(Küsnacht) Tina Turner était dans son élément sur scène, offrant des performances scéniques éblouissantes. Une fois les lumières éteintes, la Reine du rock profitait de la tranquillité suisse que lui offrait sa nouvelle patrie.

Loin du tumulte, la mégavedette menait une vie au calme dans la petite localité de Küsnacht, banlieue cossue de la capitale financière de la Suisse, en bordure du lac de Zurich.

De nombreux habitants venaient déposer des fleurs jeudi devant sa somptueuse résidence, le château Algonquin, et se souvenaient de l’avoir croisée dans les restaurants et les supermarchés locaux.  

La chanteuse s’était installée en Suisse en 1995 avec son compagnon, le producteur allemand Erwin Bach, 67 ans. Elle a vécu à Küsnacht jusqu’à sa mort mercredi à 83 ans, des suites d’une longue maladie.

« Je la connaissais personnellement, c’est pourquoi on se sent triste », a déclaré le maire de la ville, Markus Ernst, à l’AFP.

« Elle était vraiment très heureuse ici. Je pense qu’elle avait vraiment trouvé l’endroit où elle voulait passer le reste de sa vie. Elle recherchait le calme et la discrétion », a-t-il ajouté. « Elle était vraiment tombée amoureuse de Küsnacht ».

Icône… et citoyenne modèle

En 2013, trois mois après avoir épousé Erwin Bach et acquis la nationalité suisse, Tina Turner avait même renoncé à sa citoyenneté américaine.

Le président suisse Alain Berset lui a rendu hommage à l’annonce de son décès, tweetant : « Avec la mort de Tina Turner, le monde a perdu une icône […] qui avait trouvé en Suisse une deuxième patrie ».

En 2021, l’université de Berne lui avait octroyé un doctorat honoris causa pour son « œuvre musicale et sa vie artistique uniques ».

Elle avait dû apprendre l’allemand et la culture civique helvétique afin de passer les tests nécessaires pour obtenir la nationalité suisse, et la presse locale la qualifiait de citoyenne modèle. Elle participait aux fréquentes « votations populaires », ces référendums locaux ou nationaux qui font la particularité du système politique suisse.

« Éternelle »

Comme ailleurs en Suisse, à Küsnacht, qui compte quelque 14 000 habitants, la discrétion et le respect de la vie privée font presque office de religion.

Tina Turner « sentait qu’elle faisait partie de cette ville » et qu’en retour « elle représentait beaucoup pour nous », a confié son maire, Markus Ernst.

La chanteuse finançait même les décorations de Noël de la localité. Des ouvriers les ont remises en place jeudi en hommage à la grande vedette sur les réverbères de la rue principale de Küsnacht.  

Elle avait également donné son nom, Tina, au navire de sauvetage qui patrouille sur le lac de Zurich depuis une décennie.

La demeure où elle habitait, en retrait de la rue principale, surplombe le lac et est entourée d’un splendide jardin. Sur les grilles, Rosanne Salazar a accroché une pancarte sur laquelle on pouvait lire : « 200 millions de disques vendus. Huit Grammy Awards. Une seule Tina Turner ».  

« Je vis ici depuis dix ans. Nous nous soucions de Tina », a déclaré cette femme de 56 ans à l’AFP. « Elle a eu une enfance horrible, elle a été abandonnée et été maltraitée par Ike Turner, mais ici en Suisse, elle a trouvé une fin heureuse. Les gens ici la laissaient tranquille ».

Ses voisins appréciaient bien sûr sa musique, mais ils chérissaient aussi la force qu’elle dégageait, se rappelle le maire.

« Beaucoup de gens l’admiraient », a-t-il assuré. « Nous allons avoir besoin de temps pour nous habituer à l’idée que nous avons perdu Tina pour toujours. Mais je suis sûr que, d’une manière ou d’une autre, elle sera éternelle ».