Fort d'une carrière amorcée il y a 25 ans, Jeff Denis plonge pour la première fois dans l'univers du long métrage. Avec une idée en tête: faire les choses à sa façon et explorer des thèmes qui le fascinent. Ce qui, chez lui, ne manque pas d'originalité.

Un genre prévisible que celui de la comédie romantique? Pas du tout! Parlez-en au réalisateur Jeff Denis, qui, avec Napoléon en apparte, explore le genre avec une bonne dose d'humour, de curiosité et d'originalité.

En entrevue, le réalisateur de Québec, qui a autant touché au documentaire qu'au vidéoclip, à la production qu'à la direction photo, est allumé, inspiré et attachant.

Les yeux brillants, il raconte que son directeur photo, Simon Perrier, et lui ont décidé de tourner tout le film avec un seul objectif grand-angulaire.

«Nous savions que ce serait difficile à éclairer, dit-il. Quand on est toujours au grand-angulaire, les spots, il faut savoir où les placer [pour éviter qu'ils apparaissent dans le cadre]. Par contre, cela fait que ton personnage principal, qui, ici, est l'appartement de Napoléon, est très vivant. De plus, on a juste à bouger vers les comédiens pour accentuer leurs émotions.»

Amateur du travail de Wes Anderson et de Paul Thomas Anderson, Jeff Denis s'esclaffe lorsqu'on lui dit qu'il a un rapport à l'objet hors de l'ordinaire.

«Pour moi, les objets sont quelque chose de vivant, oui, de très inspirant. Bien des histoires sont parties d'un objet: une vieille tasse, une vieille table, une vieille caméra. Ils ont déjà plusieurs vies. Si je prends cette tasse [il brandit sa tasse à café], je me demande si elle a été témoin de deux divorces, quatre unions de couples, autant de chicanes. Est-ce que 95 personnes solitaires ont bu dedans en se disant que leur vie est plate ? Elle a donc du vécu.»

Sans être aussi dépressif, le Napoléon (Jean-Michel Girouard) du film de Jeff Denis est un jeune homme un peu coincé, geek sur les bords, marqué par une très forte influence parentale même s'il a son propre «apparte», et qui n'a aucune idée de la manière d'aborder une femme. Une carence embêtante le jour où sa route croise celle de Joséphine (Joëlle Bond) avec qui les atomes de Napoléon sont visiblement plus que crochus.

N'en disons pas plus sur le scénario pour nous attarder davantage aux sources d'inspiration du cinéaste: lui-même et ceux qui l'entourent.

«Le personnage, très gauche, de Napoléon est un peu inspiré de moi. Il aimerait bien être romantique, mais il est pourri. Je n'ai pas eu de difficulté à l'écrire. Je n'ai pas été drillé à ça, mais je l'apprends en vieillissant.»

Assise à ses côtés, sa conjointe Maude Brochu, auteure de la trame sonore du film, rigole.

Le réalisateur ajoute que ses amis ont largement inspiré ses personnages. D'ailleurs, l'appartement de Simon est celui d'un des membres de l'équipe. «Et c'est normalement plus rempli, rigole M. Denis. On l'a allégé un peu pour bouger la caméra!»

Attentif à tout ce qui l'entoure, Jeff Denis aime bien observer les gens. Il voit, il entend et il note des anecdotes. Son constat? Il existe plus souvent qu'on le croit des tranches de vie bien réelles qu'on a tendance à croire uniquement possibles dans l'imagination des scénaristes.

Comme quoi la vie, c'est aussi du cinéma.

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Napoléon en apparte est à l'affiche.