Pour jouer le maire dans le film Le coq de St-Victor, Guy Jodoin a juché sa voix.

«Le réalisateur Pierre Greco avait en tête de faire un film très "cartoonesque" et où, en même temps, nous restions près de nos émotions. Après plusieurs essais, je me suis dit que j'allais percher ma voix, dit l'animateur et comédien en entrevue. Je l'ai montée d'un ton et demi, ce qui était le bon niveau.»

Il a toutefois fallu faire beaucoup de travail pour atteindre les voix et le ton que Pierre Greco voulait obtenir. C'était vrai pour Guy Jodoin comme pour tous les autres comédiens (Anne Dorval, Mariloup Wolfe, Paul Ahmarani, Guy Nadon, Alexis Martin et plusieurs autres) ayant participé au projet. C'est à partir de leurs voix et des dialogues que les personnages ont été dessinés et le film, produit chez 10e Avenue, construit.

«Au départ, c'était difficile, concède Mariloup Wolfe, voix de Marcelline. J'ai simplement vu des dessins des personnages avant l'enregistrement. Je ne savais pas quel était le caractère du personnage que je jouais. Nous [les comédiens] en avons discuté et j'ai décidé de lui donner plein de couleurs. Et en voyant le film, à Québec, j'ai appris à la connaître. Elle est très fouine et mange tout le temps!»

Ce travail en amont a été payant. Car Le coq de St-Victor est un film coloré, réjouissant, parfois un peu brouillon, mais attachant, à l'image de ses personnages.

Inspiré du roman jeunesse Le coq de San Vito de Johanne Mercier, ce film d'animation où la 2D et la 3D se côtoient nous amène dans un village hors du temps et niché au creux de montagnes arrondies où les villageois vivent au rythme d'un coq plutôt matinal. C'est que chaque matin, l'animal, qui appartient au maire, chante à 4h!

Le jour où le coq, devenu un brin dépressif, décide de chanter encore plus tôt, les habitants n'en peuvent plus. Au lieu de chercher à comprendre ce qui cloche avec le volatile, ils décident de l'échanger à la première proposition qui arrive sous la forme d'un âne soi-disant porte-bonheur, offert par le village voisin. Croyant faire une bonne affaire, les habitants de St-Victor vont au contraire s'enfoncer dans leurs soucis. Jusqu'au jour où quelques-uns d'entre eux tenteront d'aller «coqnapper» leur ancien oiseau. Ils en tireront alors une morale coquine et mignonne qu'on se gardera bien de dévoiler ici.

De l'Italie à Charlevoix

Dans le roman de Johanne Mercier, l'histoire se déroule en Italie où l'auteure a séjourné et effectivement été réveillée par un coq trop zélé. À la lecture du roman, Pierre Greco a décidé de transposer celle-ci dans la région de Charlevoix.

«Il faut savoir que Johanne est ma soeur, dit le cinéaste. En lisant son livre, je me suis dit qu'on pouvait très bien camper l'histoire à Charlevoix, où nous avons de la famille. Pour moi, c'est une forme d'hommage à ma famille maternelle. Il y a dans Charlevoix de beaux villages semblables à St-Victor. Je pense entre autres à Saint-Hilarion.»

Quant à la place centrale du village de St-Victor, certains y verront des ressemblances avec la place Royale de Québec. Avec raison! «Dans le film, au lieu d'avoir une statue de Louis XIV comme à la place Royale, il y a une statue du coq au coeur du village», dit Pierre Greco.

Cela dit, le réalisateur estime qu'en dépit de son côté très «cartoon», son film s'adresse à toute la famille. «Tout le monde peut s'y retrouver, dit-il. Il y a des gags pour les enfants alors qu'ailleurs, ce sont les adultes qui vont rire.»

La recette tient au mélange de deux univers qui, au risque de paraître très différents l'un de l'autre, réussissent à se rejoindre. «Johanne a une écriture très "pagnolesque", dit Pierre Greco. Ses personnages sont truculents, naïfs, sympathiques et se mettent dans le trouble. Je me suis dit: prenons ces personnages à la Pagnol et plaçons-les dans un environnement à la Chuck Jones [créateur ou cocréateur de plusieurs personnages de dessins animés, dont Bugs Bunny]. C'est ça qui va donner le ton au film.»

Une telle aventure ne serait pas complète sans une petite leçon à la clé. Guy Jodoin le reconnaît, mais salue le fait qu'on ne l'a pas surlignée au crayon gras. «Ce film nous dit qu'il faut apprécier les choses qu'on possède, mais aussi qu'on ne peut pas toujours évoluer dans une seule discipline, dit-il. À la fin de l'histoire, les habitants de St-Victor comprennent qu'ils doivent apprendre à bien équilibrer travail et plaisir. Moi-même, quand je regarde combien j'ai travaillé au cours des 20 dernières années, je me dis que je ne dois pas m'oublier.»

Le coq de St-Victor prendra l'affiche le 21 février.