En visite chez sa sœur et son beau-frère à Bogotá, une expatriée britannique installée à Medellín, en Colombie, se fait réveiller à la levée du jour par le son de ce qui semblerait être celui d’une explosion dans un chantier de construction. Elle est apparemment la seule à l’avoir entendu…

En 2010, nous avons retenu un nom qui, jusque-là, n’était connu que de la frange la plus branchée des cinéphiles : Apichatpong Weerasethakul. Cette année-là, le cinéaste et plasticien thaïlandais a obtenu la Palme d’or du Festival de Cannes grâce à Oncle Boonmee, celui qui se souvient de ses vies antérieures.

Même si son nouveau long métrage, intitulé tout simplement Memoria, a été tourné en anglais et en espagnol dans un pays étranger, la Colombie en l’occurrence, le cinéaste n’a rien perdu de son style et reste fidèle à sa démarche. En parfaite cohérence, Memoria est une proposition aussi radicale que les précédentes, dont la nature métaphysique produira un effet profond chez certains spectateurs et un ennui mortel chez d’autres. Aussi faut-il se mettre dans un état d’esprit plus particulier pour accueillir cette œuvre contemplative magnifique, constituée de longs plans séquences, souvent statiques.

S’adressant directement à une part de nous-mêmes que nous fréquentons rarement, une zone où se côtoient toutes les dimensions de l’expérience humaine, Apichatpong Weerasethakul nous entraîne dans un voyage sensoriel mystérieux avec, pour éclaireuse, la toujours fascinante Tilda Swinton. À partir d’un évènement apparemment banal – un son mystérieux qui tire une femme de son sommeil –, le cinéaste orchestre une quête qui mènera un être humain au bout de lui-même, et peut-être même ailleurs, dans un monde où, d’une certaine façon, la mémoire de l’humanité est accessible.

Tourné dans les montagnes de Pijao et à Bogotá, en Colombie, Memoria est visuellement splendide. Il n’y a pratiquement aucun plan rapproché de tout le film et, pourtant, Apichatpong Weerasethakul parvient, même de loin, à atteindre l’intériorité de sa protagoniste. À l’image de l’œuvre, Tilda Swinton offre une composition dénuée d’effets, mais néanmoins vibrante, totalement en phase avec une démarche où les zones du subconscient sont aussi explorées.

Lauréat, ex æquo avec Le genou d’Ahed (Nadav Lapid), du prix du jury au Festival de Cannes l’an dernier, au cours duquel une première version de ce texte a été publiée, Memoria est à l’affiche au Cinéma du Parc, à Montréal, pour une semaine seulement, en version originale anglaise et espagnole avec sous-titres anglais. À compter du 3 juin, le film pourra être vu au cinéma Le Clap à Québec.

En salle

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Memoria

Drame

Memoria

Apichatpong Weerasethakul

Avec Tilda Swinton, Elkin Díaz, Jeanne Balibar

2 h 16
En salle

7/10