En novembre 2018, alors invité d’honneur du 24e festival Cinemania de Montréal, l’acteur belge Olivier Gourmet avait modestement accueilli ce titre, disant que les vrais héros sont ceux qui sauvent des vies. Quant aux acteurs, leurs actes héroïques tiennent dans le fait d’incarner des personnages qui nous tendent un miroir.

« Les acteurs, à travers leur travail, peuvent interpeller les consciences et, peut-être, changer un tant soit peu certaines choses », avait-il précisé en entrevue avec La Presse.

C’est sans doute pour cette raison, interpeller les consciences, que Gourmet, un acteur qui s’identifie au cinéma indépendant, a accepté la proposition du réalisateur Antoine Russbach de se glisser dans la peau du terrifiant Franck Blanchet, gestionnaire de cargos qu’il ne voit jamais dans une société de fret maritime, dans le film Ceux qui travaillent.

Terrifiant parce que le fait que cet homme soit responsable de navires pouvant voguer à des milliers de kilomètres de son bureau le désensibilise le jour où il fait face à une crise, soit la présence d’un clandestin à bord d’un des cargos de la flotte. Franck prend alors une décision qui conduira sa vie au bord de l’éclatement.

« J’ai vu le film au festival de Locarno et c’est réussi ! Fort. Puissant », nous a dit le comédien.

« Ce film est en parfaite adéquation avec une certaine façon de vivre aujourd’hui dans certains milieux. Et donc, ça me touche. Je trouve essentiel d’en parler. »

En fait, le personnage de Franck, dans toute sa complexité, amène à se demander ce que nous aurions fait à sa place. Dans une entrevue accordée pendant le Festival international du film francophone de Namur, le réalisateur Antoine Russbach a fait à ce propos un rapprochement entre Franck Blanchet et… Frankenstein. Rien de moins ! « Franck est le monstre qui nous arrange », a dit Russbach dans cette entrevue. C’est grâce à lui si des aliments d’Asie, d’Afrique ou d’Amérique du Sud arrivent sur les tables européennes. Alors qu’un clandestin se glisse dans un conteneur…

PHOTO BERNARD BRAULT, ARCHIVES LA PRESSE

Olivier Gourmet à Montréal, l’an dernier, durant le festival Cinemania

Sa fille, sa conscience

Dans l’histoire, la personne qui interagit le plus avec Franck est sa fille cadette Mathilde (excellente Adèle Bochatay), la plus jeune de ses cinq enfants, qui voue un culte à son père. Sans le savoir, elle devient sa conscience. « Pour Franck, Mathilde est sa seule porte de sortie », dit Olivier Gourmet.

Lorsque le comédien, qu’on a connu au Québec pour son rôle central dans Congorama de Philippe Falardeau, est séduit par un scénario, il dit ne pas regarder quelle sera sa place dans le générique. Si l’histoire est porteuse, il va aller la défendre. Cela dit, dans Ceux qui travaillent, il est, et de loin, le personnage central et est pratiquement de tous les plans. Et il en est ravi.

« Mon personnage est énorme, résume-t-il. Pour moi, c’était un gros boulot et un grand plaisir. Car je suis un bosseur. Plus j’ai de matière à défendre et à gratter pour aller chercher qui est mon personnage et plus j’y trouve mon plaisir d’acteur. »

En salle le 6 septembre.