Fidèle à sa réputation de festival politiquement engagé, la Berlinale a présenté mardi en première mondiale Pardé (Closed Curtain), un appel à la liberté du réalisateur iranien Jafar Panahi, tourné sous le manteau en Iran où il est assigné à résidence.

Deux grandes silhouettes en carton grandeur nature du réalisateur, absent à Berlin, avaient été installées par un comité de soutien devant le palais du festival.

Coréalisé par Kambozia Partovi, collaborateur de longue date de Panahi, Pardé raconte l'histoire de deux personnages en fuite qui se réfugient dans une maison isolée.

Le plus vieux a un chien, interdit par la loi islamique, les animaux étant considérés comme impurs. Le plus jeune, une femme, suicidaire, a été arrêtée alors qu'elle se rendait à une fête illégale sur les bords de la Caspienne.

Ils ferment les volets de la maison pour éviter d'être repérés par les autorités et tandis que l'homme tente de continuer à travailler à un scénario, la jeune femme plonge dans le désespoir.

Jafar Panahi a été arrêté à la suite d'un documentaire qu'il a clandestinement tourné en 2009 et placé en résidence surveillée. Il a été condamné à six ans de prison et interdit de tournage pour 20 ans.

Réduit au silence dans son propre pays, il été consacré par les plus grands festivals de cinéma internationaux pour ses films critiques sur la société iranienne.

Il apparaît lui-même dans la seconde partie de Pardé, et on se demande si les deux protagonistes sont finalement le fruit de son imagination, la réalité alternant avec la fiction.

Dans un communiqué joint au dossier de presse du film, le cinéaste a expliqué que son dernier film devait être compris comme une métaphore de sa situation. «Close Curtain utilise le mélange des genres et des histoires pour mettre en évidence que tourner est une nécessité dans la vie d'un cinéaste: c'est le besoin impérieux de montrer la réalité du monde dans lequel nous vivons».

«C'est difficile de travailler mais encore plus, de ne pas pouvoir travailler, surtout quand vous êtes à ce stade de votre carrière», a expliqué à Berlin, Partovi qui incarne aussi l'homme au chien dans le film.

Lundi, Steffen Seibert, le porte-parole de la chancelière Angela Merkel, avait appelé Téhéran à autoriser Panahi à assister au festival.

Closed Curtain est l'un des 19 films en compétition pour l'Ours d'or qui sera décerné samedi.