Personne ne peut prévoir l’avenir. Mais voici deux scénarios extrêmes. L’un, catastrophique, où apparaît un nouveau variant qui résiste aux vaccins. L’autre, optimiste, où une vie plus normale reprendrait l’été prochain. Voici à quoi l’avenir de la pandémie pourrait ressembler. Pour le meilleur et pour le pire.

Le scénario catastrophe

Omicron.

C’est le mot le plus craint sur la planète depuis qu’un laboratoire d’Afrique du Sud a découvert ce nouveau variant de la COVID-19, il y a une dizaine de jours.

Un variant qui pourrait peut-être diminuer – voire réduire à zéro dans le pire des cas – l’efficacité des vaccins.

On devrait le savoir dans les prochaines semaines, quand les scientifiques auront terminé leurs analyses sur les premiers cas du variant Omicron.

À quoi ressemblerait notre vie au Québec si un variant résistait au vaccin à 100 % ? Ce scénario catastrophique nous ferait probablement reculer d’un an dans cette pandémie, avant la campagne de vaccination.

Oubliez les sorties au restaurant ou les spectacles au Centre Bell. On reviendrait à notre vie de l’hiver 2021, durant la deuxième vague. Couvre-feu. Port du masque en tout temps à l’école, dans les commerces et dans les endroits publics. Pas de grandes fêtes dans les maisons. (Et oubliez les débats entre les libertés des vaccinés et des non-vaccinés : le danger serait soudainement le même pour tout le monde.)

Ce recul important serait difficile à vivre sur le plan de la santé mentale pour beaucoup de Québécois. Les finances des gouvernements s’en ressentiraient aussi, particulièrement à Ottawa. S’il faut réduire l’activité économique dans certains secteurs (par exemple le transport aérien ou le tourisme) pour des motifs sanitaires, Ottawa devrait alors voguer au secours de ces secteurs. Ce qui ajouterait à la dette publique, qui a explosé depuis le début de la pandémie.

L’hiver québécois en 2022 serait probablement même plus difficile à vivre. On a passé l’hiver 2021 avec la forme originale de la COVID-19. Le variant Delta, dominant en ce moment, est beaucoup plus contagieux. Si Omicron l’est autant, voire davantage, il se répandrait plus vite encore dans la population.

Heureusement, on ne retournerait pas à un confinement complet comme au début de la pandémie. « On ne serait pas au dépourvu, on connaît mieux la maladie », dit Benoît Mâsse, épidémiologiste et professeur à l’Université de Montréal.

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, ARCHIVES LA PRESSE

Benoît Mâsse, épidémiologiste et professeur à l’Université de Montréal

L’arrivée prochaine de médicaments antiviraux contre la COVID-19 permettra aussi d’éviter un séjour à l’hôpital à de nombreux malades. À condition que le nouveau variant ne résiste pas non plus à ces médicaments. Sinon, il faudra resserrer les mesures sanitaires. Et attendre un nouveau vaccin.

Pfizer et Moderna pensent pouvoir produire une nouvelle version du vaccin en trois mois (tests cliniques compris). Il faudra ensuite produire les nouvelles doses en quantité suffisante pour les milliards de personnes vaccinées. Au total, de la conception à la livraison, il faudra au moins six mois. Pour les pays riches comme le Canada.

Sans vaccination mondiale, un éternel recommencement ?

Ce scénario du pire ne sort pas de nulle part. L’Organisation mondiale de la santé le répète depuis des mois : plus on attend pour vacciner toute la planète, plus le risque est grand d’affronter un jour un variant résistant au vaccin s’étant développé dans un pays ou un continent peu vacciné.

PHOTO GBEMIGA OLAMIKAN, ASSOCIATED PRESS

Vaccination à Abuja, au Nigeria, le 1er décembre dernier

« C’est juste une question de temps, dit l’épidémiologiste Benoît Mâsse. Il y a beaucoup de pays où il y a peu de vaccination. »

À un moment donné, ça va arriver si on ne met pas en priorité la vaccination mondiale, et non uniquement la vaccination des pays riches. Tant qu’on va laisser la transmission du virus se faire partout dans le monde – et le virus se transmet encore beaucoup –, on prend des risques.

Benoît Mâsse, épidémiologiste et professeur à l’Université de Montréal

Plus un virus se transmet, plus il a des chances de muter. Le vaccin réduit les risques d’infection du variant Delta d’environ 60 % à 80 % (selon le type de vaccin, l’âge et le temps écoulé depuis la deuxième dose). Mais le taux de vaccination famélique dans les pays pauvres fait en sorte que le virus peut se transmettre et muter plus facilement.

