Manger moins de viande, mais en manger de la meilleure, fraîche et, si possible, provenant de producteurs locaux. Évidemment, voilà un vœu qui est plus facile à formuler qu’à réaliser. Mais certains distributeurs et producteurs veulent nous simplifier la vie en proposant un service de livraison de viande fraîche de qualité à domicile.

« Je cuisine depuis que je suis toute jeune et je n’achète pas de congelé, avoue Catherine Moreau », directrice générale des Viandes de la Ferme, distributeur de Lavaltrie qui compte une belle proportion de produits frais. « La texture peut être différente, ça dépend de la façon dont on la décongèle. Ce n’est pas tout le monde qui se permet de faire décongeler son poulet au frigo pendant 24 heures ou pendant 6 heures dans l’eau froide. Il y a certainement une éducation à faire dans la méthode de décongélation des produits. »

Le chef Marc-André Jetté, qui a lancé cet automne son propre service de distribution de viandes fraîches à domicile, va plus loin. « Ce n’est pas vrai qu’il n’y a pas de différence entre le frais et le surgelé, martèle-t-il. D’accord, pour le bœuf haché, c’est pareil, mais un steak congelé n’aura pas la même rétention d’eau et de sang, son côté juteux ne sera pas le même, c’est sûr et certain. Même chose pour le poulet, la congélation entraîne la formation de cristaux d’eau qui viennent briser les fibres, la capacité de garder les jus à l’intérieur va être amoindrie. »

PHOTO ALAIN ROBERGE, LAPRESSE

Le chef Marc-André Jetté a lancé récemment sa nouvelle boucherie, Édouard et Léo, offrant un service de livraison de viande fraîche à domicile.

La viande fraîche a plus de qualités en matière de texture et elle est plus facile à cuisiner.

Marc-André Jetté, chef propriétaire de Hoogan et Beaufort et fondateur de la boucherie Édouard et Léo

Le chef propriétaire du restaurant Hoogan et Beaufort, dans le quartier Rosemont, à Montréal, a certainement voulu faire œuvre utile en offrant à ses clients des viandes fraîches livrées à domicile, mais c’est d’abord en voulant aider ses fournisseurs qu’il a démarré sa boucherie, raconte-t-il.

« L’idée est née durant la pandémie quand deux de mes producteurs m’ont annoncé qu’ils allaient cesser leur production, nous explique-t-il. Parmi eux, il y avait La Canardière, avec qui je travaille depuis 15 ans. Les jeunes qui avaient commencé en faisant la livraison ont repris la ferme de leurs parents, ils sont devenus des amis. Moi aussi, je viens de la ferme, mon père était meunier, à Saint-Césaire, en Montérégie, j’ai toujours côtoyé des agriculteurs, mes amis étaient fermiers. » Pas étonnant donc d’apprendre que le nom de sa boucherie, Édouard et Léo, fait référence à son grand-père et à celui de son associé, tous deux agriculteurs.

  • La boucherie Édouard et Léo propose à ses clients de faire vieillir leurs pièces de bœuf en environnement contrôlé, après quoi ils peuvent choisir de les faire livrer en tout ou en partie, selon leurs goûts.

    PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

    La boucherie Édouard et Léo propose à ses clients de faire vieillir leurs pièces de bœuf en environnement contrôlé, après quoi ils peuvent choisir de les faire livrer en tout ou en partie, selon leurs goûts.

  • Des produits marinés et précuits, comme ce poulet en crapaudine, font aussi partie de l’offre chez Édouard et Léo.

    PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

    Des produits marinés et précuits, comme ce poulet en crapaudine, font aussi partie de l’offre chez Édouard et Léo.

  • Un employé de la boucherie Édouard et Léo prépare une boîte de viandes fraîches qui sera livrée à un client dans la grande région métropolitaine.

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    Un employé de la boucherie Édouard et Léo prépare une boîte de viandes fraîches qui sera livrée à un client dans la grande région métropolitaine.

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C’est ensuite en analysant le marché et en consultant les quelque 3000 clients inscrits dans la liste d’envoi web du Hoogan et Beaufort qu’il a constaté qu’il y avait une place dans le marché pour la livraison de viande fraîche. Il a ainsi converti une partie des locaux de son service de traiteur, il a aménagé une chambre froide avec un espace de vieillissement et a fait l’achat d’un camion réfrigéré pour assurer la chaîne de froid jusqu’au domicile des clients.

Il livre actuellement de 150 à 200 commandes de boîtes de viandes fraîches (et aussi quelques produits dérivés, comme des pâtes fraîches, des sauces et des viandes marinées et précuites) par semaine dans l’île de Montréal, sur la Rive-Sud (de Boucherville à Brossard) et dans la partie sud de Laval.

