(Saint-Lazare) Pour François Legault, il ne fait pas de doute que la protection du français, en limitant le nombre d’immigrants économiques non francophones qui s’installent chaque année au Québec, permet de préserver une « cohésion nationale », ce qui crée une « nation forte », « tissée serré », qui est plus solidaire face aux crises, comme en temps de pandémie.

Le chef de la Coalition avenir Québec (CAQ) a précisé lundi le fond de sa pensée sur la question de l’immigration allophone, alors qu’il affirmait dimanche à Drummondville qu’elle pouvait devenir une menace à la cohésion nationale si elle n’était pas limitée en nombre, afin de respecter la « capacité d’accueil » du Québec.

« Je pense qu’une des raisons pourquoi les Québécois ont suivi les consignes plus qu’ailleurs, c’est parce qu’il y a une cohésion nationale au Québec. Les gens sont autour de certaines valeurs et on est une nation tissée serré. Mais pour qu’il y ait une cohésion nationale, il faut qu’il y ait une nation, une nation forte. Et la nation québécoise, pour être forte, il faut protéger le français. Sinon, il y a des inquiétudes », a expliqué le chef caquiste.

« Donc, protéger le français, ça fait une nation forte. Et une nation qui est forte, ça fait une cohésion nationale qui fait qu’on s’aide quand il arrive des malheurs et des crises », a-t-il poursuivi.

Legault répond à Anglade

M. Legault balaie du revers de la main les critiques exprimées dimanche par la cheffe du Parti libéral, Dominique Anglade. Cette dernière accusait son adversaire de nourrir un discours qui menace la cohésion nationale en polarisant l’opinion publique sur la question de l’immigration.

« Les Ukrainiens qui fuient les bombes, les Italiens, les Grecs, les Mexicains, les Portugais, les Vietnamiens, les Colombiens, la réunification familiale, c’est une menace à notre nation ? C’est votre discours, François Legault, qui menace la cohésion nationale », a-t-elle écrit sur Twitter.

À cela, François Legault réplique que son parti n’a jamais demandé ni souhaité exiger la connaissance du français pour les réfugiés, comme les Ukrainiens qui fuient présentement la guerre. Le chef caquiste fait une distinction claire lundi entre l’immigration économique et les réfugiés politiques.

« Mme Anglade sait très bien que ce n’est pas vrai, ce qu’elle dit. Quand elle [parle des] réfugiés ukrainiens, on n’a jamais demandé ou exigé que ces gens-là parlent français. C’est notre contribution communautaire mondiale. On a toujours été accueillants pour des peuples qui sont mal pris et qui deviennent des réfugiés politiques, et on va continuer de le faire », a défendu M. Legault.

Des propos dangereux pour la cohésion, réplique QS

PHOTO RYAN REMIORZ, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Gabriel Nadeau-Dubois

Gabriel Nadeau-Dubois est revenu à la charge et a demandé à M. Legault de se « ressaisir » et de proposer un plan pour lutter contre la pénurie de main-d’œuvre.

Au cœur d’une tournée nordique, le chef parlementaire de Québec solidaire a visité l’usine de Chantiers Chibougamau, dans la circonscription d’Ungava. Il manque une centaine de bras à l’entreprise de pointe, qui produit du bois d’ingénierie. Le syndicat affirme que l’usine doit parfois fermer des lignes de production parce que des quarts de travail ne sont pas comblés, alors que la demande pour les constructions en bois explose.

La direction de l’entreprise fait preuve d’originalité pour attirer de la main-d’œuvre des Philippines, qui dispose d’un important bassin de main-d’œuvre forestière. Elle est en train de construire un nouveau quartier à Chibougamau pour offrir du logement aux futures recrues, et fait de la francisation à distance avant même que l’employé arrive. Mais elle fait face à un défi de taille puisque les politiques interdisent au travailleur d’emmener avec lui sa famille.

« Cet humain-là, qui fait ce choix très personnel de s’éloigner de sa famille durant des mois, voire des années, pour venir tenir une organisation comme celle-ci à bout de bras, c’est un choix extrêmement digne qu’on doit apprécier à sa juste valeur. Au jour un, on ne demanderait pas mieux à ce que les familles viennent, et on les prendrait sous notre aile », affirme Frédéric Verreault, directeur exécutif du développement corporatif chez Chantiers Chibougamau.

La candidate solidaire dans la circonscription, Maïté Labrecque-Saganash, estime quant à elle que ce sont les propos de François Legault qui sont « dangeureux » pour la cohésion sociale. « L’autre fois, j’étais dans la rue, il y avait des enfants philippins, cris et jamésiens qui jouaient ensemble, et c’est ça. Quand je parle de cohésion sociale, il faut arrêter d’avoir des propos dangereux à cette cohésion », a-t-elle lancé.

Duhaime s’attaque à la solidarité, dit la CAQ

Le chef caquiste a également critiqué lundi le chef du Parti conservateur, Éric Duhaime, qui s’attaquerait à la solidarité avec les politiques économiques et sociales qu’il propose.

« Je reviens un peu sur ce qu’on a vu avec la pandémie. Les Québécois sont tissés serré, s’entraident quand c’est difficile, ont suivi les consignes, la grande majorité pour aider à sauver des vies […]. Et je pense que c’est un enjeu important de la campagne électorale », a affirmé M. Legault au début de sa mêlée de presse.

« Il y a un parti, celui d’Éric Duhaime, qui souhaiterait une société qui est plus chacun pour soi. Et je ne pense vraiment pas que c’est le genre de société qu’on veut. Je pense qu’on veut prendre soin de notre monde. […] Pour moi, l’entraide, c’est le genre de société qu’on veut. Pas une société chacun pour soi. Je pense que les leaders ont une responsabilité d’encourager cette entraide, pas d’encourager le chacun pour soi », a-t-il martelé.

M. Legault a formulé cette critique alors que son parti annonçait lundi qu’il bonifierait l’offre de repos aux familles ayant un enfant lourdement handicapé en investissant 100 millions sur quatre ans pour ajouter 500 places supplémentaires dans les centres de répit.

Le chef caquiste a visité pour l’occasion le domicile de sa candidate et députée sortante dans la circonscription de Soulanges, Marilyne Picard, elle-même maman d’une enfant lourdement handicapée.

« C’est essentiel [d’aider ces familles], et pas juste les parents. Les frères, les sœurs ont besoin d’aide. C’est presque un don de soi, quand on a un enfant qui est lourdement handicapé. C’est des sacrifices sur une vie normale. Je pense qu’on a un devoir de société d’aider les familles » a dit M. Legault.