(Hong Kong) La fondue chinoise, plat convivial dont raffolent d’ordinaire les Hongkongais, a perdu les faveurs de la population à cause du nouveau coronavirus, depuis que 10 membres d’une même famille ont été contaminés en en partageant une.

C’est dans tout le pays un incontournable de la gastronomie chinoise, en particulier quand le mercure chute en hiver. Et les Hongkongais, en temps normal, aiment à se retrouver autour de ce bouillon maintenu chaud au milieu de la table, dans lequel ils plongent viandes, légumes ou fruits de mer.

Mais leur appétit pour les « hotpots », comme on les appelle à Hong Kong, a chuté en apprenant la contamination au nouveau coronavirus de plusieurs membres d’une même famille, qui avaient partagé à l’occasion du Nouvel An lunaire une fondue avec un proche arrivé infecté de Chine continentale.

Alors qu’un dixième cas au sein de la même famille a été confirmé en début de semaine, l’affaire a fait plonger le cours de bourse des chaînes de restauration spécialisées dans la fondue et possédant des enseignes à Hong Kong.

Xiabuxiabu a perdu 7,1 %, Haidilao 4,8 % tandis que Yihai International, qui fabrique des assaisonnements pour les fondues, a reculé de 2,7 %.

Les chaînes hongkongaises Fairwood, Cafe de Coral, Yoshinoya et Maxim’s ont annoncé de leur côté qu’elles retiraient temporairement la fondue de leurs menus.

« Qui va s’asseoir à côté ? »

PHOTO ANTHONY WALLACE, AGENCE FRANCE-PRESSE

Sam Wong, propriétaire de 66 Hotpot, restaurant familial à fondue du quartier populaire de Mongkok, prend la température de tous les clients qui franchissent la porte de son établissement.

La société Maxim’s a par ailleurs indiqué que deux des personnes contaminées en partageant la fondue travaillaient dans deux de ses restaurants, qui vont être fermés afin d’être désinfectés.

Haidilao, plus grande chaîne chinoise de fondues, a carrément fermé toutes ses enseignes en Chine continentale, où le virus a contaminé plus de 44 000 personnes et fait plus de 1100 morts.

Elle ne compte pas fermer ses restaurants hongkongais, mais prévoit contrôler la température de ses clients.

Sam Wong, propriétaire de 66 Hotpot, restaurant familial à fondue du quartier populaire de Mongkok, a déploré de son côté une vingtaine d’annulations de réservations par des clients depuis l’annonce des contaminations.

« Je ne crois pas qu’il faille montrer du doigt les fondues en particulier, compte tenu de l’habitude des Chinois de partager leur nourriture », estime M. Wong, 39 ans. « Mais vu que c’est une fondue qui est associée à ce foyer d’infection, notre activité est nécessairement impactée. »

M. Wong, qui prend lui aussi la température de tous les clients qui franchissent son pas de porte, a installé des paillassons imprégnés de solution désinfectante et remplacé les baguettes lavables par des jetables.

Emily Mok, une hôtesse de l’air, a préféré venir lundi soir à 66 Hotpot avant l’arrivée des clients, pour prendre une fondue à emporter.

« Mon compagnon et moi allons manger la fondue chez nous. Nous ne voulons pas dîner ici, car nous ne savons pas qui va s’asseoir à côté de nous », dit-elle.

Avant même le début de la crise liée au coronavirus, les restaurants hongkongais en avaient pris de plein fouet une autre, politique cette fois, liée aux mois de contestation prodémocratie dans les rues de l’ex-colonie britannique.

Au cours du dernier trimestre 2019, la période où la mobilisation a été la plus violente à Hong Kong, le secteur de la restauration a enregistré une chute de 14 % en moyenne de ses revenus par rapport à la même période en 2018, selon les chiffres officiels.

66 Hotpot a de son côté tiré son épingle du jeu, car M. Wong est un soutien du mouvement prodémocratie.

Les manifestants s’étaient passé le mot pour boycotter les commerces hostiles et aider les enseignes sympathisantes, si bien qu’il y avait presque systématiquement la queue à l’extérieur de son restaurant.

« Aujourd’hui, il n’y a aucune file d’attente », lâche-t-il dépité.