraire : Bazarette se veut un bar à vin accessible et de proximité, chaleureux et animé, où il fait bon s’arrêter pour un verre ou deux et, pourquoi pas, manger une bouchée pendant qu’on y est.

C’est exactement ce qui nous a plu dans ce projet mené conjointement par deux groupes qui, pourtant, sont plutôt habitués aux projets d’envergure : le Groupe CH et Recipe, qui exploite notamment St-Hubert, Bier Mark et l’immense Taverne 1909.

À l’origine, Bazarette était d’ailleurs le troisième étage de la Taverne 1909, jouxtant le Centre Bell. Mais, dès le départ, l’endroit se démarquait par un design différent — plutôt brasserie que taverne —, alors que ses grandes fenêtres, qui donnent directement sur le couloir piétonnier parallèle à la rue de la Montagne, et par lequel on accède à la gare Windsor, laissent filtrer une douce lumière.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

Le design, moderne, sans trop en faire, marie matériaux industriels et naturels.

Ce joli espace méritait mieux. Il a donc été décidé de le réinventer complètement. Le mandat a été donné à une équipe de jeunes loups travaillant tous à la Taverne 1909 : le sommelier Stéphane Letellier, la directrice générale Charlie April et le chef exécutif Adam Martin (Miel, Chez l’Épicier).

Du beau et du bon

Ces trois jeunes professionnels, qui n’en sont pas à leurs premières armes dans le milieu de la restauration, ont visé juste avec Bazarette. Les écrans ont tous été enlevés, l’ambiance sportive, évacuée, le design, revisité. Le résultat est moderne sans trop en faire, mariant matériaux industriels et naturels comme le bois et le cuir. 

L’offre, autant à boire qu’à manger, est bien pensée et inspirée, tout en restant ancrée dans une certaine simplicité. Le jour, l’endroit est plutôt un café ; à l’apéro jusqu’à tard, il se transforme en bar à vin.

Presque tout, au cours de notre passage, un samedi soir frisquet où la moitié du restaurant était réservée par un groupe, nous a plu. D’abord, les cocktails, tout en finesse et offrant une belle inventivité, nous ont conquis. Très bien balancé, notre Tommy C, alliant gin Circa, vermouth blanc, jus de céleri et citron additionnés d’un peu d’eau pétillante, offrait une rafraîchissante introduction à notre soirée. Notre invité, lui, s’est régalé du Sokanon, avec vermouth de miel bio, gin Bombay, Cynar et citron flambé à la menthe.

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La pieuvre à la plancha : une de nos assiettes favorites

La carte à boire, bien montée et assez vaste, offre de nombreux choix de bières, dont 16 en fût et certaines raretés en bouteille (et non, pas que des bières distribuées par Molson !). La carte des vins, elle, se concentre sur les jus nature, oui, mais la sélection offre un haut degré de buvabilité, une excellente façon de s’initier à ce type de pinard, de plus en plus populaire, mais envers lequel plusieurs préjugés sont entretenus. Par exemple, notre vin « orange », le Blanc de Noir du Domaine Tarala, en Grèce, était tout en subtilité, à la fois rafraîchissant et minéral, avec juste ce qu’il faut de corps pour bien accompagner notre repas.

La carte est composée d’une douzaine de petits plats, façon entrée, qu’il fait bon partager. Le chef puise son inspiration dans plusieurs cultures culinaires de façon décomplexée, offrant taco con mole, pieuvre à la plancha ou encore gnocchis parisiens. C’est invitant et satisfaisant, et la plupart des assiettes misent sur la fraîcheur.

Au total, nous avons dégusté six plats et un dessert, ce qui s’est avéré un peu trop copieux. Ce qui nous a le plus conquis ? Le plat de courgette, étonnant, très frais, avec le légume présenté façon spirale, accompagné de crème citronnée et parsemé de graines de citrouille et de morceaux de halloumi fumé frais (non grillé). Même notre invité, pas trop friand de courgette, s’est régalé.

La pieuvre à la plancha, bien grillée et goûteuse, déposée sur une légère mousseline de pommes de terre rattes — une bonne idée pour alléger le plat —, sa salsa grillée et son persil brûlé, a aussi été un succès, de même que le plat de morue d’Islande, plutôt du côté réconfortant, avec son couscous israélien baignant dans un bouillon d’épices bien parfumé, parsemé de pointes de yogourt de brebis.

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La carte à boire du Bazarette est convaincante et inspirante.

Par contre, grosse déception pour le plat de carottes nantaises, annoncées avec quinoa frit, labneh, cumin et sumac. Aux jolies carottes encore croquantes et légèrement poêlées déposées sur un trait de fromage crémeux frais que nous imaginions s’est substitué dans la réalité une assiette incongrue où trônait une boule blanchâtre pas très appétissante, mélange de tronçons grossiers de carottes fades, qui semblaient avoir été simplement bouillies, mélangées avec le labneh et le quinoa frit. Un plat raté, sans envergure, que nous avons vite laissé de côté pour nous concentrer sur le beau et le bon.

Notre verdict

On paie : Des prix très abordables pour ce secteur, soit de 11 $ à 18 $ l’assiette.

On boit : Une jolie carte à boire bien travaillée et variée, proposant des cocktails inventifs et bien balancés, ainsi qu’une très belle sélection de bières et de vins. En journée, le café de Larue & Fils est à l’honneur.

On se sent : Immédiatement bien accueillis par le personnel jeune et sympathique, à la fois professionnel et juste assez décontracté, dans ce bel espace qui compte un bar en ovale et de jolies banquettes en cuir.

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Réconfortant, le plat de morue d’Islande était accompagné de couscous israélien et de bouillon aux épices parfumé.

On aime : La carte à boire, le menu inspiré et cosmopolite, l’ambiance, le décor, l’idée du « bar de quartier » au centre-ville.

On aime moins : Un plat raté, certains moins mémorables. À noter que l’endroit est un peu caché ; l’entrée ne se trouve par sur l’avenue des Canadiens-de-Montréal, mais bien dans le couloir bétonné longeant l’avenue de la Montagne.

On y retourne ? Certainement !

Bazarette. 1280, avenue des Canadiens-de-Montréal, Montréal, 514 929-9463

> Consultez la page du restaurant : https://www.facebook.com/bazarettevincafe/