Pour la Saint-Valentin, nous cherchions des comédies romantiques bien de chez nous. Mais à nous quatre, nous ne sommes parvenus qu’à en trouver deux ou trois. Pourquoi ? J’ai décidé de discuter de la place de l’amour dans le cinéma québécois avec Julie Vaillancourt, professeure de cinéma au Cégep de Saint-Jérôme.

« Les plus grandes histoires d’amour d’ici sont des histoires de résilience. » Le meilleur exemple, selon Mme Vaillancourt, c’est Un homme et son péché. Le roman de Claude-Henri Grignon, paru en 1933, est devenu un incontournable de la culture québécoise : adapté en radioroman de 1939 à 1962, en téléroman de 1956 à 1970, et porté au grand écran en 1949 et en 2002. La dernière série télévisée, commencée en 2016, s’est même terminée lundi dernier.

« Donalda et son amour impossible avec Alexis, Séraphin qui est davantage attiré par l’appât du gain… C’est plus un drame sentimental. Au Québec, la romance s’inscrit plus souvent dans un contexte dramatique. »

Avec la Révolution tranquille, les choses commencent à changer. « Dans les années 1970, on va un peu plus dans la comédie, mais c’est davantage la politique qui est à l’avant-plan. »

La professeure donne l’exemple de Je suis loin de toi, mignonne, un film de 1976 par Claude Fournier, mettant en vedette Dominique Michel et Denise Filiatrault. « Ce sont deux femmes qui travaillent dans une usine de munitions et qui rêvent au mariage. Mais tout le contexte politique de la Seconde Guerre mondiale prend beaucoup de place. »

C’est aussi l’époque des « films de fesses ». Alors que les Québécois sortent lentement du carcan répressif de l’Église catholique, des réalisateurs d’ici s’inspirent de films érotiques scandinaves. On peut penser à Valérie (1969) ou L’initiation (1970) de Denis Héroux, ou plus notamment à Deux femmes en or (1970) de Claude Fournier. Mais ne vous méprenez pas : vous n’y verrez rien de plus osé qu’un peu de nudité.

Dans les années 1990 et 2000, on voit apparaître des comédies de mœurs ou de situation. Mme Vaillancourt nomme Cruising Bar (1989) de Robert Ménard, Québec-Montréal (2002) et Horloge biologique (2005) de Ricardo Trogi. Mais si la comédie et la romance sont bien présentes, on ne pourrait pas les qualifier de « comédies romantiques », précise la professeure. « On est davantage dans la critique sociale. »

La toute première comédie romantique québécoise serait peut-être Nez rouge en 2003, d’Éric Canuel. « C’est un film qui m’avait marqué. C’est une comédie sentimentale, romantique, très inspirée du modèle hollywoodien. C’est vraiment calqué sur le cinéma américain », explique Mme Vaillancourt. Dans les mêmes années, elle note aussi Duo (2006) de Richard Ciupka, mais les exemples du genre restent rares. « Dans notre cinéma québécois, on en a très peu. »

Si vous n’avez qu’une comédie romantique bien de chez nous à regarder pour la Saint-Valentin, elle vous suggère Les aimants (2004) d’Yves P. Pelletier. « C’est une comédie sentimentale avec Isabelle Blais. Les comédiens sont sympathiques et ils ne tombent pas dans le cliché. Bien sûr, il y a la morale à la fin de l’amour qui triomphe toujours, mais le film a une originalité qui le garde intéressant. »