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Avec les changements climatiques, les pannes de courant risquent de se multiplier. Est-ce que les normes québécoises concernant le bâtiment et l’électricité permettent d’avoir un véhicule électrique qui alimenterait la maison en cas de panne ? Un peu comme un gros Powerwall de Tesla sur roues ?

Gilles Vinet, Blainville

Monsieur Vinet,

L’idée que vous évoquez est loin d’être farfelue. Elle intéresse même grandement Hydro-Québec. « Oui, c’est possible de le faire. C’est quelque chose qu’on risque de voir apparaître de plus en plus au cours des prochaines années », dit Jonathan Côté, porte-parole chez Hydro-Québec.

Les avantages de transformer son véhicule en batterie sont nombreux. Posséder sa propre source d’énergie lors de pannes de courant, comme vous l’évoquez, est l’un des plus évidents.

Mais Hydro-Québec s’intéresse aussi à la gestion de la pointe. Des consommateurs qui chargeraient leur véhicule pendant la nuit, alors que la demande d’électricité est faible, puis renverraient cette électricité vers leur maison pendant le jour permettraient d’adoucir les pics d’utilisation et de réduire la pression sur le réseau électrique.

Hydro-Québec évoque même le cas de figure où des citoyens renverraient de l’électricité dans le réseau en tant qu’« autoproducteurs », comme les consommateurs qui disposent de panneaux solaires, par exemple. C’est la filiale Hilo d’Hydro-Québec qui travaille sur ces projets.

Consultez la page d’Hydro-Québec consacrée aux autoproducteurs

Avant de pouvoir connecter son véhicule sur sa maison, il existe certains prérequis techniques.

D’abord, votre modèle de voiture doit permettre la chose. Pour savoir si c’est le cas, il faut repérer les expressions V2H (Vehicule-to-home), V2G (Vehicule-to-grid) ou V2L (Vehicule-to-load). En gros, cela veut dire qu’on doit pouvoir sortir l’énergie du véhicule.

C’est de plus en plus courant. Le Ford F-150 électrique vante cette possibilité dans certaines de ses publicités. Hydro-Québec mentionne aussi le Hyundai Ioniq 5 et le Kia EV6 parmi les modèles qui offrent cette fonctionnalité.

Nissan a également fait une mise à jour sur ses véhicules électriques qui permettent la fonction, et Volkswagen le ferait bientôt sur tous ses véhicules assez récents, toujours selon Hydro-Québec.

Autre prérequis : il faut posséder une borne de recharge bidirectionnelle. La borne dcbel r16, par exemple, conçue au Québec, se vend à partir de 5000 $.

Hydro-Québec insiste pour dire qu’un électricien certifié doit se mettre le nez dans l’installation.

« Si on retourne de l’électricité dans l’autre direction, il peut y avoir des enjeux de sécurité si ce n’est pas bien isolé. Disons qu’il y a une panne dans votre secteur et que vous décidez d’alimenter votre maison à partir de votre véhicule. Si le système n’est pas bâti correctement, cela peut renvoyer de l’électricité dans le fil électrique qui se trouve dans votre rue et représenter un risque pour les employés d’Hydro-Québec qui viendraient faire des réparations », illustre Jonathan Côté.

Consultez le site de la Corporation des maîtres électriciens du Québec pour trouver un électricien qualifié

Quel genre d’autonomie pourrait fournir une voiture électrique ? Jonathan Côté calcule qu’avec une batterie de 64 kWh, courante dans plusieurs modèles, on pourrait alimenter un réfrigérateur, de l’éclairage DEL et quelques appareils électroniques l’été pendant plus d’une semaine.

Ça se complique évidemment l’hiver avec le chauffage, le véhicule risquant alors de fournir assez d’électricité pour quelques heures seulement. Mais il y a toujours moyen de réduire le chauffage au minimum, de chauffer seulement certaines pièces ou d’utiliser une borne de recharge rapide publique (si elle n’est pas touchée par la panne !) pour recharger son véhicule et continuer d’alimenter sa maison.

Rappelons que, de toute façon, la majorité des pannes sont de courte durée.

Attendons-nous à ce que ces possibilités alimentent les discussions au fil des prochaines années !