(Paris) « Longtemps à la traîne, Paris accueille enfin de bons coffee shops », vantait tout récemment un article de Vogue France. Certes, Paris est davantage reconnu pour être la capitale de la mode que celle du café de spécialité. Or, les coffee shops – comme on le dit là-bas à l’américaine – se multiplient.

C’était manifeste, avons-nous constaté lors d’un séjour récent à Paris. Une forte tendance est d’offrir du « café de barista ».

PHOTO FOURNIE PAR LOMI CAFÉ

Aleaume Paturle est l’un des pionniers de la torréfaction artisanale de café à Paris.

« On voit des coffee shops pousser comme des champignons », confirme Aleaume Paturle, fondateur de Café Lomi, une entreprise artisanale de torréfaction de café de spécialité qui existe depuis près de 15 ans, soit une époque où la troisième vague commençait à déferler en Amérique du Nord, mais pas en France.

Les débuts ont été durs. « Nous avions trois clients et pas de volume, se remémore-t-il. Le terme barista n’existait pas. Le café n’intéressait ni le chef ni le sommelier. »

Lomi s’est fait connaître grâce à des concours. Aujourd’hui, l’entreprise compte une vingtaine d’employés et même des installations dans la Drôme, dans le sud de la France. Lomi a aussi toujours son coffee shop dans le 18arrondissement. Sans compter un centre de formation.

« Une expérience »

PHOTO ÉMILIE CÔTÉ, LA PRESSE

Aube est à la fois un café et un restaurant.

La tendance des coffee shops – le terme « troisième vague » est très peu employé en France – est telle que de nombreux nouveaux repaires parisiens s’affichent comme un café, bien qu’on y offre aussi souvent un menu complet et une carte des vins. On vend une « expérience », souligne Aleaume Paturle. Une « expérience » bien différente des bistros typiques ou encore du classique Café de Flore. Une expérience qui rappelle celle du Butterblume ou du Pastel Rita, par exemple, à Montréal.

On partage, rue Charonne, dans le 11arrondissement, se décrit comme une « cantine caféinée ». Ses portes ouvrent dès 8 h 30 et attirent de nombreux habitués. « La cantine, c’est l’idée qu’on peut y venir tous les jours, et c’est l’esprit de quartier », explique la propriétaire, Marion Stephan.

Marion a quitté un poste de cheffe de produit dans la division textile du géant Carrefour pour être davantage en accord avec ses valeurs de slow living. « J’avais envie d’être près des clients », ajoute-t-elle.

PHOTO FOURNIE PAR ON PARTAGE

Marion Stephan a su créer un lieu chaleureux à l’excellente cuisine maison et de saison.

Marion Stephan avait l’appel du café de spécialité, mais elle voulait acquérir de l’expérience. Pendant deux ans, elle a fait ses classes en travaillant dans des coffee shops de Coutume – aussi torréfacteur –, un acteur très important dans la démocratisation du café de spécialité à Paris.

Après avoir trouvé un local dans la rue Charonne, elle a fait une campagne de sociofinancement pour l’achat d’équipements. « Le GoFundMe m’a permis de développer une communauté. »

L’entrepreneure se réjouit du « lieu de vie » qu’est devenu On partage, mais aussi de la multiplication des cafés du même esprit un peu partout à Paris. « Il y a un boom. C’est un cercle vertueux qui aide tout le monde. »

PHOTO FOURNIE PAR ON PARTAGE

On partage offre de nombreuses places devant la fenêtre qui donne sur la rue Charonne.

Parmi nos autres coups de cœur, il y a Café Singuliers, rue Titon, dans le 11arrondissement. L’endroit a été pensé comme une maison de campagne : il y a des livres dans des bibliothèques, un poêle à bois et même des cordes de bois accotées au mur !

PHOTO QUENTIN TOURBEZ, FOURNIE PAR CAFÉ SINGULIERS

Victoire Pfister et Laure Weiss sont derrière le menu de Café Singuliers. Les pains et pâtisseries sont faits sur place, dont le succulent pain de mie japonais au Tanghzong.

Toujours dans le 11arrondissement, Aube vaut aussi largement le détour. On y sert des petit-déjeuners, des brunchs et des dîners les jours de semaine – ce qui est plutôt rare à Paris. L’une de ses propriétaires, Audrey Jarry, est derrière le restaurant Au Passage. L’autre est Carrie Solomon, autrice de nombreux livres de cuisine, dont Breakfast All Day.

PHOTO ÉMILIE CÔTÉ, LA PRESSE

Le café accompagnait à merveille ce plat de salade aux fines herbes avec halloumi grillé, tzatziki, olives et radis melon d’eau.

D’autres adresses ? Les deux repaires branchés de Nuances (dans le 1er et dans le 6e), White (à deux pas du musée de Picasso), Gramme (rue des Archives, dans le Marais), Télescope Café (près du Jardin du palais royal), et le Nomade Café (dans le 11e). Quant au Comets Café & Disques, il attire aussi les mélomanes et les amateurs de vinyles.

PHOTO ÉMILIE CÔTÉ, LA PRESSE

Comets Café & Disques, rue Léon Frot, dans le 11arrondissement

Mais pourquoi Paris a tardé à succomber à la troisième vague ? « Il y avait une culture forte à changer », répond Aleaume Paturle. Celle de l’allongé ou du café crème calé vite sur une chaise en osier. « Il y avait une culture du café, mais pas du bon café », tranche-t-il.