Une première version du scénario d’un film consacré à Guy Lafleur devrait être prête l’été prochain, a annoncé son auteur, l’acteur Luc Picard, vendredi sur les ondes de Radio-Canada.

Dans le cadre du projet, lancé en 2020 par Christian Larouche de la maison Christal Films Productions avec l’accord de la famille Lafleur, Luc Picard s’est entretenu avec l’ancien numéro 10 du Canadien, qui vient de mourir à 70 ans des suites d’un cancer du poumon. « Je n’ai pas pu le rencontrer plusieurs fois, mais ce qui se dégageait de lui, c’était d’abord une force physique, malgré sa maladie », a lancé Luc Picard à l’émission de radio Pénélope.

Peiné comme tous les Québécois par l’annonce du décès du « Démon blond » vendredi, l’acteur-scénariste a précisé être actuellement à la recherche de l’essence du personnage. « C’est un homme de peu de mots, dans le fond, avec une espèce d’humilité toute canadienne-française. La même qu’on sentait chez Maurice Richard… »

Mon intuition, c’est de partir de l’intime… de la poésie du mouvement, du geste, et de juxtaposer ça avec tout ce qu’il représentait pour le public.

Luc Picard, acteur et scénariste

L’acteur qui incarnera le célèbre joueur au grand écran n’a pas encore été choisi. « Ça ne sera évidemment pas moi, a déclaré Luc Picard. On ne sait même pas quand est-ce qu’on va tourner le film… »

Un impact majeur sur la culture québécoise

Adulé pour ses exploits sur la glace, Guy Lafleur a déjà inspiré toute une génération d’artistes québécois qui l’ont mis en scène dans leurs chansons, écrits et toiles.

Pour les Québécois qui l’ont vu grandir dans les médias dès ses premiers exploits de joueur pee-wee, « ça a été un proche pendant 60 ans », constate le professeur d’études littéraires et d’histoire culturelle Benoît Melançon, de l’Université de Montréal.

« Il n’y a pas grand monde qui peut se réclamer d’une telle durée, poursuit le professeur. On l’a vu grandir, enfant à 10 ans, avec le Canadien dans les années 70, puis on l’a vu avoir une vie familiale bouleversée, être malade… C’est quelqu’un de très familier qui a toujours été caractérisé par son accessibilité. »

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE

Guy Lafleur lors d’une collecte de sang au Centre Bell en 2012.

Guy Lafleur, c’était le gars qui vous accueillait dans son restaurant, qui signait des autographes partout pour tout le monde qui en voulait.

Benoît Melançon, professeur

Benoît Melançon a retrouvé une quinzaine de pièces musicales qui rendent hommage au joueur, dont une pièce assez peu connue de Robert Charlebois (et Luc Plamondon) intitulée Champion. « En tricotant il a fait son ch’min/Jusqu’au Forum de Montréal/Pour se r’trouver du jour au lendemain/Parmi les étoiles d’la Ligue nationale », chante Charlebois au sujet du joueur.

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Dans les années 70, le chanteur folklorique Oscar Thiffault a aussi réécrit une chanson consacrée 20 ans plus tôt à Maurice Richard pour rendre hommage au talent de Guy Lafleur, constate le professeur. « C’est Maurice Richard qui est si populaire/C’est Maurice Richard qui score toul’temps » est ainsi devenu « C’est Ti-Guy Lafleur qui est si populaire/C’est Ti-Guy Lafleur qui score toul’temps. »

En 1979, Guy Lafleur a lui-même lancé un album disco, assez surprenant, dans lequel il prodiguait ses conseils aux jeunes joueurs. Celui que beaucoup qualifiaient d’artiste (sur la glace) a aussi été représenté en poésie, notamment au Canada anglais, où ses prouesses ont aussi épaté.

L’artiste visuel Serge Lemoyne, dont la série « Bleu-Blanc-Rouge » en hommage au Tricolore a fait époque, a en outre consacré trois de ses toiles à Guy Lafleur. Son statut de « plus grand de tous les Québécois » est même évoqué dans le long métrage féministe La cuisine rouge, signé Paule Baillargeon et Frédérique Collin et sorti en 1980. «C’est quand même assez étonnant dans un film comme celui-là !» rigole M. Melançon.

Après Maurice Richard et Jean Béliveau, Guy Lafleur est le dernier des grands hockeyeurs à avoir marqué durablement la culture populaire, estime le professeur Melançon, auteur d’une biographie de Richard. « Sa mort clôt un chapitre du rapport des Québécois au sport, dit-il. Tout a changé depuis, les médias, le rapport à l’argent… J’imagine très mal un quatrième mousquetaire. Depuis Lafleur, en tous cas, il n’y a rien eu de semblable. »