Une nouvelle génération d’élus municipaux livre ses réflexions sur des enjeux tels que le transport, la protection des milieux naturels et la densification des agglomérations.

De plus en plus, nos villes sont habitées par des citoyens mobilisés, sensibilisés et plus informés que jamais. Malgré certains enjeux liés à la désinformation, l’accès à internet a permis à ceux qui le désirent d’en connaître davantage sur les sujets qui les touchent particulièrement. À cet effet, les citoyens peuvent maintenant porter un regard plus critique sur les décisions de leurs élus. Ces néocitoyens habitent souvent leur territoire avec en tête des rêves et un désir de contribuer aux choix publics.

Plusieurs facteurs engendrent des mouvements migratoires, qui surviennent à différents moments de la vie, par exemple lors des études, à l’âge de fonder une famille, lorsqu’on recherche un nouveau défi professionnel ou encore au moment de la retraite. Certains décident de revenir dans leur région d’origine alors que d’autres partent plutôt à l’aventure avec différents objectifs : se rapprocher de la nature, vivre une expérience urbaine ou rurale, faire du télétravail, avoir plus de temps de loisir ou encore se retrouver dans une communauté à échelle humaine, où ils sentiront qu’ils ont une incidence et une capacité d’agir.

Ainsi, ces citoyens s’attendent aussi généralement à un développement plus harmonieux, plus vert, plus démocratique, voire avant-gardiste et innovant dans les façons d’aménager le territoire et les possibilités de le développer.

Le Projet 1606 en est un exemple éloquent: Pierre-Philippe Côté, séduit par la petite municipalité de Saint-Adrien, en Estrie, a décidé d’y emménager et de fonder une entreprise de gestion de biens immobiliers « à impact » avec une conscience sociale et culturelle. Il a non seulement fait l’achat de l’église de Saint-Adrien en vue de la convertir en lieu de cocréation multidisciplinaire, mais son projet vise également à aider les nouvelles entreprises et les créateurs du milieu à réaliser leurs ambitions. Et des exemples comme le sien, il en existe d’autres, partout au Québec.

Le néocitoyen veut être fier de son milieu de vie, de ses élus, de sa ville. Qu’il recherche une nature abondante, des marchés et des restaurants offrant des produits locaux, une vie culturelle diversifiée, un meilleur accès à la propriété, un milieu propice au transport actif, le rêve d’une ferme biologique, une communauté ouverte et inclusive ou des possibilités d’emplois stimulants, le néocitoyen choisit le lieu où il habite en fonction de ses valeurs, de ses loisirs et de ses désirs. Il veut vivre une expérience, il veut être séduit, et parfois, il s’attachera si fort à son milieu d’accueil qu’il voudra ensuite être partie prenante de son développement.

Également, les gens sont de plus en plus branchés en réseau sur le monde, avec des communautés virtuelles qui partagent des valeurs communes. Le mouvement Villes en transition qui relie entre eux des citoyens engagés dans des villes d’un peu partout sur la planète en est un bon exemple. Né en Europe, il met en relation des personnes sensibilisées et mobilisées qui souhaitent inciter leurs élus à agir par rapport aux enjeux environnementaux. Ces mouvements souhaitent des changements et demandent aux municipalités de prendre leurs responsabilités. Comme le palier municipal est proche des gens, la relation avec la population est unique. Bien davantage que dans le cas des autres paliers politiques, cette dernière a l’impression de pouvoir agir au niveau municipal, et c’est aussi ce qu’elle demande.

Ainsi, le citoyen engagé représente un nouveau pouvoir d’influence. Il peut rapidement mobiliser une communauté à l’aide des réseaux sociaux, pour l’aider sur certains enjeux et aussi lui apprendre à renverser une décision qui ne trouve pas d’acceptabilité sociale. Si on peut faire des liens avec les tendances d’innovation en marketing, le citoyen se compare au néoconsommateur (il souhaite consommer moins pour consommer mieux, créer une relation avec l’entreprise qu’il choisit pour ses valeurs, influencer en retour par ses choix de consommation).

Tout comme l’entreprise privée qui répond à ces nouvelles tendances en se mettant à l’écoute de son client et en créant une relation avec lui pour améliorer son produit (et son image), la ville de demain aura avantage à créer une relation plus rapprochée avec le citoyen.

La passion partagée de certains résidents pour leur ville, l’accès à la connaissance ainsi que la possibilité de comparer les mesures municipales mises en place avec ce qui se fait ailleurs dans le monde se traduit de plus en plus en compétences collectives. Ces nouvelles capacités renforcent la légitimité des requêtes de ces néocitoyens. Il faudra apprendre à les prendre en considération.

Ces personnes, plus sensibilisées, plus informées et mobilisées pour un développement plus démocratique, sont aujourd’hui nombreuses. Nous avons tout intérêt à les intégrer dans nos processus décisionnels. Si certaines municipalités ne s’adaptent pas ou, pire, si elles les perçoivent comme des groupes de pression à museler, alors elles risqueront de s’aliéner une partie de la population. Tout cela risque d’engendrer une perte d’efficacité, une perte financière et de vains affrontements. Ces citoyens travaillent à améliorer leur milieu de vie et demandent plus de sensibilité à leur égard. Comment collaborer avec eux, en synergie, pour développer autrement la ville de demain et ainsi mieux définir notre vision ?

Virginie Proulx, conseillère municipale du Bic à Rimouski

1 Prenez connaissance du Projet 1606
11 brefs essais pour des villes résilientes et durables – Réflexions de la relève municipale

11 brefs essais pour des villes résilientes et durables – Réflexions de la relève municipale

Somme toute, octobre 2021

192 pages

Qui sont les auteurs ?

De Gatineau à Sainte-Luce en passant par Granby, Rimouski et Saint-Camille, 11 brefs essais pour des villes résilientes et durables donne la parole à la nouvelle génération d’élus municipaux qui, ensemble, pointent les failles, indiquent les écueils, réinventent les moyens, développent les solutions et tracent la voie vers les communautés de demain. L’extrait retenu est signé par Virginie Proulx, conseillère municipale du Bic à Rimouski.