« Il faut vacciner tout le monde, sinon on favorise des conditions pour l’émergence d’un variant qui est capable de contourner le vaccin », confirme André Veillette, immunologiste et professeur à l’Université de Montréal.

Actuellement, la proportion de la population adéquatement vaccinée varie de 68 % dans les pays riches à seulement… 3 % dans les pays à faible revenu.

  • Manifestation devant le siège de Moderna à Cambridge, au Massachussets, le 18 novembre dernier, appelant à la vaccination de tous et dénonçant les stratégies d’affaires des entreprises pharmaceutiques pendant la pandémie.

    PHOTO GRETCHEN ERTL, ASSOCIATED PRESS

    Manifestation devant le siège de Moderna à Cambridge, au Massachussets, le 18 novembre dernier, appelant à la vaccination de tous et dénonçant les stratégies d’affaires des entreprises pharmaceutiques pendant la pandémie.

  • Manifestation devant le siège de Moderna à Cambridge, au Massachussets, le 18 novembre dernier, appelant à la vaccination de tous et dénonçant les stratégies d’affaires des entreprises pharmaceutiques pendant la pandémie.

    PHOTO GRETCHEN ERTL, ASSOCIATED PRESS

    Manifestation devant le siège de Moderna à Cambridge, au Massachussets, le 18 novembre dernier, appelant à la vaccination de tous et dénonçant les stratégies d’affaires des entreprises pharmaceutiques pendant la pandémie.

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À ce rythme, la question n’est pas de savoir si, mais plutôt quand un variant résistera aux vaccins, estiment de nombreux experts.

« Il faut arrêter de se conter des histoires et se donner un véritable plan mondial de vaccination », dit la Dre Joanne Liu, pédiatre-urgentiste au CHU Sainte-Justine et professeure à l’Université McGill.

PHOTO ANDRÉ PICHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

La Dre Joanne Liu, pédiatre-urgentiste au CHU Sainte-Justine et professeure à l’Université McGill

Un plan où on forcerait « Big Pharma » à renoncer à ses brevets pour les pays pauvres et à envoyer davantage de production à l’externe. Un plan où on mettrait davantage à contribution les pays riches. Un plan où, idéalement, au moins 90 % de la population serait adéquatement vaccinée.

Même dans les pays relativement bien vaccinés, il reste encore des poches de population peu vaccinées. C’est un problème en Europe actuellement.

Benoit Barbeau, virologiste et professeur à l’UQAM

Sans une vaccination mondiale, on court le risque que le scénario du variant résistant au virus se répète sans cesse. Un variant résiste au vaccin. Les pays riches se reconfinent. On revaccine en vitesse les pays riches en oubliant les pays pauvres. Les pays riches se déconfinent grâce à la vaccination. Les pays pauvres sont toujours peu vaccinés. Apparaît alors dans les pays pauvres un nouveau variant résistant au nouveau vaccin. Les pays riches se reconfinent. Et ainsi de suite…

« Pour nous protéger, à court terme, il faut aller vacciner ailleurs [partout sur la planète], dit l’épidémiologiste Benoît Mâsse. Ça ne va pas se faire tout seul. [Les pays plus pauvres] vont avoir besoin d’aide extérieure, et on a les ressources pour aller aider. »

La demi-catastrophe

Un nouveau variant pourrait aussi diminuer l’efficacité des vaccins sans la réduire à zéro.

Le PDG de Moderna, Stéphane Bancel, soupçonne que c’est ce qui va arriver avec Omicron. « Je pense qu’il va y avoir une baisse substantielle [de l’efficacité du vaccin]. Je ne sais pas combien, car nous devons attendre pour les données », a-t-il dit cette semaine au Financial Times.

PHOTO KARENE-ISABELLE JEAN-BAPTISTE, COLLABORATION SPÉCIALE

Stéphane Bancel, PDG de Moderna, lors de son passage à Montréal l’été dernier

Ce scénario est plus réaliste que celui où le vaccin devient totalement inefficace, selon les experts consultés par La Presse. Actuellement, au Québec, deux doses de vaccin protègent à 95 % contre les risques d’hospitalisation et à 60 %-80 % contre les risques d’infection.

Si Omicron parvient à résister au vaccin, une perte d’efficacité partielle du vaccin est « le scénario le plus plausible », dit la Dre Joanne Liu, ancienne présidente internationale de Médecins sans frontières. « C’est pour ça que toutes les autres mesures sanitaires – le port du masque, la ventilation, le testage – vont être importantes, dit-elle. Avec une superposition de mesures importantes, on arriverait à une protection raisonnable [même avec une protection partielle du vaccin]. »

« La probabilité que les gens vaccinés se retrouvent complètement dépourvus [face à ce nouveau variant] n’est pas élevée », dit le Dr Gaston De Serres, épidémiologiste et médecin-chef du groupe scientifique en immunisation de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ).