PHOTO GABRIEL DE ROSSI, FOURNIE PAR LA BOUCHERIE ÉDOUARD ET LÉO

Proposée ces temps-ci, la boîte automnale (175 $) contient assez de nourriture pour cuisiner huit repas pour deux ou trois personnes.

« On a déjà une belle clientèle, très près du restaurant, qui avait déjà confiance en nos produits, soutient Marc-André Jetté. Mais on a encore de la place pour la croissance, on en a besoin, on veut élargir notre rayon et on va aussi livrer bientôt dans des points de chute dans des bureaux du centre-ville. » Sans compter qu’il a aussi l’intention d’ouvrir une autre boucherie qui aura pignon sur rue ailleurs à Montréal.

Un intérêt marqué propulsé par la pandémie

Catherine Moreau a aussi remarqué un intérêt de plus en plus marqué de ses clients pour la viande fraîche livrée à domicile. « La clientèle que l’on a développée est constituée d’épicuriens qui veulent recevoir leur viande le vendredi et la cuisiner dès le week-end, ils ne veulent pas attendre de la décongeler », explique la jeune femme, qui a démarré les Viandes de la ferme en 2015 en réponse à la demande de clients qui cherchaient les produits distribués dans les boucheries et les épiceries spécialisées par Milibec, entreprise appartenant à sa famille.

PHOTO FOURNIE PAR LES VIANDES DE LA FERME

Catherine Moreau, propriétaire des Viandes de la ferme, a vu la demande exploser au début de la pandémie.

« Notre chiffre d’affaires a explosé au début de la pandémie, avec une augmentation de 75 % des ventes au printemps 2020 ; tout ce qui était institutionnel a dû fermer un certain temps, les gens ne sortaient plus, ils se sont tournés vers les producteurs d’ici. Ça s’est stabilisé depuis, mais on affiche actuellement une hausse de 45 à 50 % par rapport au début de 2020. Et avec le temps des Fêtes qui arrive, on voit une nouvelle hausse de la demande. »

Les Fermes Lufa, qui proposent aussi une offre de viandes fraîches produites par quelques-uns de leurs producteurs, ont aussi vu une croissance dans la demande de la clientèle, qui opte désormais à 60 % pour des viandes fraîches, selon les chiffres fournis par l’entreprise montréalaise.

  • PHOTO GABRIEL DE ROSSI, FOURNIE PAR LA BOUCHERIE ÉDOUARD ET LÉO

  • PHOTO FOURNIE PAR LES VIANDES DE LA FERME

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Comme les Viandes de la Ferme et les Fermes Lufa sont distributeurs, elles sont toutefois limitées par l’offre de leurs fournisseurs, à la différence d’Édouard et Léo, qui achète ses bêtes partiellement débitées directement auprès des éleveurs. Cela lui permet non seulement de conserver des prix concurrentiels, mais aussi de faire découvrir des pièces de viande moins connues.

« J’ai toujours eu cette vision d’utiliser toute la bête et non pas seulement les parties nobles », nous explique Marc-André Jetté.

PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

Le boucher Quentin Donot a appris son métier à l’École nationale supérieure des métiers de la viande, à Paris, avant d’émigrer au Québec en 2019. Il est le boucher attitré d’Édouard et Léo.

« Le but est de mettre les artisans de l’avant : le producteur, qui se démène à prendre soin de ses bêtes, après quoi on peut compter sur Quentin Donot, notre super boucher qui s’occupe de tout aller chercher sur les bêtes — c’est vraiment un artisan, il y a des notions derrière son travail. Et à la fin, ce sont les artisans cuisiniers, y compris ceux à la maison ! »

À terme, Marc-André Jetté veut aussi offrir des capsules vidéo pour que les clients puissent savoir comment apprêter les différentes coupes de viande qu’ils reçoivent à domicile. « On parle souvent de coupes que les boucheries n’ont pas, mais que les restaurants aiment servir, soutient-il. Bien sûr, je sais très bien que l’on ne peut pas manger au resto tous les jours. Alors c’est un peu comme si je donnais aux gens l’accès à mon propre frigo. Je veux partager mon frigo avec le Grand Montréal pour qu’il puisse améliorer la qualité de la viande qu’il achète ! », conclut-il.

Consultez le site de la boucherie Édouard et Léo Consultez le site des Viandes de la ferme

Rectificatif
Contrairement à ce qui était indiqué dans la version originale de l’article publié le 13 novembre, les Fermes Lufa proposent en livraison une vaste gamme de coupes de bœuf frais.