(Wellington) Matt McLaughlin a forcément le sourire à l’heure de tirer la première bière en deux mois dans son pub de Wellington. Mais sa satisfaction ne cache pas une vraie inquiétude pour l’avenir de son établissement, loin d’être tiré d’affaire malgré le déconfinement.

Les bars néo-zélandais ont rouvert jeudi, dans la foulée des commerces et des écoles, après la longue fermeture débutée fin mars pour lutter contre le nouveau coronavirus.

Matt McLaughlin ne peut que s’en féliciter, mais, prévient-il, pubs et discothèques auront du mal à s’adapter aux consignes de distanciation sociale désormais en vigueur, et à l’obligation de noter les contacts de leurs clients.

Pas sûr, ajoute-t-il, que Wellington parvienne à conserver cette vie nocturne animée qui lui avait valu d’être surnommée « la petite capitale la plus cool du monde ».

« Il n’y a pas de spectacle, pas de théâtre, pas de cinéma, pas de matchs (de l’équipe nationale de rugby) des All Black, et l’hiver va arriver. Alors ça va être très dur pour notre secteur », explique-t-il dans son Panhead Bar du centre de Wellington.

Une inquiétude partagée par Kevin McAree, gérant du bar Tasting Room.

« Il faut être réaliste et reconnaître que les six prochains mois ne seront pas bons », lâche-t-il.

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Kevin McAree, gérant et copropriétaire du bar Tasting Room est inquiet. « Il faut être réaliste et reconnaître que les six prochains mois ne seront pas bons », lâche-t-il.

« Les habitudes des gens ont changé (pendant le confinement). Certains se sont habitués à ouvrir une bonne bouteille à la maison, à prendre de la nourriture à emporter. »

« Mais un jour, ils voudront à nouveau sortir et s’amuser », espère-t-il.

« Après l’effort, le réconfort »

Les bars pouvaient légalement rouvrir jeudi dès 8 h. « Mais les gens ne sont pas à fond sur la bière à cette heure-là », sourit Matt McLaughlin.

Et la plupart ont misé sur les pauses déjeuner des employés en n’ouvrant qu’à 11 h 30. Mais là encore, il n’y a pas foule dans le centre de Wellington, la faute au télétravail.

À la Tasting Room, Jim Hall a fait dans le classique, avec une pinte de bière Guinness pour célébrer comme il se doit l’évènement.

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À la Tasting Room, Jim Hall a fait dans le classique, avec une pinte de bière Guinness pour célébrer comme il se doit l’évènement.

« En général, je ne bois jamais de bière à midi, mais ça fait du bien, ce jour a un goût de retour à la normale », dit-il à l’AFP.

Ce septuagénaire avait déjà profité de l’assouplissement des restrictions sur les déplacements pour prendre un vol depuis Auckland, afin d’aller voir ses petits-enfants dans la capitale.

« Après l’effort, le réconfort », dit-il entre deux gorgées de stout, en repensant aux journées confinées.

La Nouvelle-Zélande, qui compte cinq millions d’habitants, n’a enregistré que 21 décès liés au nouveau coronavirus qui a contaminé environ 1500 personnes. Des chiffres relativement bas, qui s’expliquent notamment par un confinement ordonné très tôt.

Celui-ci a pris fin, mais des restrictions demeurent. Les bars ne doivent pas accueillir plus de 100 personnes, doivent imposer des mesures de distanciation sociale et enregistrer les contacts des clients pour pouvoir les retrouver dans l’hypothèse d’une flambée des contaminations.

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Les bars ne doivent pas accueillir plus de 100 personnes, doivent imposer des mesures de distanciation sociale et enregistrer les contacts des clients pour pouvoir les retrouver dans l’hypothèse d’une flambée des contaminations.

Les pubs accueillant des clients plus âgés comme M. Hall en ressentiront certains effets, explique M. McLaughlin, mais à l’en croire ce sont les lieux de nuit fréquentés par les plus jeunes qui souffriront le plus.

Premier vrai test : ce week-end à Courtenay Place, le quartier le plus festif de la capitale.

Anticipant une forte affluence, et des files d’attente jusque sur la chaussée, la municipalité fermera vendredi soir et samedi soir la circulation aux voitures.

Mais M. McLaughlin redoute, lui, qu’il n’y ait pas foule, car les gens sont encore réticents à l’idée de se sortir à cause de l’épidémie.

Au-delà, impossible de dire quand et comment la vie nocturne renaîtra. « C’est au doigt mouillé pour le moment. On ne peut qu’attendre de voir », dit-il.