Les risques en chiffres

20 fois

Une personne non vaccinée a 20 fois plus de risques de mourir de la COVID-19 qu’une personne vaccinée.

15,8 fois

Une personne non vaccinée a 15,8 fois plus de risques d’être hospitalisée en raison de la COVID-19 qu’une personne vaccinée.

3,6 fois

Une personne non vaccinée a 3,6 fois plus de risques d’être infectée par la COVID-19 qu’une personne vaccinée.

Source : INSPQ

N’empêche, toute baisse de l’efficacité des vaccins forcerait les gouvernements à ajuster les mesures sanitaires.

Quatre facteurs qui influent sur la sévérité des mesures sanitaires

1. Le degré de protection du vaccin contre les symptômes sévères nécessitant une hospitalisation

2. Le degré de protection du vaccin contre l’infection (ne pas attraper le virus est encore la meilleure protection)

3. Le degré de virulence du virus (produit-il des symptômes plus graves provoquant une hospitalisation ?)

4. Le degré de transmissibilité du virus (se transmet-il plus facilement, contaminant ainsi plus de personnes ?).

Plus le variant aggrave ces quatre facteurs, plus il faudra resserrer les mesures sanitaires. (Le contraire serait aussi vrai, mais ça semble très peu plausible pour l’instant avec Omicron.).

Si le variant augmente le risque de transmission mais qu’il ne résiste pas au vaccin, qu’il n’est pas plus virulent et qu’il ne ne change rien aux risques d’hospitalisation, on éviterait le pire. À condition que le virus ne se propage pas trop vite pour la capacité de notre système de santé. « C’est toujours une question de capacité hospitalière », dit la Dre Caroline Quach, pédiatre, microbiologiste et infectiologue au CHU Sainte-Justine et professeure à l’Université de Montréal.

Réponse bientôt pour Omicron.

Note : Sauf indication, toutes les données dans ce reportage sont en date du lundi 29 novembre 2021. Les experts consultés ont accepté de décrire ce à quoi pourraient ressembler les deux scénarios ; ils ne favorisent pas un scénario ou l’autre pour autant, car on ne sait pas si un variant résistera en partie ou en totalité au vaccin à court ou à long terme.

Retour à la « normale »

Pas de masque au resto ou à l’épicerie. Un barbecue sans distanciation physique. Une foule entassée dans un festival de musique. Peut-on envisager ce scénario très (trop ?) optimiste pour l’été prochain ? Oui.

Personne n’a pas de boule de cristal. Mais sans variant jouant les trouble-fête, la plupart des experts consultés par La Presse s’entendent pour prévoir un retour à la quasi-normale au printemps ou à l’été au Québec, où 89 % des 12 ans et plus sont vaccinés actuellement. Beaucoup de mesures sanitaires pourraient ainsi tomber.

Il y a toutefois un gros mais : aucun variant ne doit résister au vaccin ou être plus virulent que les variants actuels. « Tout dépend d’Omicron. L’incertitude est plus grande [actuellement] », résume la Dre Caroline Quach, pédiatre, microbiologiste et infectiologue au CHU Sainte-Justine et professeure à l’Université de Montréal.

Au printemps et en été, le virus circule moins parce que la température est plus chaude et que les gens se tiennent davantage à l’extérieur.

On n’arrêterait pas complètement les décès liés à la COVID-19, même durant la canicule estivale. Mais ce serait un petit nombre de morts. En juillet et en août 2021, le Québec a eu 14 décès par mois liés à la COVID-19. En 2020, alors que le Québec n’était pas vacciné, il y a eu 87 morts en juillet et 61 en août.

Par contre, les contraintes sanitaires pour les voyages à l’étranger risquent de durer.

« Pendant quelques années, on va vivre avec certaines contraintes, prévient le Dr Karl Weiss, microbiologiste et spécialiste des maladies infectieuses à l’Hôpital général juif de Montréal. C’est un ensemble de mesures, comme la vaccination, les médicaments, le port du masque et le maintien d’autres mesures sanitaires qui vont nous permettre de revenir à une vie plus normale. »

PHOTO OLIVIER JEAN, ARCHIVES LA PRESSE

Le Dr Karl Weiss, microbiologiste

Il faut apprendre à vivre avec le virus, mais tout en se protégeant.

