Le registre des bières fumées québécoises est de plus en plus vaste. Du subtil parfum d’un feu de camp à l’expérience « fumoir » totale, les microbrasseries en proposent pour tous les goûts cet été.

Il existe plusieurs styles traditionnels de bières fumées, dont la plus connue est sans doute la rauchbier allemande. La majorité des boucanées québécoises sont calquées sur cette lager brassée avec un malt séché sur bois de hêtre. Pour l’été, on voudra aussi découvrir la Grätzer, une bière légèrement sure et houblonnée au goût de fumée plus délicat.

Grätzer est le nom allemand de la Grodziskie, un style de bière traditionnel polonais qui était disparu du marché dans les années 90, lorsque la dernière brasserie à en produire avait cessé ses activités. Par chance, un brasseur avait gardé une souche de la levure d’origine et le style a pu faire un retour il y a une dizaine d’années, nous apprend Martin Thibault, auteur de nombreux articles et livres sur la bière, dans un texte publié sur son blogue il y a un mois et demi.

Visite de la Brasserie Harricana

À la Brasserie Harricana, Francis Richer a produit plusieurs versions de cette bière de blé légèrement fumé sur bois de chêne : nature (la 99), aux pommes (Grätzer du verger), au moût de raisin (Grätzer du vignoble), à la salicorne et à la dulse (Grätzer de mer).

« C’est un style que j’aime parce qu’il permet d’apprivoiser la bière fumée, nous a expliqué le brasseur, rencontré il y a deux semaines. Les gens ont souvent peur de la fumée. Ils pensent que ça va être lourd et goûter le bacon. »

Les Grätzer Harricana sont rafraîchissantes et légères, avec leurs 3 à 4,6 % d’alcool par volume (à l’exception de la version marine, qui est à 6,3 %). La Lichtenhainer est aussi une bière pâle et surette brassée avec un malt (d’orge, celui-là) légèrement fumé. On peut aussi en boire chez Harricana, en fût.

La majorité des autres bières fumées sur le marché québécois se rapprochent davantage du bacon et du jambon fumé que de l’évocation du feu de camp au bord du fleuve. Ce sont souvent des liqueurs ambrées, brunes, voire noires, puisque les saveurs maltées, grillées et caramélisées se marient bien à la fumée.

C’est la fumée du bois de hêtre qui confère ses notes de porc boucané à la rauchbier, spécialité de la taverne Schlenkerla, à Bamberg, en Allemagne. Dans sa version la plus emblématique, en vente à la SAQ, la rauchbier s’adresse aux amateurs de fumée avertis.

La Stjørdalsøl norvégienne (brassée une fois par Le Temps d’une pinte, en suivant les bons conseils de Martin Thibault) n’est pas non plus pour les craintifs de la boucane !

Si vous trouvez des bières à base de malt séché à la tourbe (comme les fameux scotches d’Islay, en Écosse), ou affinées dans des fûts de whisky tourbé, elles se situeront dans un registre plus médicinal. On trouve aussi quelques vins d’orge au malt fumé, comme ceux de Pit Caribou et de À l’abri de la tempête.

Quatre bières fumées québécoises à goûter

La Charbonnière de Dieu du ciel !

Inspirée de la tradition des rauchbiers, la Charbonnière est une ale ambrée aux notes boucanées bien présentes.

5,4 % alc./vol., 375 ml, prix payé : 3 $

Gaspésienne fumée de Pit Caribou (série Étoile du brasseur)

Assemblage à parts égales d’une base de bière rousse fumée avec la classique Gaspésienne No.13 (style porter), cette boisson bien noire aux notes torréfiées représente bien la catégorie « tourbée ». Le malt utilisé dans la portion rousse de la bière a été fumé à la tourbe, ce qui confère à l’ensemble des notes médicinales bien perceptibles, mais quand même plus subtiles que dans un whisky Supernova d’Ardbeg !

6,2 % alc./vol., 500 ml, prix payé : 7,25 $

Grätzer de mer de la Brasserie Harricana

Pour amateurs de bonbons surs ! La version marine de la Grätzer est considérablement plus acidulée que celles aux pommes et au moût de raisin. La fumée est légère et la bière, bien, bien sèche.

6,3 % alc./vol., 500 ml, prix payé : 9 $

Apache de Tête d’allumette

Les notes fumées s’y trouvent, sans être aussi prononcées que dans une rauchbier. Elles n’enterrent pas les arômes de pêche et d’abricot également présents, se mariant plutôt bien avec une certaine amertume.

5,5 % alc./vol., cruchon de 1 L, prix payé : 17,80 $ (incluant 4 $ de consigne de bouteille)