L’exercice est pratiquement impossible à faire et pourtant, les photographes de La Presse s’y sont prêtés : parmi les (dizaines de) milliers d’images qu’ils ont prises depuis le début de leur carrière, quelles sont les dix qui ont été les plus marquantes ? Un choix déchirant et très personnel. Voici la sélection de David Boily.

PHOTO DAVID BOILY, LA PRESSE

Mars 2008 — Îles-de-la-Madeleine
Au printemps 2008, je suis aux Îles-de-la-Madeleine pour tenter de me frayer une place sur un bateau afin de documenter la chasse aux loups marins. Les glaces empêchent cette année-là plusieurs bateaux de sortir, alors je dois rester à terre. Bien que L’Acadien II ne fasse pas partie de mon reportage, je prends cette photo par hasard, au moment où il quitte le port. Deux jours plus tard, nous recevons une triste nouvelle : le bateau a coulé en se faisant remorquer par la Garde côtière. Quatre Madelinots ont perdu la vie et cette photo est la dernière prise de L’Acadien II.

PHOTO DAVID BOILY, LA PRESSE

Avril 2008 — Montréal
Le 22 avril, le Canadien de Montréal vient d’éliminer les Bruins de Boston en séries éliminatoires. Les célébrations se transforment vite en émeute et certains en profitent pour piller les commerces de la rue Sainte-Catherine, comme cette boutique de la chaîne Foot Locker. J’ai été surpris à l’époque que personne ne s’en prenne à moi.

PHOTO DAVID BOILY, LA PRESSE

Août 2008 — Montréal-Nord
Ce soir-là, mon patron me demande d’aller remplacer mon collègue qui vient de se faire assommer et voler ses appareils photo. J’ai suivi les conseils du collègue en question et je me suis fait très discret. J’ai quand même pu documenter plusieurs affrontements entre les policiers du Service de police de la Ville de Montréal et les émeutiers.

PHOTO DAVID BOILY, LA PRESSE

Janvier 2010 — Haïti
Un séisme important a secoué Haïti et fait des centaines de milliers de morts au début de 2010. En arrivant sur place, à peine 48 heures après le tremblement de terre, je constate l’envergure de la tragédie. Il y a des corps empilés au coin des rues, et le désespoir des gens est palpable. Cette image choquante n’est qu’une des douzaines vues dans les jours suivants…

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Mai 2010 — Wemotaci
Au début de l’été 2010, un incendie de forêt force l’évacuation de la réserve de Wemotaci, à 100 km au nord de La Tuque. À peine arrivés sur les lieux, nous observons des travailleurs de la SOPFEU qui retournent la terre afin d’étouffer les étincelles et freiner la propagation du feu aux abords de la réserve. La veille, toute cette forêt était verte.

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Janvier 2014 — Liberia
Je suis en Afrique pour documenter un conflit qui oppose une entreprise étrangère à des paysans du Liberia. L’Equatorial Palm Oil prétend que le gouvernement libérien lui a donné des terres dans les années 1960. Terres que l’entreprise installée à Londres veut alors récupérer pour produire de l’huile de palme. En visitant la région concernée, nous croisons Joseph Cheo Jonson et ses fils, qui fabriquent de l’huile de palme de façon traditionnelle depuis des générations. Ils n’ont aucune intention de quitter l’endroit.

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Avril 2020 — Montréal
Depuis le début de la pandémie, les photographes de La Presse ont été souvent sollicités pour documenter les efforts des travailleurs de la santé. Cette journée-là, il y a plus de deux ans déjà, j’attends l’arrivée des ambulances à l’hôpital de Verdun quand j’aperçois l’infirmière Nadejda Curcan, qui sort de son unité de triage. Dans le vent, sa combinaison jaune fait penser à la cape d’une superhéroïne.

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Février 2021 — Montréal
Arrêté six jours plus tôt, puis accusé à tort de tentative de meurtre contre un policier du Service de police de la Ville de Montréal, Mamadi III Fara Camara vient d’être disculpé, à la lumière de nouvelles preuves. La photo a été prise à l’instant où l’étudiant étranger, qui a obtenu depuis sa résidence permanente au Canada, sort d’une salle d’audience du palais de justice de Montréal. Entouré de ses proches, M. Camara s’assoit un moment et se laisse aller à ses émotions.

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Mars 2021 — Montréal
De nombreuses photos marquantes de ma carrière ont été prises à la suite d’évènements tragiques. Or, j’ai choisi la dernière photo de cette sélection pour son esthétisme. À la suite d’une cérémonie de commémoration pour les victimes de la COVID-19, la mairesse de Montréal, Valérie Plante, quitte la place Vauquelin entourée d’invités et de joueurs de cornemuse. Je savais qu’elle allait emprunter ce passage, je me suis donc placé en conséquence. J’aime bien comment les lignes créées par la foule et la tente pyramidale en arrière-plan convergent vers la mairesse, qui se démarque avec son manteau rose et son regard confiant.