Le Dr Karl Weiss, microbiologiste

Avant le variant Omicron, les Canadiens, surtout les gens vaccinés, étaient déjà revenus à une vie relativement normale. Le magazine The Economist a calculé « un indice de la normalité » afin de déterminer à quel point la vie était redevenue comme avant la pandémie dans 50 pays riches. La vie y est revenue à la normale en moyenne à 76 %. Le Canada arrive au 25e rang, avec un taux de retour à la normale de 81 %.

« Porter un masque à l’épicerie, je n’appelle pas ça chambranler ma vie. On est tellement écœurés qu’on ne voit pas les progrès qu’on a faits », dit André Veillette, immunologiste et professeur à l’Université de Montréal.

Le niveau de protection des Québécois

89 %

Proportion des Québécois de 12 ans et plus adéquatement vaccinés

78 %

Proportion des Québécois adéquatement vaccinés (sur la population totale).

Source : INSPQ

Yo-yo sanitaire

Même avec ce scénario très optimiste, il faudra probablement s’habituer au yo-yo des mesures sanitaires, au gré de la situation épidémiologique et des saisons.

Le pire de la pandémie aura beau être derrière nous, il faudra vraisemblablement continuer d’appliquer un certain nombre de mesures sanitaires durant l’automne et l’hiver, quand la COVID-19 se transmettra davantage, surtout parmi les non-vaccinés. Le port du masque pourrait redevenir obligatoire dans les lieux publics et les commerces.

Les gouvernements se poseront la même question que depuis le début de la pandémie : comment aplatir la courbe des hospitalisations liées à la COVID-19 pour s’assurer que le système de santé, déjà fragilisé, ne s’écroule pas ?

Car on n’en sort pas. Il y a principalement quatre façons de ralentir la propagation du virus.

Quatre moyens de freiner la contagion

  1. la vaccination
  2. le port du masque, particulièrement à l’intérieur
  3. des tests rapides pour identifier ou prévenir les infections (Québec souhaite distribuer 10 millions de tests rapides dans les foyers avant les Fêtes, selon des modalités qui restent à déterminer ; on pourrait utiliser ces tests avant de faire un rassemblement privé)
  4. l’amélioration des systèmes de ventilation à l’intérieur des lieux de travail, des écoles et des immeubles.

Actuellement, environ 15 % des Québécois ont attrapé la COVID-19. (Les experts estiment qu’il faut multiplier par trois le chiffre officiel de 5 % pour inclure les cas asymptomatiques non répertoriés.)

La très grande majorité des vaccinés n’attraperont pas la COVID-19 (le vaccin protège entre 60 % et 80 % contre l’infection). Si 90 % des Québécois sont vaccinés, le virus aura beaucoup moins d’options devant lui et la transmission communautaire diminuera. Surtout quand les enfants de 5 à 11 ans seront aussi vaccinés, et possiblement les enfants de 6 mois à 5 ans ensuite.

PHOTO ROBERT SKINNER, ARCHIVES LA PRESSE

Vaccination de jeunes enfants à Laval le 29 novembre dernier

Mais tous les non-vaccinés attraperont un jour ou l’autre la COVID-19, à moins de rester cloîtrés. « Certains ne seront pas très malades, mais certains vont être très malades. Les non-vaccinés prennent un risque et ne pourront pas tous s’en sortir. Et on ne veut pas inonder le système de santé avec trop de cas. Si nous avons demain 1000 personnes qui arrivent aux soins intensifs parce qu’ils ne sont pas vaccinés, on aura un problème », dit le Dr Karl Weiss.

Plus on retarde la transmission du virus parmi les personnes non vaccinées avec des mesures sanitaires (pour ces personnes non vaccinées), plus on se donne de chances d’alléger le fardeau sur le système de santé. L’arrivée prochaine de médicaments antiviraux contre la COVID-19 pourrait aussi permettre de mieux soigner les patients, et d’éviter à nombre d’entre eux un séjour à l’hôpital. Dès l’apparition des premiers symptômes, un médecin pourrait prescrire une pilule antivirale à prendre en isolement à la maison (le molnupiravir de Merck ou le paxlovid de Pfizerr, s’ils sont approuvés au Canada). Ottawa a confirmé vendredi l’achat de 1,5 million de comprimés de ces médicaments antiviraux oraux, en plus d’une option sur 0,5 million de comprimés supplémentaires. Ils seront envoyés aux provinces dès leur approbation par Santé Canada.

15,7 jours

Durée moyenne d’un séjour à l’hôpital lié à la COVID-19 au Québec

Source : ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec

Combien de doses ?

