Les critiques de notre envoyé spécial.

(Cannes) Lingui, de Mahamat-Saleh Haroun

Sélectionné en compétition officielle pour la troisième fois, le cinéaste tchadien Mahamat-Saleh Haroun, lauréat du prix du jury en 2010 grâce à Un homme qui crie, revient sur la Croisette avec Lingui, un drame construit autour de la question de l’avortement. Abordant de front la condition des femmes dans son pays, le vétéran cinéaste relate le parcours de Maria (Rihane Khalil Alio), une jeune fille de 15 ans vivant seule avec Amina (Achouackh Abakar Souleymane), sa mère, abandonnée depuis toujours par le père de Maria. Interdit par la religion et par la loi du pays, l’avortement auquel souhaite avoir recours Maria devient ici un enjeu moral dénoncé violemment par Amina, qui pourrait cependant faire réaliser à cette dernière dans quelles conditions sont tenues les femmes par les autorités, tant religieuses que civiles. Si le récit est un peu plaqué, l’atmosphère dans laquelle baigne tout le film est riche de textures. S’attardant principalement à évoquer le quotidien de ces femmes, Mahamat-Saleh Haroun les montre dans leur travail, leur dévotion, la façon dont elles s’y prennent pour contourner les règles d’un système qui n’est pas fait pour elles, avec des images – splendides – et des ambiances sonores qui traduisent avec réalisme la fébrilité de la ville, N’Djamena en l’occurrence.

Julie (en 12 chapitres), de Joachim Trier

PHOTO FOURNIE PAR MEMENTO DISTRIBUTION

Herbert Nordrum et Renate Reinsve dans Julie (en 12 chapitres). Le film de Joachim Trier est sélectionné dans la compétition officielle du Festival de Cannes.

Révélé il y a 10 ans grâce à Oslo, 31 août, présenté à Un certain regard, le cinéaste norvégien Joachim Trier décrit dans son nouveau film le parcours d’une femme qui, à l’aube de la trentaine, a du mal à savoir ce qu’elle souhaite dans sa vie, particulièrement sur le plan des relations amoureuses. Julie (en 12 chapitres) (étrangement intitulé The Worst Person in the World en anglais) est exactement construit comme son titre français l’indique. Constitué d’un prologue, de 12 chapitres et d’un épilogue, le récit s’étale sur quatre ans, le temps d’explorer une relation que Julie (Renate Reinsve) entretient d’abord avec un auteur de bande dessinée de 15 ans son aîné (Anders Danielsen Lie), puis avec un séduisant jeune homme (Herbert Nordrum). Parsemé de longueurs et de redites, le film tarde à convaincre, malgré les présences fortes des trois interprètes, particulièrement Renate Reinsve, une actrice de théâtre qui tient ici pour la première fois un rôle important au cinéma. On voit mal comment Julie (en 12 chapitres) pourrait se retrouver au palmarès.