Au départ, les experts espéraient que deux doses du vaccin seraient suffisantes. Or, on s’est aperçu que la protection de la deuxième dose diminue au fil du temps. Par exemple, la protection contre l’infection passe d’environ 90 % à 60 %-80 % en sept mois.

Les États-Unis, la Grande-Bretagne et la France offrent déjà à toute la population une troisième dose. Pour l’instant, le Québec l’offre aux 70 ans et plus et aux personnes plus à risque, mais les 50 ans et plus pourraient y avoir accès sous peu si le Comité sur l’immunisation du Québec et le gouvernement choisissent de faire leur la plus récente recommandation du Comité consultatif national de l’immunisation. Les études préliminaires montrent qu’une troisième dose augmente encore la protection contre les risques d’hospitalisation, au-delà de 95 %. « Un excellent vaccin devient un vaccin exceptionnel », dit l’immunologiste André Veillette.

Tôt ou tard, tous les Québécois se verront offrir une troisième dose. Celle-ci donnera-t-elle une protection de très longue durée ou faudra-t-il une nouvelle dose chaque année (comme pour le vaccin contre la grippe) ? Seul l’avenir le dira.

Protection conférée par deux doses de vaccin

Réduction d’environ 95 % des risques d’hospitalisation liés à la COVID-19

Sept mois après la deuxième dose : réduction entre 60 % et 80 % des risques d’infection liés à la COVID-19

Note : la protection contre les risques d’infection varie selon l’âge, le type de vaccin, l’intervalle entre les deux vaccins, et le temps écoulé depuis la deuxième dose. Nous avons pris la protection sept mois après la deuxième dose. Il s’agit des chiffres tirés de la dernière étude de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) publiée à la fin octobre, sauf pour le chiffre de protection contre l’infection pour le vaccin d’AstraZeneca où il s’agit d’études internationales.

Vers une grippe trois fois plus mortelle ?

Le meilleur scénario à long terme ? Dans quelques années, la COVID-19 deviendrait une maladie respiratoire saisonnière qui tuerait entre 1,4 et 3,6 fois plus de personnes par an que la grippe, estime l’épidémiologiste américain Trevor Bedford, professeur au centre de recherche contre le cancer Fred Hutchinson à Seattle.

Quand le pire sera passé, au stade endémique, la COVID-19 pourrait tuer entre 40 000 et 100 000 Américains par an, selon M. Bedford. Au stade pandémique actuel, la COVID-19 a tué 354 000 Américains en 2020, et 425 000 en 2021 (au 29 novembre).

En 2018-2019, donc avant la COVID-19, la grippe avait tué environ 28 000 Américains.

Au Québec, la grippe a tué en moyenne 520 personnes par année entre 2016 et 2019.

Si on adapte les prévisions de l’épidémiologiste américain Trevor Bedford au Québec, la COVID-19 tuerait entre 728 et 1872 personnes par an en phase endémique. En phase pandémique, la COVID a tué 8479 Québécois en 2020, et 3102 en 2021 (au 29 novembre).

Le SARS-CoV2 nous suivra encore pendant des années, voire une décennie, pensent de nombreux experts. Ce qu’il faut faire au plus vite : transformer cette pandémie en une endémie, où la situation sanitaire est maîtrisée.

PHOTO TIRÉE DU SITE DE L’INRS

Alain Lamarre, virologue et professeur à l’Institut national de la recherche scientifique (INRS)

Une endémie ne cause pas d’épidémie suffisamment grande pour mettre en péril le système de santé et le mode de vie des gens.

Alain Lamarre, virologue et professeur à l’Institut national de la recherche scientifique (INRS)

Comment s’y prendre ? En vaccinant une forte proportion de la planète. On revient toujours au même principe : plus il y a de gens vaccinés, moins le virus peut circuler, moins il peut muter.

Au rythme actuel, sans revers de fortune majeur, ça pourrait prendre entre un et deux ans avant de contrôler la pandémie. L’Organisation mondiale de la santé espère vacciner 70 % de la population mondiale d’ici la fin de 2022. Actuellement, 43 % de la population mondiale est adéquatement vaccinée (55 % avec au moins une dose). De façon générale, on estime qu’un taux de vaccination de 90 % permettrait de mettre le variant Delta hors d’état de nuire.

Même au stade endémique, certaines habitudes pandémiques risquent d’être là pour rester. Par exemple, le port du masque dans les lieux publics, un signe de politesse dans plusieurs pays d’Asie depuis des décennies. « Tu as mal à la gorge en te levant ? Porter un masque va devenir l’étiquette socialement acceptable », dit le professeur Alain Lamarre.